Dieu, mon neveu, que me dites-vous l��? Vous aimez donc cette belle demoiselle �� la folie?--Oui, mon oncle.--- H��las! mon neveu, il est impossible que vous l'��pousiez.--Cela est tr��s possible, mon oncle; car non seulement elle m'a serr�� la main en me quittant, mais elle m'a promis qu'elle me demanderait en mariage; et assur��ment je l'��pouserai.--Cela est impossible, vous dis-je, elle est votre marraine; c'est un p��ch�� ��pouvantable �� une marraine de serrer la main de son filleul: il n'est pas permis d'��pouser sa marraine; les lois divines et humaines s'y opposent.--Morbleu! mon oncle, vous vous moquez de moi: pourquoi serait-il d��fendu d'��pouser sa marraine, quand elle est jeune et jolie? Je n'ai point vu dans le livre que vous m'avez donn�� qu'il f?t mal d'��pouser les filles qui ont aid�� les gens �� ��tre baptis��s. Je m'aper?ois tous les jours qu'on fait ici une infinit�� de choses qui ne sont point dans votre livre, et qu'on n'y fait rien de tout ce qu'il dit: je vous avoue que cela m'��tonne et me fache. Si on me prive de la belle Saint-Yves, sous pr��texte de mon bapt��me, je vous avertis que je l'enl��ve, et que je me d��baptise.
Le prieur fut confondu; sa soeur pleura. Mon cher fr��re, dit-elle, il ne faut pas que notre neveu se damne; notre saint-p��re le pape peut lui donner dispense, et alors il pourra ��tre chr��tiennement heureux avec ce qu'il aime. L'Ing��nu embrassa sa tante. Quel est donc, dit-il, cet homme charmant qui favorise avec tant de bont�� les gar?ons et les filles dans leurs amours? Je veux lui aller parler tout-��-l'heure.
On lui expliqua ce que c'��tait que le pape; et l'Ing��nu fut encore plus ��tonn�� qu'auparavant. Il n'y a pas un mot de tout cela dans votre livre, mon cher oncle; j'ai voyag��, je connais la mer; nous sommes ici sur la c?te de l'oc��an; et je quitterais mademoiselle de Saint-Yves pour aller demander la permission de l'aimer �� un homme qui demeure vers la M��diterran��e, �� quatre cents lieues d'ici, et dont je n'entends point la langue! cela est d'un ridicule incompr��hensible. Je vais sur-le-champ chez monsieur l'abb�� de Saint-Yves, qui ne demeure qu'�� une lieue de vous, et je vous r��ponds que j'��pouserai ma ma?tresse dans la journ��e.
Comme il parlait encore, entra le bailli qui, selon sa coutume, lui demanda o�� il allait. Je vais me marier, dit l'Ing��nu en courant; et au bout d'un quart d'heure il ��tait d��j�� chez sa belle et ch��re basse-brette qui dormait encore. Ah! mon fr��re, disait mademoiselle de Kerkabon au prieur, jamais vous ne ferez un sous-diacre de notre neveu.
Le bailli fut tr��s m��content de ce voyage; car il pr��tendait que son fils ��pousat la Saint-Yves; et ce fils ��tait encore plus sot et plus insupportable que son p��re.
CHAPITRE VI.
L'Ing��nu court chez sa ma?tresse, et devient furieux.
A peine l'Ing��nu ��tait arriv��, qu'ayant demand�� �� une vieille servante o�� ��tait la chambre de sa ma?tresse, il avait pouss�� fortement la porte mal ferm��e, et s'��tait ��lanc�� vers le lit. Mademoiselle de Saint-Yves, se r��veillant en sursaut, s'��tait ��cri��e: Quoi! c'est vous! ah! c'est vous! arr��tez-vous, que faites-vous?" Il avait r��pondu: Je vous ��pouse; et en effet il l'��pousait, si elle ne s'��tait pas d��battue avec toute l'honn��tet�� d'une personne qui a de l'��ducation.
L'Ing��nu n'entendait pas raillerie; il trouvait toutes ces fa?ons-l�� extr��mement impertinentes. Ce n'��tait pas ainsi qu'en usait mademoiselle Abacaba, ma premi��re ma?tresse; vous n'avez point de probit��; vous m'avez promis mariage, et vous ne voulez point faire mariage; c'est manquer aux premi��res lois de l'honneur; je vous apprendrai �� tenir votre parole, et je vous remettrai dans le chemin de la vertu.
L'Ing��nu poss��dait une vertu male et intr��pide, digne de son patron Hercule, dont on lui avait donn�� le nom �� son bapt��me; il allait l'exercer dans toute son ��tendue, lorsqu'aux cris per?ants de la demoiselle plus discr��tement vertueuse, accourut le sage abb�� de Saint-Yves, avec sa gouvernante, un vieux domestique d��vot, et un pr��tre de paroisse. Cette vue mod��ra le courage de l'assaillant. Eh, mon Dieu! mon cher voisin, lui dit l'abb��, que faites-vous l��? Mon devoir, r��pliqua le jeune homme; je remplis mes promesses, qui sont sacr��es.
Mademoiselle de Saint-Yves se rajusta en rougissant. On emmena l'Ing��nu dans un autre appartement. L'abb�� lui remontra l'��normit�� du proc��d��. L'Ing��nu se d��fendit sur les privil��ges de la loi naturelle, qu'il connaissait parfaitement. L'abb�� voulut prouver que la loi positive devait avoir tout l'avantage, et que, sans les conventions faites entre les hommes, la loi de nature ne serait presque jamais qu'un brigandage naturel. Il faut, lui disait-il, des notaires, des pr��tres, des t��moins, des contrats, des dispenses. L'Ing��nu lui r��pondit par la r��flexion que les sauvages ont toujours faite: Vous ��tes donc de bien malhonn��tes gens, puisqu'il faut entre vous tant de pr��cautions.
L'abb�� eut de
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