le th��ologien de la Boh��me, le repr��sentant des libert��s religieuses que cette nation revendiquait depuis des si��cles.
A coup s?r, ce fut une ��trange mani��re de prouver l'horreur du sang r��pandu, que d'envoyer aux flammes un homme de bien pour une dissidence d'opinion[1]; mais telle ��tait la morale de ces temps; et il faut bien, sans trop d'��pouvante, contempler courageusement le spectacle des terribles maladies au milieu desquelles se d��veloppait la virilit�� de l'intelligence, retenue encore dans les liens d'une adolescence fougueuse et aveugle. Sans cela nous ne comprendrons rien �� l'histoire, et d��s la premi��re page nous fermerons ce livre ��crit avec du sang. Ainsi, mes ch��res lectrices, point de faiblesse, et acceptez bien ceci avant de regarder la sinistre figure de Jean Ziska: c'est qu'au quinzi��me si��cle, pour ne parler que de celui-l��, rois, papes, ��v��ques et princes, peuple et soldats, barons et vilains, tous versaient le sang comme aujourd'hui nous versons l'encre. Les nations les plus civilis��es de l'Europe offraient un vaste champ de carnage, et la vie d'un homme pesait si peu dans la main de son semblable, que ce n ��tait pas la peine d'en parler.
[Note 1: Soit d��go?t des affaires, soit remords de conscience, Jen Gerson alla finir ses jours dans un couvent o�� il ��crivit l'_Imitation de Jesus-Christ_, et plus tard la d��fense de Jeanne d'Arc. Voyez �� cet ��gard l'excellente Histoire de France de M. Henri Martin.]
Est-ce �� dire que le sentiment du vrai, la notion du juste, fussent inconnus aux hommes de ce temps? H��las! quand on regarde l'ensemble, on est pr��t �� dire que oui; mais quand on examine mieux les d��tails, on retrouve bien dans cette divine cr��ation qu'on appelle l'humanit��, l'effort constant de la v��rit�� contre le mensonge, du juste contre l'injuste. Les crimes, quoique innombrables, ne passent pas inaper?us. Les contemporains qui nous en ont transmis le r��cit lugubre en g��missent avec partialit��, il est vrai, mais avec ��nergie. Chacun pleure ses partisans et ses amis, chacun maudit et r��prouve les forfaits d'autrui; mais chacun se venge, et le droit des repr��sailles semble ��tre un droit sacr�� chez ces farouches chr��tiens qui ne croient pas au bienfait terrestre de la mis��ricorde. On discute ardemment la justice des causes, on n'examine jamais celle des moyens; cette derni��re notion ne semble pas ��tre ��close. La philosophie que le dix-huiti��me si��cle a pr��ch��e sous le nom de tol��rance, a ��t�� le premier ��tendard lev�� sur le monde pour guider, vers la charit�� chr��tienne les esprits du catholicisme. Jusque-l�� le catholicisme pr��che avec le bourreau �� sa droite et le confesseur �� sa gauche, et alors m��me que la tol��rance s'efforce de lui faire cong��dier le tourmenteur, le catholicisme r��siste, menace, anath��matise, br?le les ��crits de Jean-Jacques Rousseau, traite Voltaire d'Ant��christ, et fait une scission ��clatante, ��ternelle peut-��tre avec la philosophie.
Ainsi donc, au quinzi��me si��cle, la guerre, partout la guerre. La guerre est le d��veloppement in��vitable de l'unit�� sociale et de l'��ducation religieuse. Sans la guerre, point de nationalit��, point de lumi��re intellectuelle, pas une seule question qui puisse sortir des t��n��bres. Pour ��chapper �� la barbarie, il faut que notre race lutte avec tous les moyens de la barbarie. Le combat ou la mort, la lutte sanguinaire ou le n��ant; c'est ainsi que la question est invinciblement pos��e. Acceptez-la, ou vous ne trouvez dans l'histoire de l'humanit�� qu'une nuit profonde, dans l'oeuvre de la Providence que caprice et mensonge.
Il me fallait insister sur cotte v��rit��, devenue banale, avant de vous introduire sur l'ar��ne fumante de la Boh��me. Si je vous y faisais entrer d'embl��e, lectrice d��licate, ��pouvant��e de heurter �� chaque pas des monceaux de ruines et de cadavres, vous penseriez peut-��tre que la Boh��me ��tait alors une nation plus barbare que les autres; je dois donc, au pr��alable, vous prier, Madame, de jeter un coup d'oeil sur notre belle France, et de voir ce qu'elle ��tait �� cette ��poque, c'est-��-dire durant les derni��res ann��es de l'infortun�� Charles VI. D'un c?t�� les Armagnacs ravageant les campagnes jusqu'aux, portes de Paris, pillant et massacrant sans merci leurs compatriotes; un sire de Vauru pendant au ch��ne de Meaux une cinquantaine de pi��ces de gibier humain qu'on y voyait brandiller tous les matins[2]; un dauphin de France assassinant son parent en trahison sur le pont de Montereau, emprisonnant sa m��re, abandonnant son p��re idiot �� tous les maux de sa condition et �� tous les dangers de son ineptie: de l'autre, un duc de Bourgogne, assassin de son proche parent, faisant justice de ses ennemis dans Paris, �� l'aide du bourreau Capeluche, des bouchers et des ��corcheurs; chaque parti vendant �� son tour sa patrie �� l'Angleterre; l'Anglais aux portes de Paris; dans Paris la famine, la peste, l'anarchie, le d��couragement, les vengeances inutiles et f��roces, les prisonniers mourant de faim dans les cachots
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