La San-Felice, Tome 8 | Page 8

Alexandre Dumas, père
les yeux crev��s, le nez et les oreilles coup��s, le croisa tr��buchant. Il ��tait nu, et des hommes qui le suivaient en l'insultant, le for?aient de marcher en le piquant par derri��re avec des sabres et des ba?onnettes.
Un autre, �� qui l'on avait sci�� les pieds, ��tait forc�� �� coups de fouet de courir sur les os de ses jambes comme sur des ��chasses, et, chaque fois qu'il tombait, �� coups de fouet ��tait forc�� de se relever et de reprendre cette course effroyable.
Enfin �� la porte ��tait dress�� un b?cher sur lequel on br?lait des femmes et des enfants que l'on y jetait vivants ou moribonds, et dont ces cannibales, et, entre autres, le cur�� Rinaldi, que nous avons d��j�� eu l'occasion de nommer deux ou trois fois, s'arrachaient les morceaux �� moit�� cuits pour les d��vorer[1].
[Note 1: Comme on pourrait croire que nous faisons de l'horreur �� plaisir, nous allons citer les diff��rents textes auxquels nous empruntons ces d��tails.
?En outre,--dit Bartolomeo Nardini dans ses M��moires pour servir �� l'histoire des r��volutions de Naples, par un t��moin oculaire,--en outre, le cardinal avait fait fabriquer une quantit�� de lacets qu'il faisait jeter dans les maisons pour donner �� ce mensonge l'apparence de la v��rit��. Les jeunes gens de la ville, qui avaient ��t�� forc��s de s'inscrire aux r?les de la garde nationale, fuyaient, quelques-uns travestis en femmes, les autres en lazzaroni, et se cachaient dans les maisons les plus mis��rables, pensant que celles-l�� seraient les plus respect��es. Mais ceux qui avaient eu la chance de passer �� travers le peuple sans ��tre reconnus, ne trouvaient point d'h?tes qui voulussent les recevoir. On savait trop bien que les maisons o�� on les trouverait seraient livr��es au pillage et �� l'incendie. Les fr��res ferm��rent la porte �� leurs fr��res, les ��pouses �� leurs ��poux, les parents �� leurs enfants. Il se trouva �� Naples un p��re si d��natur��, que, pour prouver son attachement au parti royaliste, il livra de sa propre main son fils �� cette populace, sans m��me qu'il f?t poursuivi par elle, et se fit une cuirasse avec le sang de son enfant.
?Ces malheureux fugitifs, ne trouvant personne qui consent?t �� leur donner asile, ��taient contraints de se cacher dans les ��gouts de la ville, o�� ils rencontraient d'autres malheureux, forc��s de s'y cacher comme eux, et hors desquels la faim les for?ait de sortir la nuit pour aller chercher quelque nourriture. Les lazzaroni les attendaient �� l'aff?t, s'emparaient d'eux, les faisaient expirer au milieu des tortures; puis, �� ces corps mutil��s, ils coupaient les t��tes, qu'ils portaient au cardinal Ruffo.?
Attendez-vous �� mieux que cela.
?Durant l'assaut des chateaux et de la ville, raconte l'historien Cuoco,--le m��me que, dans sa lettre �� Ruffo, le roi condamna irr��vocablement �� mort,--durant l'assaut des chateaux, le peuple napolitain commit des barbaries qui font fr��mir et deviennent inexplicables, m��me �� l'endroit des femmes. Il ��leva sur les places publiques des b?chers o�� il faisait cuire et mangeait les membres des malheureux qu'il y jetait vivants ou moribonds.?
Or, notez que l'homme qui raconte ceci est Vicenzo Cuoco, l'auteur du Pr��cis sur les ��v��nements de Naples, c'est-��-dire un des magistrats les plus distingu��s du barreau napolitain. Malgr�� la recommandation de Ferdinand, il parvint �� ��chapper au massacre populaire et au massacre juridique qui le suivit. Exil�� pendant dix ans de sa patrie, il y rentra avec le roi Joseph, fut ministre sous Murat, et devint fou de terreur parce que, Murat tomb��, le prince L��opold lui fit demander son Pr��cis historique.
Un autre auteur, qui garde l'anonyme et qui intitule son livre Mes P��rils, raconte que, s'��tant sauv��, d��guis�� en femme, dans une maison o�� l'on voulut bien lui donner l'hospitalit��, il y fit connaissance avec le cur�� Rinaldi, qui, ne sachant point ��crire, le tourmentait pour lui faire r��diger pour Ferdinand un m��moire o�� il sollicitait de Sa Majest�� la faveur d'��tre nomm�� gouverneur de Capoue, ��num��rant au nombre de ses droits incontestables �� ce poste d'avoir, �� cinq ou six reprises diff��rentes, mang�� du jacobin, et, entre autres, une ��paule d'enfant tir�� du sein de sa m��re ��ventr��e.
On ferait un livre �� part du simple r��cit des diff��rentes tortures inflig��es aux patriotes, tortures qui font le plus grand honneur �� l'imagination des lazzaroni napolitains, en ce que ces tortures ne sont port��es ni sur le r��pertoire de l'inquisition, ni sur le catalogue des supplices des Indiens rouges.]
Ce b?cher ��tait fait d'une partie des meubles du palais jet��s par les fen��tres. Mais, la rue s'��tant trouv��e encombr��e, le rez-de-chauss��e avait ��t�� moins d��vast�� que les autres pi��ces, et dans la salle �� manger restaient une vingtaine de chaises et une pendule qui continuait �� marquer l'heure avec l'impassibilit�� des choses m��caniques.
Salvato jeta un coup d'oeil machinal sur cette pendule: elle marquait quatre heures un quart.
Les hommes qui
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