Journal des Goncourt (Premier Volume) | Page 5

Edmond de Goncourt
la place �� un ancien militaire, auquel un tic nerveux fait �� tout moment regarder la place de ses ��paulettes et cracher par-dessus ses deux ��paules.
Dans les six mille francs que Villedeuil ��tait cens�� avoir re?us de son usurier, figurait, pour une assez forte valeur, un lot de deux cents bouteilles de champagne. Le vin commen?ant �� s'avarier, le fondateur de l'��CLAIR a l'id��e d'enlever le journal en donnant un bal, et en offrant ce bal au champagne, comme prime aux abonn��s. On invite toutes les connaissances de l'��CLAIR, le boh��me Pouthier, un architecte sans ouvrage, un marchand de tableaux, des anonymes ramass��s au hasard de la rencontre, quelques femmes vagues, et, �� un moment, pour animer un peu cette f��te de famille, Nadar, qui commen?ait une s��rie de caricatures dans notre journal, a l'id��e d'ouvrir les volets, et d'inviter les passants et les passantes par la fen��tre.
--Une femme entretenue de notre maison disait �� sa bonne: ?Vous pourriez bien dire: Madame, s'il vous pla?t.--Tiens, je n'ai pas la force de parler, et il faut encore que je dise: Madame, et s'il vous pla?t!?
--Le J��hovah de la Bible, un Arpin. Le Dieu de l'��vangile, un ��sope onctueux, un politique, un agent d'affaires �� consultations gratuites et bienveillantes.
--Nous qui avons pass�� notre enfance �� regarder, �� copier des lithographies de Gavarni, nous qui ��tions, sans le conna?tre, et sans qu'il nous conn?t, ses admirateurs, nous avons d��cid�� Villedeuil �� lui demander des dessins. Et ce soir, un d?ner a eu lieu, �� la Maison d'Or, o�� il nous a propos�� pour notre journal la s��rie du MANTEAU D'ARLEQUIN.
--Portrait d'un vieux monsieur en omnibus. Face massive et mafflue. Des taches blanchatres au lieu de sourcils. Yeux en verroterie bleue �� fleur de t��te. Poches jaunatres et bleuissantes sous les yeux. Petit nez tr��s relev�� au bout couleur de n��fle. Oreilles couleur de vieille cire, avec dessus un duvet blanc comme sur les orties.
Autre vieux monsieur. Cheveux blancs tr��s courts, sourcils rest��s noirs, des yeux qui semblent des yeux d'��mail entre des paupi��res sans cils, coloration bilieuse du teint, galbe osseux, sculpture ��maci��e des chairs. Ce vieillard �� la t��te o�� il y a du cabotin et du conventionnel, porte un col large, rabattu �� l'enfant, une cravate chamois �� bouquets roses et verts, et une cha?ne de montre s'��chappe de son gilet pour se perdre dans la poche ext��rieure d'une redingote vert bouteille, pendant qu'une de ses mains orn��e d'une bague en turquoise, pose sur un manteau pli�� sur ses genoux, un manteau raisin de Corinthe.
--?Les trag��dies... oh! que c'est emb��tant ces vieilles trag��dies!... Rachel... une femme plate!...--c'est Janin qui cause avec le d��cousu d'un de ses feuilletons.--Les acteurs... ils jouent tous la m��me chose... moi, je ne parle que des actrices... Encore, quand ils sont bien laids, comme Ligier, on peut dire qu'ils ont du talent... mais, sans cela jamais leur nom ne se trouve sous ma plume... Voyez-vous, le th��atre, il faut que ?a soit deux et deux font quatre, et qu'il y ait des r?les de femmes... c'est ce qui fait le succ��s de Maz��res.... Figurez-vous que Mlle B... est venue l'autre jour me demander 500 francs. Je lui ai demand�� pourquoi? Afin de parfaire 1000 francs pour se faire aimer par F...? Et Janin ��clate de rire. ?Une chose neuve? une chose neuve pour le public, allons donc! Si la REVUE DES DEUX MONDES changeait de couleur sa couverture, elle perdrait 2000 abonn��s... Amusez-vous, allez, on regrette ?a plus tard, il n'est plus temps... A propos, vous avez ��crit un joli article sur cet ornemaniste, sur ce Possot... Vous avez quelque chose de lui, hein?... Oh! les attaques, ?a ne me fait rien. Qu'est-ce qu'on peut me dire: que je suis b��te, que je suis vieux, que je suis laid! ?a m'est parfaitement ��gal... Ce Roqueplan, un homme tout couvert de l'aes alienum, comme dit Salluste... Tenez, il y a un jeune homme, l'auteur d'une SAPHO, qui a touch�� juste, le matin! Il a mis dans sa pr��face: les auteurs qui vont louer leurs livres au cabinet de lecture... Et ce Pyat... J'ai voulu devant les magistrats dire toute ma conduite, montrer toute ma vie... Mais quand on me dit que je ne sais pas le fran?ais, moi, qui ne sais que cela... car je ne sais ni l'histoire, ni la g��ographie, ni rien... mais le fran?ais, cela me para?t prodigieux... Tout de m��me, ils ne m'emp��cheront pas d'avoir tout Paris �� mon enterrement!?
Et nous reconduisant jusqu'�� la porte de son cabinet, il nous dit: ?Voyez-vous, jeunes gens, il ne faut pas trop, trop de conscience!?
* * * * *
--Sur la route de Versailles, au Point-du-Jour, �� c?t�� d'un cabaret ayant pour enseigne: A la renaissance du Perroquet savant, un mur qui avance avec de vieilles grilles rouill��es
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