La Conquete de Plassans | Page 9

Emile Zola
pour voir; mais ils avaient fil��, et raide, je vous en r��ponds.
--C'est bien surprenant.... Mais o�� ��tais-je donc?
--Je crois que monsieur ��tait au fond du jardin, �� voir les raisins de la tonnelle.
Cela acheva de mettre Mouret d'une ex��crable humeur. Il d��blat��ra contre les pr��tres: c'��taient tous des cachotiers; ils ��taient dans un tas de manigances, auxquelles le diable ne reconna?trait rien; ils affectaient une pruderie ridicule, �� ce point que personne n'avait jamais vu un pr��tre se d��barbouiller. Il finit par se repentir d'avoir lou�� �� cet abb�� qu'il ne connaissait pas.
--C'est ta faute, aussi! dit-il �� sa femme, en se levant de table.
Marthe allait protester, lui rappeler leur discussion de la veille; mais elle leva les yeux, le regarda et ne dit rien. Lui, cependant, ne se d��cidait pas �� sortir, comme il en avait l'habitude. Il allait et venait, de la salle �� manger au jardin, furetant, pr��tendant que tout tra?nait, que la maison ��tait au pillage; puis, il se facha contre Serge et Octave, qui, disaient-ils, ��taient partis, une demi-heure trop t?t, pour le coll��ge.
--Est-ce que papa ne sort pas? demanda D��sir��e �� l'oreille de sa m��re. Il va bien nous ennuyer, s'il reste.
Marthe la fit taire. Mouret parla enfin d'une affaire qu'il devait terminer dans la journ��e. Il n'avait pas un moment, il ne pouvait pas m��me se reposer un jour chez lui, lorsqu'il en ��prouvait le besoin. Il partit, d��sol�� de ne pas demeurer l��, aux aguets.
Le soir, quand il rentra, il avait toute une fi��vre de curiosit��.
--Et l'abb��? demanda-t-il, avant m��me d'?ter son chapeau.
Marthe travaillait �� sa place ordinaire, sur la terrasse.
--L'abb��? r��p��ta-t-elle avec quelque surprise. Ah! oui, l'abb��.... Je ne l'ai pas vu, je crois qu'il s'est install��. Rose m'a dit qu'on avait apport�� des meubles.
--Voil�� ce que je craignais, s'��cria Mouret. J'aurais voulu ��tre l��; car, enfin, les meubles sont ma garantie.... Je savais bien que tu ne bougerais pas de ta chaise. Tu es une pauvre t��te, ma bonne.... Rose! Rose!
Et lorsque la cuisini��re fut l��:
--On a apport�� des meubles pour les gens du second?
--Oui, monsieur, dans une petite carriole. J'ai reconnu la carriole de Bergasse, le revendeur du march��. Allez, il n'y en avait pas lourd. Madame Faujas suivait. En montant la rue Balande, elle a m��me donn�� un coup de main �� l'homme qui poussait.
--Vous avez vu les meubles, au moins; vous les avez compt��s? --Certainement, monsieur; je m'��tais mise sur la porte. Ils ont tous pass�� devant moi, ce qui m��me n'a pas paru faire plaisir �� madame Faujas. Attendez.... On a d'abord mont�� un lit de fer, puis une commode, deux tables, quatre chaises.... Ma foi, c'est tout.... Et des meubles pas neufs. Je n'en donnerais pas trente ��cus.
--Mais il fallait avertir madame; nous ne pouvons pas louer dans des conditions pareilles.... Je vais de ce pas m'expliquer avec l'abb�� Bourrette.
Il se fachait, il sortait, lorsque Marthe r��ussit �� l'arr��ter net, en disant:
--��coute donc, j'oubliais.... Il ont pay�� six mois �� l'avance.
--Ah! ils ont pay��? balbutia-t-il d'un ton presque fach��.
--Oui, c'est la vieille dame qui est descendue et qui m'a remis ceci.
Elle fouilla dans sa table �� ouvrage, elle donna �� son mari soixante-quinze francs en pi��ces de cent sous, envelopp��es soigneusement dans un morceau de journal. Mouret compta l'argent, en murmurant.
--S'ils payent, ils sont bien libres.... N'importe, ce sont de dr?les de gens. Tout le monde ne peut pas ��tre riche, c'est s?r; seulement, ce n'est pas une raison, quand on n'a pas le sou, pour se donner ainsi des allures suspectes.
--Je voulais te dire aussi, reprit Marthe en le voyant calm��: la vieille dame m'a demand�� si nous ��tions dispos��s �� lui c��der le lit de sangle; je lui ai r��pondu que nous n'en faisions rien, qu'elle pouvait le garder tant qu'elle voudrait.
--Tu as bien fait, il faut les obliger.... Moi, je te l'ai dit, ce qui me contrarie avec ces diables de cur��s, c'est qu'on ne sait jamais ce qu'ils pensent ni ce qu'ils font. �� part cela, il y a souvent des hommes tr��s-honorables parmi eux.
L'argent paraissait l'avoir consol��. Il plaisanta, tourmenta Serge sur la relation des Missions en Chine, qu'il lisait dans ce moment. Pendant le d?ner, il affecta de ne plus s'occuper des gens du second. Mais, Octave ayant racont�� qu'il avait vu l'abb�� Faujas sortir de l'��v��ch��, Mouret ne put se tenir davantage. Au dessert, il reprit la conversation de la veille. Puis, il eut quelque honte. Il ��tait d'esprit fin, sous son ��paisseur de commer?ant retir��; il avait surtout un grand bon sens, une droiture de jugement qui lui faisait, le plus souvent, trouver le mot juste, au milieu des comm��rages de la province.
--Apr��s tout, dit-il en allant se coucher, ce n'est pas bien de mettre son nez dans les affaires des autres.... L'abb�� peut faire ce qu'il
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