La Duchesse de Palliano | Page 9

Stendhal
se trouver dans ces bois: il s'y cachait, dit-on, et avait soin de ne se montrer aux regards de la duchesse que lorsqu'elle ?tait bien dispos?e par les discours de Diane Brancaccio. Celle-ci faisait un signal �� Marcel.
Diane, voyant sa ma?tresse sur le point d'?couter la passion fatale qu'elle avait fait na?tre dans son coeur, c?da elle-m?me �� l'amour violent que Domitien Fornari lui avait inspir?. D?sormais elle se tenait s�Cre de pouvoir l'?pouser. Mais Domitien ?tait un jeune homme sage, d'un caract?re froid et r?serv?; les emportements de sa fougueuse ma?tresse, loin de l'attacher, lui sembl?rent bient��t d?sagr?ables. Diane Brancaccio ?tait proche parente des Carafa; il se tenait s�Cr d'?tre poignard? au moindre rapport qui parviendrait sur ses amours au terrible cardinal Carafa qui, bien que cadet du duc de Palliano, ?tait, dans le fait, le v?ritable chef de la famille.
La duchesse avait c?d? depuis quelque temps �� la passion de Capece, lorsqu'un beau jour on ne trouva plus Domitien Fornari dans le village o�� ?tait rel?gu?e la cour du marquis de Montebello. Il avait disparu: on sut plus tard qu'il s'?tait embarqu? dans le petit port de Nettuno, sans doute il avait chang? de nom, et jamais depuis on n'eut de ses nouvelles.
Qui pourrait peindre le d?sespoir de Diane? Apr?s avoir ?cout? avec bont? ses plaintes contre le destin, un jour la duchesse de Palliano lui laissa deviner que ce sujet de discours lui semblait ?puis?. Diane se voyait m?pris?e par son amant; son coeur ?tait en proie aux mouvements les plus cruels; elle tira la plus ?trange cons?quence de l'instant d'ennui que la duchesse avait ?prouv? en entendant la r?p?tition de ses plaintes. Diane se persuada que c'?tait la duchesse qui avait engag? Domitien Fornari �� la quitter pour toujours, et qui, de plus lui avait fourni les moyens de voyager. Cette id?e folle n'?tait appuy?e que sur quelques remontrances que jadis la duchesse lui avait adress?es. Le soup?on fut bient��t suivi de la vengeance. Elle demanda une audience au duc et lui raconta tout ce qui se passait entre sa femme et Marcel. Le duc refusa d'y ajouter foi.
- Songez, lui dit-il, que depuis quinze ans je n'ai pas eu le moindre reproche �� faire �� la duchesse; elle a r?sist? aux s?ductions de la cour et �� l'entra?nement de la position brillante que nous avions �� Rome; les princes les plus aimables, et le duc de Guise lui-m?me, g?n?ral de l'arm?e fran?aise, y ont perdu leurs pas. et vous voulez qu'elle c?de �� un simple ?cuyer?
Le malheur voulut que le duc s'ennuyant beaucoup �� Soriano, village o�� il ?tait rel?gu?, et qui n'?tait qu'�� deux petites lieues de celui qu'habitait sa femme, Diane put en obtenir un grand nombre d'audiences, sans que celles-ci vinssent �� la connaissance de la duchesse. Diane avait un g?nie ?tonnant; la passion la rendait ?loquente. Elle donnait au duc une foule de d?tails; la vengeance ?tait devenue son seul plaisir. Elle lui r?p?tait que, presque tous les soirs, Capece s'introduisait dans la chambre de la duchesse sur les onze heures, et n'en sortait qu'�� deux ou trois heures du matin. Ces discours firent d'abord si peu d'impression sur le duc, qu'il ne voulut pas se donner la peine de faire deux lieues �� minuit pour venir �� Gallese et entrer �� l'improviste dans la chambre de sa femme.
Mais un soir qu'il se trouvait �� Gallese, le soleil ?tait couch?, et pourtant il faisait encore jour, Diane p?n?tra tout ?chevel?e dans le salon o�� ?tait le duc. Tout le monde s'?loigna, elle lui dit que Marcel Capece venait de s'introduire dans la chambre de la duchesse. Le duc, sans doute mal dispos? en ce moment, prit son poignard et courut �� la chambre de sa femme, o�� il entra par une porte d?rob?e. Il y trouva Marcel Capece. A la v?rit?, les deux amants chang?rent de couleur en le voyant entrer; mais du reste, il n'y avait rien de r?pr?hensible dans la position o�� ils se trouvaient. La duchesse ?tait dans son lit occup?e �� noter une petite d?pense qu'elle venait de faire; une cam?riste ?tait dans la chambre; Marcel se trouvait debout �� trois pas du lit.
Le duc furieux saisit Marcel �� la gorge, l'entra?na dans un cabinet voisin, o�� il lui commanda de jeter �� terre la dague et le poignard dont il ?tait arm?. Apr?s quoi le duc appela des hommes de sa garde, par lesquels Marcel fut imm?diatement conduit dans les prisons de Soriano.
La duchesse fut laiss?e dans son palais, mais ?troitement gard?e.
Le duc n'?tait point cruel; il parait qu'il eut la pens?e de cacher l'ignominie de la chose, pour n'?tre pas oblig? d'en venir aux mesures extr?mes que l'honneur exigerait de lui. Il voulut faire croire que Marcel ?tait retenu en prison pour une tout autre
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