LAvare | Page 3

Molière
n'��tant pr��venus d'aucune folle ardeur, ils sont en ��tat de se tromper bien moins que nous et de voir beaucoup mieux ce qui nous est propre ; qu'il en faut plut?t croire les lumi��res de leur prudence que l'aveuglement de notre passion ; et que l'emportement de la jeunesse nous entra?ne le plus souvent dans des pr��cipices facheux. Je vous dis tout cela, ma soeur, afin que vous ne vous donniez pas la peine de me le dire ? car enfin mon amour ne veut rien ��couter, et je vous prie de ne me point faire de remontrances.
- ��lise -
Vous ��tes-vous engag��, mon fr��re, avec celle que vous aimez ?
- Cl��ante -
Non ; mais j'y suis r��solu, et je vous conjure encore une fois de ne me point apporter de raisons pour m'en dissuader.
- ��lise -
Suis-je, mon fr��re, une si ��trange personne ?
- Cl��ante -
Non, ma soeur ; mais vous n'aimez pas ; vous ignorez la douce violence qu'un tendre amour fait sur nos coeurs, et j'appr��hende votre sagesse.
- ��lise -
H��las ! mon fr��re, ne parlons point de ma sagesse : il n'est personne qui n'en manque, du moins une fois en sa vie ; et, si je vous ouvre mon coeur, peut-��tre serai-je �� vos yeux bien moins sage que vous.
- Cl��ante -
Ah ! pl?t au ciel que votre ame, comme la mienne... !
- ��lise -
Finissons auparavant votre affaire, et me dites qui est celle que vous aimez.
- Cl��ante -
Une jeune personne qui loge depuis peu en ces quartiers, et qui semble ��tre faite pour donner de l'amour �� tous ceux qui la voient. La nature, ma soeur, n'a rien form�� de plus aimable ; et je me sentis transport�� d��s le moment que je la vis. Elle se nomme Mariane, et vit sous la conduite d'une bonne femme de m��re qui est presque toujours malade, et pour qui cette aimable fille a des sentiments d'amiti�� qui ne sont pas imaginables. Elle la sert, la plaint et la console, avec une tendresse qui vous toucherait l'ame. Elle se prend d'un air le plus charmant du monde aux choses qu'elle fait ; et l'on voit briller mille graces en toutes ses actions, une douceur pleine d'attraits, une bont�� toute engageante, une honn��tet�� adorable, une... Ah ! ma soeur, je voudrais que vous l'eussiez vue !
- ��lise -
J'en vois beaucoup, mon fr��re, dans les choses que vous me dites ; et, pour comprendre ce qu'elle est, il me suffit que vous l'aimez.
- Cl��ante -
J'ai d��couvert sous main qu'elles ne sont pas fort accommod��es (1), et que leur discr��te conduite a de la peine �� ��tendre �� tous leurs besoins le bien qu'elles peuvent avoir. Figurez-vous, ma soeur, quelle joie ce peut ��tre que de relever la fortune d'une personne que l'on aime ; que de donner adroitement quelques petits secours aux modestes n��cessit��s d'une vertueuse famille ; et concevez quel d��plaisir ce m'est de voir que, par l'avarice d'un p��re, je sois dans l'impuissance de go?ter cette joie, et de faire ��clater �� cette belle aucun t��moignage de mon amour.
- ��lise -
Oui, je con?ois assez, mon fr��re, quel doit ��tre votre chagrin.
- Cl��ante -
Ah ! ma soeur, il est plus grand qu'on ne peut croire. Car, enfin, peut-on rien voir de plus cruel que cette rigoureuse ��pargne qu'on exerce sur nous, que cette s��cheresse ��trange o�� l'on nous fait languir ? H�� ! que nous servira d'avoir du bien, s'il ne nous vient que dans le temps que nous ne serons plus dans le bel age d'en jouir, et si, pour m'entretenir m��me, il faut que maintenant je m'engage de tous c?t��s ; si je suis r��duit avec vous �� chercher tous les jours le secours des marchands, pour avoir moyen de porter des habits raisonnables ? Enfin, j'ai voulu vous parler pour m'aider �� sonder mon p��re sur les sentiments o�� je suis ; et, si je l'y trouve contraire, j'ai r��solu d'aller en d'autres lieux, avec cette aimable personne, jouir de la fortune que le ciel voudra nous offrir. Je fais chercher partout, pour ce dessein, de l'argent �� emprunter ; et, si vos affaires, ma soeur, sont semblables aux miennes, et qu'il faille que notre p��re s'oppose �� nos d��sirs, nous le quitterons l�� tous deux, et nous affranchirons de cette tyrannie o�� nous tient depuis si longtemps son avarice insupportable.
- ��lise -
Il est bien vrai que tous les jours il nous donne de plus en plus sujet de regretter la mort de notre m��re, et que...
- Cl��ante -
J'entends sa voix. Eloignons-nous un peu pour achever notre confidence ; et nous joindrons apr��s nos forces pour venir attaquer la duret�� de son humeur.
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Sc��ne III. - Harpagon, La Fl��che.

- Harpagon -
Hors d'ici tout �� l'heure, et qu'on ne r��plique pas. Allons, que l'on d��tale de chez moi, ma?tre jur��
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