ce boudoir parfum��, dont ils ne cherchent pas �� sortir quand on ouvre les vitraux. Quel go?t et quelle coquetterie dans l'arrangement de ces purs cam��lias et de ces cactus ��tincelants! Quels mimosas splendides, quels gard��nias embaum��s! Le jardinier avait raison d'��tre fier. Ces gradins de plantes dont on n'aper?oit que les fleurs, et qui forment des all��es, cette vo?te de guirlandes sous un d?me de cristal, ces jolies corbeilles suspendues, d'o�� pendent des plantes ��tranges d'une v��g��tation a��rienne, tout cela est ravissant. Il y avait un coussin de velours bleu c��leste sur le banc de marbre blanc, �� c?t�� de la cuve que traverse un filet d'eau murmurante. Un livre ��tait pos�� sur le bord de cette cuve. Je n'ai pas os�� y toucher; mais je me suis pench�� de c?t�� pour regarder le titre: c'��tait le Contrat social.
--C'est le livre de madame, a dit l'enfant; elle l'a oubli��. C'est l�� sa place, c'est l�� qu'elle vient lire toute seule, bien longtemps, tous les jours.
--C'est peut-��tre ma pr��sence qui l'en chasse; je vais me retirer.
Et j'allais le faire, lorsque, pour la seconde fois, elle m'est apparue. Le jardinier s'est ��loign�� par respect, le jockey pour courir apr��s Fly, et la conversation s'est engag��e entre elle et moi, si naturellement, si facilement, qu'on e?t dit que nous ��tions d'anciennes connaissances. Les mani��res et le langage de cette femme sont d'une ��l��gance et en m��me temps d'une simplicit�� incomparables. Elle doit ��tre d'une naissance illustre, l'antique majest�� patricienne r��side sur son front, et la noblesse de ses mani��res atteste les habitudes du plus grand monde. Du moins de ce grand monde d'autrefois, o�� l'on dit que l'extr��me bon ton ��tait l'aisance, la bienveillance et le don de mettre les autres �� l'aise. Pourtant je n'y ��tais pas compl��tement d'abord; je craignais d'avoir bient?t, malgr�� toute cette grace, ma dignit�� �� sauver un quelque essai de protection. Mais ce reste de rancune contre sa race me rendait injuste. Celle femme est au-dessus de toute grandeur fortuite, comme de toute faveur d'h��r��dit��. Ce qu'elle inspire d'abord, c'est le respect, et bient?t apr��s, c'est la confiance et l'affection, sans que le respect diminue.
--Ce lieu-ci vous pla?t, m'a-t-elle dit; h��las! je voudrais ��tre libre de le donner �� quelqu'un qui s?t en profiter. Quant �� moi, j'y viens en vain chercher le ravissement qu'il vous inspire. On me conseille, pour ma sant��, d'en respirer l'air, et je n'y respire que la tristesse.
--Est-il possible?... Et pourtant c'est vrai! ai-je ajout�� en regardant son visage pale et ses beaux yeux fatigu��s. Vous n'��tes pas bien portante, et vous n'avez pas de bonheur.
--Du bonheur, Monsieur! Qui peut ��tre riche ou pauvre et se dire heureux! Pauvre on a des privations; riche on a des remords. Voyez ce luxe, songez �� ce que cela co?te, et sur combien de mis��res ces d��lices sont pr��lev��es!
--Vrai, Madame, vous songez �� cela?
--Je ne pense pas �� autre chose, Monsieur. J'ai connu la mis��re, et je n'ai pas oubli�� qu'elle existe. Ne me faites pas l'injure de croire que je jouisse de l'existence que je m��ne; elle m'est impos��e, mais mon coeur ne vit pas de ces choses-l��...
--Votre coeur est admirable!...
--Ne croyez pas cela non plus, vous me feriez trop d'honneur. J'ai ��t�� enivr��e quand j'��tais plus jeune. Ma mollesse et mon go?t pour les belles choses combattaient mes remords et les ��touffaient quelquefois. Mais ces jouissances impies portent leur chatiment avec elles. L'ennui, la sati��t��, un d��go?t mortel sont venus peu �� peu les fl��trir; maintenant je les d��teste et je les subis comme un supplice, comme une expiation.
Elle m'a dit encore beaucoup d'autres choses admirables que je ne saurais transcrire comme elle les a dites. Je craindrais de les gater, et puis je me suis senti si ��mu, que les larmes m'ont gagn��. Il me semblait que je contemplais un fait miraculeux. Une femme opulente et belle, reniant les faux biens et parlant comme une sainte! J'��tais boulevers��. Elle a vu mon ��motion; elle m'en a su gr��.
?Je vous connais �� peine, m'a-t-elle dit, et pourtant je vous parle comme je ne pourrais et je ne voudrais parler �� aucune autre personne, parce que je sens que vous seul comprenez ce que je pense.?
Pour faire diversion �� mon attendrissement, qui devenait excessif, elle m'a parl�� du livre qu'elle tenait �� la main.
?Il n'a pas compris les femmes, ce sublime Rousseau, disait-elle. Il n'a pas su, malgr�� sa bonne volont�� et ses bonnes intentions, en faire autre chose que des ��tres secondaires dans la soci��t��. Il leur a laiss�� l'ancienne religion dont il affranchissait les hommes; il n'a pas pr��vu qu'elles auraient besoin de la m��me foi et de la m��me morale que leurs p��res, leurs ��poux et leurs fils, et qu'elles se sentiraient avilies d'avoir un autre temple et une autre
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