petits soins de l'int��rieur, cultiver la superficie de quelques talents, devenir ��pouse et m��re, s'habituer �� allaiter et �� laver des enfants, voil�� ce qu'on appelle ��tre une femme faite. Moi, je pense qu'en d��pit de tout cela une femme de vingt-cinq ans, si elle n'a pas vu le monde depuis son mariage, est encore un enfant. Je pense que le monde qu'elle a vu ��tant demoiselle, dansant au bal sous l'oeil de ses parents, ne lui a rien appris du tout, si ce n'est la mani��re de s'habiller, de marcher, de s'asseoir et de faire la r��v��rence. Il y a autre chose �� apprendre dans la vie, et les femmes l'apprennent tard et �� leurs d��pens. Il ne suffit pas d'avoir de la grace, de la d��cence, une sorte d'esprit; il ne suffit pas d'avoir allait�� proprement ses enfants et tenu sa maison en ordre pendant quelques ann��es pour ��tre �� l'abri de tous les dangers qui peuvent porter de mortelles atteintes au bonheur. Que de choses apprend un homme, au contraire, dans l'exercice de cette libert�� illimit��e qui lui est accord��e �� peine au sortir de l'adolescence! que d'exp��riences rudes, que de s��v��res le?ons, que de d��ceptions m?rissantes il peut mettre �� profit seulement dans le cours de la premi��re ann��e! que d'hommes et de femmes il a pu ��tudier �� l'age o�� la femme n'a encore connu que son p��re et sa m��re!
Il est donc faux qu'un homme de vingt-cinq ans soit du m��me age qu'une fille de quinze, et que, pour faire une union raisonnablement assortie, il faille ��tablir dix ans de diff��rence entre le mari et la femme. Il est bien vrai que le mari doit ��tre le protecteur et le guide; puisqu'il doit ��tre le ma?tre, il est �� d��sirer qu'il soit un ma?tre prudent et ��clair��. Mais, �� age presque ��gal, il a bien assez de cette esp��ce de sup��riorit�� sur sa femme; s'il en a beaucoup plus, il en abuse, il devient grondeur, p��dant ou despote.
Supposons que M. Jacques soit incapable d'��tre jamais rien d'approchant; accordons-lui toutes les belles qualit��s. Je ne te parle pas d'amour, moi: je te fais la part bien grande en te disant que je ne le crois pas absolument n��cessaire dans le mariage, et je doute que tu en aies r��ellement pour ton fianc��; �� ton age ou prend pour de l'amour la premi��re affection qu'on ��prouve. Je te parle d'amiti�� seulement, et je te dis que le bonheur d'une femme est perdu quand elle ne peut pas consid��rer son mari comme son meilleur ami. Es-tu bien s?re de pouvoir ��tre maintenant la meilleure amie d'un homme de trente-cinq ans? Sais-tu ce que c'est que l'amiti��? Sais-tu ce qu'il faut de sympathie pour la faire na?tre? quels apports de go?ts, de caract��res et d'opinions sont n��cessaires pour la maintenir? Quelles sympathies peuvent donc exister entre deux ��tres qui, par la diff��rence de leur age, re?oivent des m��mes objets des sensations tout oppos��es? quand ce qui attire l'un repousse l'autre, quand ce qui parait estimable au plus ag�� est ennuyeux au plus jeune, quand ce qui semble agr��able et touchant �� la femme est dangereux ou ridicule aux yeux du mari? As-tu pens�� �� tout cela, pauvre Fernande? N'es-tu pas aveugl��e par ce besoin d'aimer qui tourmente mis��rablement les jeunes filles? N'est-tu pas abus��e aussi par une certaine vanit�� secr��te dont tu ne te ronds pas compte? Tu es pauvre, et un nomme riche te recherche et t'��pouse. Il a des chateaux, des terres; il a une belle figure, de beaux chevaux, des habits bien faits; il te semble charmant, parce que tout le monde le dit. Ta m��re, qui est la femme la plus int��ress��e, la plus fausse et la plus adroite du monde, arrange les choses de mani��re �� ce que vous ne puissiez pas vous ��viter. Elle te fait peut-��tre croire qu'il est amoureux de toi, apr��s lui avoir fait croire que tu ��tais amoureuse de lui, tandis que vous ne vous aimez peut-��tre ni l'un ni l'autre. Toi, tu es comme ces petites pensionnaires, qui ont par hasard un cousin, et qui en sont in��vitablement amoureuses, parce que c'est le seul homme qu'elles connaissent. Tu es noble de coeur, je le sais, et tu ne t'occupes pas plus des richesses de M. Jacques que si elles n'existaient pas; mais tu es femme, et tu n'es pas insensible �� la gloire d'avoir fait, par ta beaut�� et ta douceur, un de ces miracles que la soci��t�� voit avec surprise, parce qu'ils sont rares en effet: un homme riche ��pousant une fille pauvre.
Mais je te mets en col��re, je parie; je t'en prie, ma ch��re enfant, ne prends pas tout cela trop au s��rieux. Ce sont des choses que je t'engage �� te dire courageusement ��
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