de la porte Saint-Antoine. Ils n'h��sitent pas �� entrer, dans l'eau glac��e, jusqu'aux aisselles: ils ne se d��robent �� la vue des rondes major qui, avec de grands fallots passent �� 10 ou 12 pi��s au-dessus de leurs t��tes, qu'en s'accroupissant dans l'eau jusqu'au menton. Mais l'heureux r��sultat de leurs travaux fut qu'en moins de 8 heures et demie ils eurent perc�� la muraille qui, au rapport du major, ��tait de 4 pi��s et demi d'��paisseur. Parvenus �� leur grande satisfaction dans le grand foss�� de la porte Saint-Antoine, ils se crurent hors de danger, lorsqu'apr��s �� peine 25 pas de marche, ils tomb��rent tous les deux �� la fois dans un aqueduc qui ��toit au milieu du foss��. L��, M. d'Al��gre dut �� la pr��sence d'esprit de M. Delatude d'��tre enlev�� de ce pr��cipice dans lequel ils avoient 10 pi��s d'eau au-dessus de leurs t��tes. �� trente pas de ce lieu, absolument libres, et n'ayant plus d'obstacles �� craindre, cette terrible nuit, il est permis de le dire, finit pour ces deux courageux amis. Leur premier soin fut de se jetter �� genoux et de remercier Dieu de la grace qu'il venoit de leur faire. M. Delatude a ��t�� d��tenu pendant l'espace de trente-cinq ann��es successivement �� la Bastille, �� Vincennes et dans diverses autres prisons.?
?Vers qui ont ��t�� mis au Louvre, au bas du portrait de M. Masers, chevalier Delatude, ing��nieur, par M.C. de G..., avocat:
Victime d'un pouvoir injuste et criminel, MASERS dans les cachots eut termin�� sa vie, Si l'art du despotisme aussi fin que cruel Avoit pu dans les fers encha?ner son g��nie.?
Ce portrait de Latude est de M. Vestier, acad��micien. Il fut expos�� au Louvre et figure au Livret du Salon de 1791 sous le num��ro 109 (Mus��e Carnavalet).
Apr��s la prise de la Bastille on trouva, dans les archives de cette prison un billet de Latude �� Mme de Pompadour; il ��tait ainsi con?u: ?Le 25 de ce mois de septembre 1760, �� quatre heures du soir, il y aura cent mile heures que je souffre.?
Visiter un prisonnier ��tait chose �� peu pr��s impossible et si l'un de ces malheureux obtenait la permission de lire ou l'autorisation d'��crire �� sa famille, il consid��rait cette faveur inesp��r��e comme un supr��me bonheur. Ajoutons toutefois que les lettres ne parvenaient jamais �� leur adresse. On en a trouv�� en 1789 qui avaient plus de cent ans de date!
Le r��gime des prisonniers, nous dit Charpentier, l'auteur de la Bastille d��voil��e, ?consistait en une livre de pain et une bouteille de mauvais vin par jour; au d?ner (11 heures du matin), du bouillon et deux plats de viande; au souper (6 heures du soir), une tranche de r?ti, du ragout et de la salade, mais le tout d��testable. Le maigre au beurre rance ou �� l'huile naus��abonde.--Le r��gime du pain et de l'eau n'��tait, dit-il; appliqu�� qu'aux vulgaires criminels?.
M. Ravaisson, dans son important ouvrage ?Les Archives de la Bastille? n'est pas tout �� fait de l'avis de Charpentier: ?�� la Bastille, dit-il, la nourriture ��tait saine et abondante, les repas que le gouverneur faisait servir auraient fait envie �� plus d'un bourgeois ais��, et si la cuisine excitait les plaintes des prisonniers, c'est que le gouverneur en ��tait charg�� et que se plaindre d'un ge?lier, c'est toujours un soulagement pour ceux qu'il tient sous sa garde.?
Nous ne pouvons ��tre absolument de cet avis, car c'est de l'ensemble des r��cits faits ou ��crits par les prisonniers eux-m��mes qu'il faut tirer la triste v��rit��.
On sait aujourd'hui, sans aucun doute, que l'on ��tait trait��, moralement et mat��riellement, �� la Bastille selon les ordres du ministre qui vous y envoyait; et, comme les pourvoyeurs de cet antre myst��rieux du despotisme craignaient surtout les indiscr��tions au sujet du r��gime int��rieur, on n'avait d'��gards que pour ceux qui devaient en sortir un jour: pour les princes et les grands seigneurs; pour les gens de lettres et les avocats qui ont toujours ��t�� d'incorrigibles indiscrets.
On doit aussi ajouter que la nourriture des prisonniers d��pendait du plus ou moins d'avarice du gouverneur qui, dans les derniers temps, r��alisait plus de 60.000 livres de rentes sur ses pensionnaires.
C'est pour cela que la haute noblesse et les grands dignitaires du royaume, simplement d��tenus, jouissaient �� la Bastille de grandes faveurs: ils pouvaient y garder leurs officiers, leurs secr��taires, leurs valets; se r��unir et se promener soit sur les tours, soit dans le jardin du bastion; leur table ��tait fort bien servie, le plus souvent, il est vrai, �� leurs frais, et le gouverneur ne leur parlait jamais qu'avec une extr��me courtoisie, debout et le chapeau bas.
C'est aussi pour ces m��mes raisons que Marmontel[6] et Morellet assurent y avoir ��t�� trait��s en grands seigneurs; que Voltaire dit y avoir subi une d��tention relativement douce; que Fr��ron put y continuer la publication
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