Jusqua lextrême regard, poésie | Page 5

Huguette Bertrand
la nuit

Allongée sur les paumes du quotidien?une femme de connivence avec le bonheur?s'abandonne dans un fou rire?pose délicate comme un fruit incandescent?qu'enrobent les désirs?venus valser sur ses nuits apprivoisées?une femme moulée dans ses parures?pour une fête empirique?transparente parfumée?visitée par les saisons?inscrite au calendrier?revue et corrigée par le mouvement perpétuel de la tendresse
On imagine aussi les mains déployées d'un homme à plaisir?venu raser ce rêve dans le jus des sens?devant une bière enivrée d'illusions?quand le temps forge des douleurs sous nos pieds désarmés?échange l'amour contre la mort?ses pitiés naissantes au bord des lèvres?pour inquiéter nos nuits

Quand la vie m'étire à n'en plus finir?j'étire l'avenir jusqu'à demain?j'étire demain pour en finir avec l'avenir?j'étire mes mots pour allonger le verbe?je m'étire dans mon verbe pour conjuguer le désir à l'être?et n'être plus que l'étirement d'un désir?sur une distance allongée posée sur le temps?un temps étiré par le hasard d'une rencontre?une rencontre qui s'étire sur le devenir?comme si demain n'existait pas
Pour en finir?le verbe me plonge dans ce désir de l'être?en son devenir

Juste un peu plus de vie pour prendre l'amour par le go?t?quand le go?t a le go?t d'aller dormir près de la nuit?cette nuit qui veille sur l'amour?comme une vieille amante échevelée au go?t du jour?pas trop tannée?juste encore en vie?pour go?ter aux nuits échevelées par l'amour

Elle est venue?elle était peut-être déjà là?debout en pyjama sur son destin?dans sa chambre virginale?appuyée sur un dégo?t?en attendant la conquête des seins des reins?et autres viscères?dépliant sa nuit sur le coeur englué?dans son imagerie
Finalement?elle est peut-être venue?mais je n'y étais pas

Devant les jours de banlieues?le temps s'attriste?ces ?les roses à l'intimité fragile??les boiteuses à des années-lumière??les poisseuses dans le varech des regards??les érigées à la gloire de l'éphémère??les savantes pour dérouter le mouvement des foules??les languissant comme des pluies??les mortes déclarées sans avenue??les ennuyeuses remplies de crépuscules??les éclatées en plein visage de la vie

Vous avez dit amour?quand on vous aper?oit aujourd'hui plongé dans un bain de tendresse pour savonner les mercredis oubliés?vous écrivez amour sur le bout d'une table?entre deux feuilles grises?deux colères?et vos gestes dévastés par de trop longues heures
Se grave enfin sur la chair de l'autre?votre coeur démesuré?et vous buvez l'amour?quand le corps presse la détente?comme au premier jour?en cette mi-temps de février

Je bois à la source de vos mots délivrés?temporaires?quand la vague soupire?quand le corps n'en peut plus de vous regarder dans l'embrasure des montagnes à travers le songe de vos regards venus si près de toucher l'indécence ce velouté du coeur jusqu'au vacillement des sens?déboutonnés jusqu'à l'os
C'est de l'amour?dans le concentré des jours?quand l'impuissance du geste s'étire à n'en plus finir?pour espacer les désirs qui se heurtent aux vives absences
C'est de l'amour?comme un fruit arraché haut et court à l'automne?un fruit d'hiver m?ri à même les délicaresses?quand le printemps s'allume allègrement?aux abords de l'été

Qu'avons-nous à dérober ces gestes?qui ne craignent plus la pudeur d'embrasser le poète?dans les eaux grouillantes du délire?ni même de tremper nos doigts dans le suc de l'amour?comme une rosée sur le bonheur d'être assouvie par de tendres ébats ce repas que le coeur attend avidement?à travers la bruine des jours?ce doux mensonge pour un monde inventé par la blessure?de ne pouvoir aimer à n'en plus finir

Quand il fait trop nuit?un nouveau regard vient border mes rêves abandonnés sur le rivage qu'une simple lueur vient consteller
Mémoire de la main qui effleure la mémoire?mémoire des yeux qui arpente la nuit?mémoire de la nuit qui parfume l'ennui
Une flamme ardente vient chanter sous ma lampe?des airs sauvages?accompagnés de petites ronflettes?hallucinées

Ne pillez plus ces nouveaux jours?quand le soleil verse son or sur nos chairs attendries par l'age des pierres quand nos yeux pavoisent devant ce rêve emmitouflé dans un rayon de lune quand le galbe soyeusement apprivoisé cherche les contours de la main qui effleure
Sous l'écorce de nos vies?le temps est à l'oeuvre?sculpte dans cette argile?des lumières frêles?que les mots épuisent aux confins de la mémoire
Surgissent alors des amours effrontées

Dans la savane de nos ames?des loups s'y promènent?avec un go?t de représailles à portée de hurlement?étrangeté qui ressemble à une vocation?jusque-là étendue sur une plage?devant une mer de naufrages?de cris douteux

En vérité?c'est de toi cette senteur du jardin?jusqu'à l'extrême regard incendiaire?à la poursuite des patiences?et des pluies venues
Encore toi?ce pays sans avenue?que l'on transporte en soi dans la terre fertile du désir
Toujours toi?à la cadence des jours?blottis entre chaque phrase?sans mesure?comme une certitude du présent

L'hiver ne pensait pas qu'il était rendu là où il était?sous une pluie de gla?ons barbares?venue blesser la conscience des arbres nus?leurs bras ballants comme ch?meur sans cause?et pour cause
L'hiver venu a dérapé sur sa neige fondante?à la dérive?sur la noire habitude de nos gestes gelés

Encore tout chaud?mon jour incendié par l'abondance du rêve?sème dans les sillons de l'amour?un visage habité de réels immenses?une gueule à désir?flanqué d'un sourire limité par la séduction d'un regard efficace une peau
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