de la REVUE DES DEUX MONDES.
--Le travail et les femmes, voilà ma vie!--C'est Gavarni qui parle.
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Ao?t 1852.--Je trouve Janin toujours gai, toujours épanoui, en dépit de la goutte à un pied. ?Quand on vint guillotiner mon grand-père, nous dit-il, il avait la goutte aux deux pieds... du reste, je ne me plains pas... c'est, dit-on, un brevet de vie pour dix ans... Je n'ai jamais été malade et ce qui constitue l'homme, je l'ai encore,?--fait-il en souriant.
Il nous montre une lettre de Victor Hugo, apportée par Mlle Thuillier, et où il nous fait lire cette phrase: ?Il fait triste ici... il pleut, c'est comme s'il tombait des pleurs.? Dans cette lettre, Hugo remercie Janin de son feuilleton sur la vente de son mobilier, lui annonce que son livre va para?tre dans un mois, et qu'il le lui fera parvenir dans un panier de poisson ou dans un cassant de fonte, et il ajoute: ?On dit qu'après, le Bonaparte me rayera de l'Académie... Je vous laisse mon fauteuil.?
Puis, Janin se répand sur la saleté et l'infection de Planche, sa bête d'horreur: ?Vous savez, quand il occupe sa stalle des Fran?ais, les deux stalles à c?té restent vides. Sa maladie, c'est l'éléphantiasis... un moment on a espéré qu'il avait la copulata vitrea de Pline. Il l'aurait eue, oh! il l'aurait eue... s'il s'était tenu un rien du monde moins salement!?
Une petite actrice des Fran?ais, dont je ne sais pas le nom, lui demandant s'il a vu une pièce quelconque: ?Comment, s'écrie Janin, en bondissant sur son fauteuil, vous n'avez pas lu mon feuilleton!? Et là-dessus il la menace, il la terrorise de ne jamais arriver, si elle ne lit pas son feuilleton, si elle n'est pas au fait de la littérature, si elle ne fait pas comme Talma, comme Mlle Mars, qui ne manquaient jamais un feuilleton important.
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--Sur le trottoir de la rue Saint-Honoré, j'entends derrière moi une fille disant à une autre: ?Ah! Julie... elle a changé de religion, elle aime les hommes à présent!
--Les grands hommes sont des médailles, que Dieu frappe au coin de leur siècle.
--L'idée du manchon de Mimi donnée à Murger par Paul Labat qui, conduisant sa ma?tresse à l'h?pital, fit arrêter le fiacre devant une écaillère de marchand de vin, sur le désir que la mourante témoigna de manger des hu?tres.
--Il me semble que les fonctionnaires sont destitués comme on renvoie les domestiques: aux seconds, on donne huit jours d'avance, aux premiers, la croix.
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22 octobre 1852.--Le PARIS para?t aujourd'hui. C'est, croyons-nous, le premier journal littéraire quotidien, depuis la fondation du monde. Nous écrivons l'article d'en-tête.
--Nous soupons beaucoup cette année: des soupers imbéciles où l'on sert des pêches à la Condé, des pêches-primeurs à 8 francs pièce, dont le plat co?te quatre louis et où l'on boit du vin chaud fabriqué avec du Léoville de 1836; des soupers en compagnie de gaupes ramassées à Mabille, de gueuses d'occasion qui mordent à ces repas d'opéra, avec un morceau de cervelas de leur d?ner, resté entre les dents, et dont l'une s'écriait na?vement: ?Tiens, quatre heures... maman est en train d'éplucher ses carottes!?
--Gavarni nous dit aujourd'hui qu'il croit avoir trouvé une force motrice qui pourra, un jour, se débiter chez les épiciers, et dont on pourra demander pour deux sous.
ANNéE 1853
Janvier 1853.--Les bureaux du PARIS, d'abord établis, 1, rue Laffitte, à la Maison d'Or, furent, au bout de quelques mois, transférés rue Bergère, au-dessus de l'ASSEMBLéE NATIONALE.
La curiosité de ces bureaux était le cabinet de Villedeuil où le directeur du journal avait utilisé la tenture, les rideaux de velours noir à crépines d'argent de son salon de la rue de Tournon, où se donnaient, un moment, toutes bougies éteintes, des punchs macabres. A c?té du cabinet, la caisse, une caisse grillée, une vraie caisse, où se tenait le caissier Lebarbier, le petit-fils du vignettiste du XVIIIe siècle, que nous avions retiré avec Pouthier des bas-fonds de la bohème. Un échappé du CORSAIRE faisait dans un petit salon la cuisine du journal. C'était un petit homme, jaune de poil, à l'oeil saillant du jettatore, un des seuls écrivains échappés au coup de filet dans lequel le gouvernement avait ramassé les journalistes, le 2 Décembre.
Il était père de famille et père de l'église, prêchait les bonnes moeurs, se signait parfois comme un saint égaré dans une bande de malfaiteurs, et, malgré tout, allait dans la définition libre des choses plus loin qu'aucun de nous. En ses moments de loisir, il rédigeait pour le journal: LES MéMOIRES DE Mme SAQUI.
A la table de la rédaction s'asseyaient journellement: Murger à l'air humble, à l'oeil pleurard, aux jolis mots de Chamfort d'estaminet; Aurélien Scholl, avec son monocle vissé dans l'orbite, ses colères spirituelles, son ambition de gagner la semaine prochaine 50,000 francs
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