L'Immortel
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Title: L'Immortel
Author: Alphonse Daudet
Release Date: July 19, 2004 [EBook #12950] [Date last updated: October 4, 2004]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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[Note du transcripteur: Ce text utilise l'orthographe du XIXe si��cle: si��ge = si��ge, compl��tement = compl��tement, etc.]
ALPHONSE DAUDET
L'IMMORTEL
MOEURS PARISIENNES
PARIS
ALPHONSE LEMERRE, ��DITEUR 27-31, PASSAGE CHOISEUL, 27-31
1888
_A mon cher Philippe Gille
Comme au plus parisien de mes amis de lettres
J'offre cette ��tude de moeurs
A.D._
L'IMMORTEL
I
On lit dans le Dictionnaire des C��l��brit��s contemporaines, ��dition de 1880, �� l'article Astier-R��hu:
?_Astier, dit Astier-R��hu (Pierre-Alexandre-L��onard), de l'Acad��mie fran?aise, n�� en 1816, �� Sauvagnat (Puy-de-D?me) chez d'humbles cultivateurs, montra d��s son plus jeune age de rares aptitudes pour l'histoire. De solides ��tudes, comme on n'en fait plus maintenant, commenc��es au coll��ge de Riom, termin��es �� Louis-le-Grand o�� il devait revenir plus tard professeur, lui ouvrirent toutes grandes les portes de l'��cole Normale sup��rieure. Il en sortit pour occuper la chaire d'histoire au lyc��e de Mende; c'est l�� que fut ��crit l_'Essai sur Marc-Aur��le, _(couronn�� par l'Acad��mie fran?aise). Appel�� l'ann��e suivante �� Paris par M. de Salvandy, le jeune et brillant professeur sut reconna?tre l'intelligente faveur dont il avait ��t�� l'objet en publiant coup sur coup: Les grands ministres de Louis XIV (couronn�� par l'Acad��mie fran?aise),--Bonaparte et le Concordat (couronn�� par l'Acad��mie fran?aise),--et cette admirable_ Introduction �� l'Histoire de la Maison d'Orl��ans, _portique grandiose de l'oeuvre �� laquelle l'historien devait donner vingt ans de sa vie. Cette fois, l'Acad��mie n'ayant plus de couronne �� lui offrir, le fit asseoir parmi ses ��lus. Il ��tait d��j�� un peu de la maison, ayant ��pous�� Mlle R��hu, fille du regrett�� Paulin R��hu, le c��l��bre architecte, membre de l'Acad��mie des Inscriptions et Belles Lettres, petite-fille du v��n��rable Jean R��hu, doyen de l'Acad��mie fran?aise, l'��l��gant traducteur d'Ovide, l'auteur des Lettres �� Uranie, dont la verte vieillesse fait l'admiration de l'Institut.
On sait avec quel noble d��sint��ressement, appel�� par M. Thiers, son coll��gue et ami, aux fonctions d'archiviste des Affaires ��trang��res, L��onard Astier-R��hu se d��mit de sa charge au bout de quelques ann��es (1878), refusant de courber sa plume et l'impartialit�� de l'Histoire devant les exigences de nos gouvernants actuels. Mais, priv�� de ses ch��res archives, l'��crivain a su mettre ses loisirs �� profit. En deux ans, il nous a donn�� les trois derniers volumes de son histoire et nous annonce prochainement un Galil��e inconnu d'apr��s les documents les plus curieux et les plus in��dits. Tous les ouvrages d'Astier-R��hu sont en vente chez Petit-S��quard, �� la librairie acad��mique_.?
L'��diteur du Dictionnaire des ?C��l��brit��s? laissant �� chaque int��ress�� le soin de se raconter lui-m��me, l'authenticit�� de ces notes biographiques ne saurait ��tre mise en doute. Mais pourquoi dire que L��onard Astier-R��hu avait donn�� sa d��mission d'archiviste, quand personne n'ignore qu'il fut destitu��, mis �� pied comme un simple cocher de fiacre, pour une phrase imprudente ��chapp��e �� l'historien de la Maison d'Orl��ans, tome V, page 327: ?Alors comme aujourd'hui, la France, submerg��e sous le flot d��magogique...?
O�� peut conduire une m��taphore! Les douze mille francs de sa place, un logement au quai d'Orsay, chauffage, ��clairage, en plus ce merveilleux tr��sor de pi��ces historiques o�� ses livres avaient pris vie; voil�� ce que lui emporta ce ?flot d��magogique,? son flot! Le pauvre homme ne s'en consolait pas. M��me apr��s deux ans ��coul��s, le regret du bien-��tre et des honneurs de son emploi lui mordait le coeur, plus vif �� certains jours, �� certaines dates du mois ou de la semaine, et principalement le jour de Teyss��dre.
C'��tait le frotteur, ce Teyss��dre. Il venait de fondation chez les Astier le mercredi; et l'apr��s-midi du m��me jour, Mme Astier recevait dans le cabinet de travail de son mari, seule pi��ce pr��sentable de ce troisi��me ��tage de la rue de Beaune, d��bris d'un beau logis, majestueux de plafond, mais terriblement incommode. On se figure le d��sarroi o�� ce mercredi, revenant chaque semaine, jetait l'illustre historien interrompu dans sa production laborieuse et m��thodique; il en avait pris en haine le frotteur, son ?pays?, �� la face jaune, ferm��e et dure comme son pain de cire, ce Teyss��dre qui, sous pr��texte qu'il ��tait de Riom, ?tandis que meuchieu Achtier n'��tait que de Chauvagnat,? bousculait sans respect la lourde table encombr��e de cahiers, de notes, de rapports, chassait de pi��ce en pi��ce le pauvre grand homme, r��duit �� se r��fugier dans une soupente prise sur la hauteur de son cabinet,
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