d��rangeait son d��sespoir, ses heures pour prier, pleurer, correspondre ?au del��,? et porter des brass��es de fleurs rares au P��re-Lachaise, o�� Paul Astier surveillait l'��rection du gigantesque mausol��e en pierres comm��moratives prises sur le lieu du d��sastre, selon le d��sir de la princesse.
Malheureusement, l'extraction, le transport de ces rochers dalmates, le granit dur �� tailler, puis les mille projets, les changeants caprices de la veuve, qui ne trouvait rien d'assez grand, d'assez pompeux, �� la taille de son h��ros mort, avaient caus�� tant de retards et d'entraves qu'en mai 1880, deux ann��es pleines apr��s la catastrophe et l'entreprise des travaux, le monument n'��tait pas encore fini. C'est beaucoup, deux ans, pour une douleur d��monstrative, toujours au paroxisme, pr��te �� se donner en une fois. Sans doute le deuil subsistait, toujours aust��re d'apparence, l'h?tel muet et ferm�� comme un caveau; mais au lieu de la statue vivante, en pri��res et en larmes, au fond de la crypte, il y avait maintenant une jeune et jolie femme, dont les cheveux repoussaient serr��s et fins avec des r��voltes de vie, des frisons, des ondulements.
De cette blonde chevelure revenue, le noir du veuvage s'��claircissait comme ��gay��, ne semblait plus qu'un caprice d'��l��gance; et dans l'allure, la voix de la princesse, on sentait l'activit�� printani��re, cet air soulag��, paisible, qu'on trouve chez les jeunes veuves �� la seconde p��riode de leur deuil. ��tat charmant. La femme go?te pour la premi��re fois la douceur de cet affranchissement, de cette libre possession d'elle-m��me qu'elle n'a pas connue, pass��e toute jeune de la famille au mari; elle est d��livr��e de la grossi��ret�� du male et, surtout, de cette crainte de l'enfant, de cette terreur dans l'amour qui est la caract��ristique de la jeune femme moderne. Et l'��volution toute naturelle de la douleur d��bordante �� ce complet apaisement s'accentuait ici de l'appareil du veuvage inconsolable dont la princesse Colette continuait �� s'entourer; non par hypocrisie, mais comment, sans faire sourire la valetaille, donner l'ordre d'enlever ce chapeau qui attendait dans l'antichambre, cette canne en ��vidence, ce couvert pour l'absent? comment dire: ?Le prince ne d?ne pas ce soir.? Seule, la correspondance mystique, ?A Herbert, au ciel,? avait faibli, espac��e de jour en jour, r��duite �� un journal sur un ton fort calme dont s'amusait, sans rien dire, l'intelligente amie de Colette.
C'est qu'elle avait son plan, Mme Astier, une id��e germ��e dans sa solide petite t��te, un mardi soir, aux Fran?ais, sur cette confidence �� voix basse du prince d'Athis: ?Ah! ma pauvre Ad��la?de, quel boulet!... que je m'ennuie!...? Tout de suite elle pensait �� le marier avec la princesse, et ce fut un nouveau jeu, �� l'envers du premier, non moins d��licat et charmant. Il ne s'agissait plus de pr��cher l'��ternit�� des serments, de chercher dans Joubert ou autres honn��tes philosophes des pens��es comme celle-ci, copi��e par la princesse en t��te de son livre de mariage: ?On n'est ��pouse et veuve avec dignit�� qu'une fois...? ni de s'extasier sur les graces viriles du jeune h��ros dont l'image en pied, en buste, de profil ou de trois quarts, sculpture, peinture, se dressait par tout l'h?tel.
Au contraire, une d��pr��ciation gradu��e et savante: ?Ne trouvez-vous pas, ch��re amie... ces portraits du prince lui font la machoire trop lourde... sans doute, je veux bien, il avait tout ceci un peu fort, un peu ��pais...? et, �� tout petits coups empoisonn��s, avec une douceur, une adresse infinies, se reprenant quand elle allait trop loin, guettant le sourire de Colette �� une malice appuy��e, elle arrivait �� lui faire convenir que son Herbert avait toujours ��t�� pas mal re?tre, plus gentilhomme de nom que de fa?ons, sans le grand air, par exemple, de ce prince d'Athis rencontr��, l'autre dimanche, sur le perron de Saint-Philippe. ?Si le coeur vous en dit, il est �� marier, ma ch��re...? Ceci jet�� comme en l'air, sur un ton de badinage; puis repris, pr��sent�� plus clairement. Eh! pourquoi pas? toutes les convenances y seraient, grand nom, situation diplomatique consid��rable; et pas de changement �� la couronne ni au titre, ce qui avait bien son importance m��nag��re: ?Enfin, ma ch��re, s'il faut vous l'apprendre, un homme qui a pour vous le plus vif sentiment...?
Ce mot de sentiment blessa d'abord la princesse comme un outrage, mais elle s'habitua �� l'entendre. On rencontrait d'Athis �� l'��glise, puis rue de Beaune, en grand myst��re, et Colette convenait bient?t que lui seul aurait pu la faire renoncer au veuvage... Mais, quoi? son pauvre Rosen l'avait aim��e si d��votement, si uniquement!
?Oh! uniquement!...? faisait Mme Astier dans un petit sourire renseign�� que suivaient des allusions, des demi-mots, et, comme toujours, l'empoisonnement de la femme par la femme. ?Mais, ch��re amie, il n'y a pas d'amour unique, de mari fid��le... les honn��tes, les ��lev��s s'arrangent pour ne pas attrister, humilier leur femme, troubler le m��nage...
--Alors vous croyez qu'Herbert?...
--Mon
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