diplomatie, parvint à entrer comme dessinateur
expéditionnaire dans la collaboration d’une importante feuille illustrée.
Mais le sort ne le servit pas précisément comme il l’aurait voulu; au
premier engagement, lui, ses crayons et ses pinceaux furent faits
prisonniers. Heureusement, il se rencontra, dans les rangs ennemis,
avec un officier qui avait été son camarade de classe, à Yale. Halleck
fut mis en liberté, et revint au logis, bien résolu à chercher désormais la
gloire partout ailleurs que sous les drapeaux.
Les pompeuses descriptions des glorieux paysages du Minnesota que
lui faisait constamment sa cousine, finirent par décider le jeune artiste à
faire une excursion dans l’Ouest. -- Mais il fit tant de stations et
chemina à si petites journées, qu’il mit deux mois à gagner Saint-Paul.
Cependant, comme tout finit, même les flâneries de voyage, Halleck
arriva au moment où sa cousine quittait cette ville, après y avoir passé
quelques jours et il ne trouva rien de mieux que de s’embarquer avec
elle dans le bateau par lequel elle effectuait son retour chez l’oncle
John.
Telles étaient les circonstances dans lesquelles nos jeunes gens s’étaient
réunis, au moment où nous les avons présentés au lecteur.
-- D’après vos lettres, l’oncle John jouit d’une santé merveilleuse?
reprit l’artiste, après une courte pause.
-- Oui, il est étonnant. Vous savez les craintes que nous concevions à
son égard, lorsque après ses désastres financiers, il forma le projet
d’émigrer, il y a quelques années? Mon père lui offrit des fonds pour
reprendre les affaires; mais l’oncle persista dans ses idées de départ,
disant qu’il était trop âgé pour recommencer cette vie là, et assez jeune
pour devenir un «homme des frontières.» Il a pourtant cinquante ans
passés, et sur sept enfants, il en a cinq de mariés; deux seulement sont
encore à la maison, Will et Maggie.
-- Attendez un peu..., il y a quelque temps que je n’ai vu Maggie, çà
commence à faire une grande fille. Et Will aussi... il y a deux ans
c’était presque un homme.
-- Maggie est dans ses dix-huit ans; son frère à quatre ans de plus
qu’elle.
Sans y songer, Adolphe regarda Maria pendant qu’elle parlait; il fut
tout surpris de voir qu’elle baissa les yeux et qu’une rougeur soudaine
envahit ses joues. Ces symptômes d’embarras ne durèrent que quelques
secondes; mais Halleck les avait surpris au passage; cela lui avait mis
en tête une idée qu’il voulut éclaircir.
-- Il y a un piano chez l’oncle John, je suppose? demanda-t-il.
-- Oh oui! Maggie n’aurait pu s’en passer. C’est un vrai bonheur pour
elle.
-- Naturellement... Ces deux enfants-là n’ont pas à se plaindre; ils ont
une belle existence en perspective. Will a-t-il l’intention de rester-là, et
de suivre les traces de son père?
-- Je ne le sais pas.
-- Il me semble qu’il a dû vous en parler.
Tout en parlant, il regarda Maria en face et la vit rougir, puis baisser les
yeux. L’artiste en savait assez; il releva les yeux sur le paysage, d’un
air rêveur, et continua la conversation.
-- Oui, le petit Brainerd est un beau garçon; mais, à mon avis, il ne sera
jamais un artiste. A-t-il fini son temps de collège?
-- Dans deux ans seulement.
-- Quel beau soldat cela ferait! notre armée a besoin de pareils hommes.
-- Will a fait ses preuves. Il a passé bien près de la mort à la bataille de
Bullrun. La blessure qu’il a reçue en cette occasion est à peine guérie.
-- Diable! c’était sérieux! quel était son commandant; Stonewal,
Jackson, ou Beauregard?
-- Adolphe Halleck!!
L’artiste baissa la tète en riant, pour esquiver un coup de parasol que lui
adressait sa cousine furieuse.
-- Tenez, Maria, voici ma canne, vous pourriez casser votre ombrelle.
-- Pourquoi m’avez-vous fait cette question?
-- Pour rien, je vous l’assure...
La jeune fille essaya de le regarder bravement, Sans rire et sans rougir;
mais cette tentative était au-dessus de ses forces, elle baissa la tête d’un
air mutin.
--Allons! ne vous effarouchez pas, chère! dit enfin le jeune homme
avec un calme sourire. Ce petit garçon est tout à fait honorable, et je
serais certainement la dernière personne qui voudrait en médire. Mais
revenons à notre vieux thème, les sauvages. En verrai-je quelque peu,
pendant mon séjour chez l’oncle John?
-- Cela dépend des quantités qu’il vous en faut pour vous satisfaire. Un
seul, pour moi, c’est beaucoup trop. Ils rôdent sans cesse dans les
environs; vous ne pourrez faire une promenade sans les rencontrer.
-- Alors, je pourrai en portraicturer deux ou trois?
-- Sur ce point, voici un renseignement précis. Prenez un des plus
horribles vagabonds des rues de New York; passez-lui sur le visage une
teinte de bistre cuivré; mettez-lui des cheveux blonds retroussés en
plumet et liés par un
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