La San-Felice, Tome III
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Title: La San-Felice, Tome III
Author: Alexandre Dumas
Release Date: May 16, 2006 [EBook #18402]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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SAN-FELICE, TOME III ***
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ALEXANDRE DUMAS
LA SAN-FELICE
TOME III
DEUXIÈME ÉDITION
PARIS MICHEL LÉVY FRÈRES, LIBRAIRES ÉDITEURS RUE
VIVIENNE, 2 BIS, ET BOULEVARD DES ITALIENS, 13 A LA
LIBRAIRIE NOUVELLE
XXXVII
GIOVANNINA
Nos lecteurs doivent remarquer avec quel soin nous les conduisons à
travers un pays et des personnages qui leur sont inconnus, afin de
garder à la fois à notre récit toute la fermeté de l'ensemble et toute la
variété des détails. Cette préoccupation nous a naturellement entraîné
dans quelques longueurs qui ne se représenteront plus, maintenant qu'à
peu d'individualités près que nous rencontrerons sur notre route, tous
nos personnages sont entrés en scène, et, autant qu'il a été en notre
pouvoir, ont, par l'action même, exposé leur caractère. Notre avis, au
reste, est que la longueur ou la brièveté d'une matière n'est point
soumise à une mesure matérielle: ou l'oeuvre est intéressante, et,
eût-elle vingt volumes, elle semblera courte au public; ou elle est
ennuyeuse, et, eût-elle dix pages seulement, le lecteur fermera la
brochure et la jettera loin de lui avant d'en avoir achevé la lecture;
quant à nous, c'est en général nos livres les plus longs, c'est-à-dire ceux
dans lesquels il nous a été permis d'introduire un plus grand
développement de caractères et une plus longue suite d'événements, qui
ont eu le plus de succès et ont été le plus avidement lus.
C'est donc entre des personnages déjà connus du lecteur, ou auxquels il
ne nous reste plus que quelques coups de pinceau à donner, que nous
allons renouer notre récit, qui semble, au premier coup d'oeil, s'être
écarté de sa route pour suivre à Rome notre ambassadeur et le comte de
Ruvo, écart nécessaire, on le reconnaîtra plus tard, en revenant à Naples
huit jours après le départ d'Ettore Caraffa pour Milan et du citoyen
Garat pour la France.
Nous nous retrouvons donc, vers dix heures du matin, sur le quai de
Mergellina, fort encombré de pêcheurs et de lazzaroni, de gens du
peuple de toute espèce qui courent, mêlés aux cuisiniers des grandes
maisons, vers le marché que vient d'ouvrir en face de son casino, le roi
Ferdinand, qui, vêtu en pêcheur, debout derrière une table couverte de
poissons, vend lui-même sa pêche; malgré la préoccupation où l'ont jeté
les affaires politiques, malgré l'attente où il est, d'un moment à l'autre,
d'une réponse de son neveu l'empereur, malgré la difficulté qu'il
éprouve à escompter rapidement la traite de vingt cinq millions
souscrite par sir William Hamilton, et endossée par Nelson au nom de
M. Pitt, le roi n'a pas pu renoncer à ses deux grandes distractions, la
pêche et la chasse: hier, il a chassé à Persano; ce matin, il a pêché à
Pausilippe.
Parmi la foule qui, attirée par ce spectacle fréquent mais toujours
nouveau pour le peuple de Naples, remonte le quai de Mergellina, nous
serions tenté de compter notre vieil ami Michele le Fou, qui,
hâtons-nous de le dire, n'a rien de commun avec le Michele Pezza que
nous avons vu s'élancer dans la montagne après le meurtre de Peppino,
mais notre Michele à nous, qui, au lieu de continuer à remonter le quai
comme les autres, s'arrête à la petite porte de ce jardin déjà bien connu
de nos lecteurs. Il est vrai qu'à la porte de ce jardin se tient debout et
appuyée à la muraille, les yeux perdus dans l'azur du ciel, ou plutôt
dans le vague de sa pensée, une jeune fille à laquelle sa position
secondaire ne nous a permis jusqu'à ce moment de donner qu'une
attention secondaire comme sa position.
C'est Giovanna ou Giovannina, la femme de chambre de Luisa
San-Felice, appelée plus souvent par abréviation Nina.
Elle représente un type particulier chez les paysans des environs de
Naples, une espèce d'hybride humaine que l'on est tout étonné de
trouver sous le brûlant soleil du Midi.
C'est une jeune fille de dix-neuf à vingt ans, de taille moyenne, et
cependant plutôt grande que petite, parfaitement prise dans sa taille, et
à qui le voisinage d'une femme distinguée a donné des goûts de
propreté rares
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