qui a des vapeurs ou qui veut qu'on lui parle d'amour... Ce matin, mon bon Pierre, j'ai ��crit une longue lettre �� Mlle Dufraise et je lui ai dit qu'il n'y avait pas lieu de donner suite �� notre affaire. C'est pourquoi je suis si fier de moi. Car enfin, je peux bien vous l'avouer: personne ne m'a plu autant qu'elle.
--Eh! lui dis-je, voila, ma foi, qui est joliment raisonn��!
--Le seul inconv��nient de la chose, c'est qu'il me faudra me pourvoir ailleurs, car je suis de plus en plus d��cid�� �� me marier vite. La sotte vie que celle d'un c��libataire! Mais connaissez-vous rien de plus ridicule que de chercher une jeune fille, de lui dire des fadeurs et de lui faire sa cour, tout cela pour finir bonnement par l'��pouser? Que j'ai de hate que ces simagr��es soient finies, que mon oncle Planavergne soit mort et que je sois install��, en province, avec ma femme et mes trois enfants!
--J'aime ta pr��cision, lui dis-je.
--Oui, j'aurai trois enfants. Moins ou davantage, ce n'est pas raisonnable. Par exemple, je ne sais pas comment les appeler. Tous les noms ont quelque chose ridiculement romanesque, de po��tique, qui m'exasp��re. Voyez-vous une fille qui s'appellerait Virginie, ou Juliette, ou Marguerite?
--Tu choisiras des pr��noms simples: Marie, par exemple.
--C'est bien cl��rical!
--Allons, lui dis-je, tu as le temps de faire ton choix!
Nous nous attardions dans le restaurant minuscule, chauffant dans notre main un verre de fine-champagne. M. Cassignol ��tait d��j�� parti et d��j�� revenu. Un geai apprivois��, moqueur et malin, sautait de table en table, en appelant la patronne: "Sophie! Sophie!"
--Sophie! Murmura Victor. Voil�� qui n'est pas si mal! Mon a?n��e se nommera Sophie. Ce n'est pas pr��tentieux et ?a sonne sagement...
Remontant les marches du seuil, nous suiv?mes la rue de Montpensier. Le soleil y glissait un oeil soup?onneux entre les hautes maisons noires qui la bordent. Un promeneur solitaire qui portait un grand chapeau de feutre et un costume tr��s clair s'en allait d'un air �� la fois r��veur et d��cid��. Un chat effray�� fila devant lui. Nous entend?mes sonner la trompe d'une auto.
--Mon cher parrain, me dit Victor Agniel, en me quittant, je suis tr��s satisfait d'avoir votre approbation. H��las! Sans cette satan��e soir��e au clair de lune, j'aurais peut-��tre ��pous�� Mlle Dufraise, et voyez ce qu'aurait ��t�� ma vie �� Saint-Brieuc ou �� Rethel avec une folle qui aurait lu des romans au lieu de repriser mes chaussettes!
J'osai mesurer d'un coup d'oeil cet ab?me de d��solation. Victor en frissonnait encore.
Et je ne sais pourquoi je songeai tout �� coup avec un ��lan de sympathie irr��pressible �� l'honn��te physionomie de M. Val��re Bouldouyr.
Victor Agniel s'��loignait de moi en r��p��tant entre ses dents: "Sophie! Sophie!"
CHAPITRE IV
Dans lequel appara?t l'insaisissable figure qui donnera de l'unit�� �� ce r��cit.
"...brillant dans l'ombre de la seule beaut��, comme les heures divines qui se d��coupent, avec une ��toile au front, sur les fonds bruns des fresques d'Herculanum! G��rard De Nerval.
Pendant un mois, je cessai de rencontrer Val��re Bouldouyr, et M. Delavigne ne me donna aucune nouvelle de lui.
Je ne vis pas davantage Victor Agniel, mais notre derni��re rencontre ne m'avait pas laiss�� un souvenir bien agr��able: je ne le relan?ai pas. Il trouverait bien sans moi, me disais-je, la jeune fille assez raisonnable �� ses yeux, - et aux miens, - pour accepter de l'entendre tous les jours!
Le printemps ��tant lent et doux et se prolongeant en de douces soir��es ti��des, il m'arrivait souvent de m'attarder dans l'enclos du Palais-Royal, jusqu'�� l'heure o�� les vieilles dames, autrefois galantes, qui r��glent la cote des berlingots et des cordes �� sauter, dans des kiosques pointus, ferment boutique et regagnent leurs demeures, o�� les enfants, las de courir, s'asseyent sur les bancs et soufflent, o�� les gardiens r��barbatifs, enfin, sifflent, crient et ferment les grilles �� lances dor��es afin d'isoler dans un carr�� imp��n��trable tout l'air pur et respirable du quartier.
Ce fut pendant un de ces apr��s-midis que j'aper?us de nouveau l'auteur de l'Embarquement pour Thul�� et du Jardin des Cent Iris. La musique militaire r��pandait aux alentours, selon les hasards de ses cuivres, des lambeaux de pot pourri, arrach��s aux entrailles vives de Carmen ou de Manon. Une foule myst��rieuse, venue des quatre points de l'horizon sur les promesses des quotidiens, se pressait autour des gaillards en uniformes,qui broyaient dans leurs instruments le g��nie de Bizet ou de Massenet et l'aspergeaient sur nous en poussi��re de sons.
Je me m��lais �� cette soci��t�� m��lomane quand, en face de moi, j'aper?us mon po��te.
Il avait au bras l'aimable personne �� laquelle M. Delavigne avait fait allusion. J'eus tout le loisir de la consid��rer, et je fus touch�� de sa grace. Tout d'abord, les suppositions de M. Delavigne me firent rougir de honte et de col��re; on ne pouvait imaginer un visage plus na?f, plus ouvert et plus
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