Janus. De là les traditions les plus
ridicules. Jacques de Varase (de Varagine), archevêque de Gênes au XIIIe siècle, ne
doute pas que la ville n'ait été fondée par Dardanus ou par Janus, princes troyens, si
même ces étrangers n'ont pas été précédés par un autre Janus, petit-fils de Noé. Quoi qu'il
en soit, sur la foi de l'archevêque, la cathédrale de Saint-Laurent déploie encore, en
caractères gigantesques, une inscription qui atteste à tous les yeux la fondation de Gênes
par Dardanus, roi d'Italie4.
Sans discuter les traditions et les chronologies des martyrs, on peut croire que le
christianisme s'établit de bonne heure chez les Génois.
Ils portèrent le joug des Goths pendant leur invasion, jusque sous Théodoric. Cassiodore
adresse aux juifs domiciliés à Gênes un rescrit qui leur octroie divers privilèges5. Quand
Bélisaire rendit pour un temps l'Italie à l'empire, il établit à Gênes un gouverneur nommé
Bonus. On assure que Totila, voulant obliger le général romain à diviser ses forces, lui fit
tenir des lettres supposées de ce gouverneur, qui le pressait d'envoyer des secours pour
défendre Gênes6.
(539) Les Francs sous Théodebert, roi d'Austrasie, ayant envahi la Ligurie, détruit Milan
et ravagé tout le pays, portèrent leurs dévastations jusqu'à Gênes. Sans doute cette ville,
quoiqu'elle ne fût pas encore de marbre, suivant la remarque de Gibbon7, avait déjà son
importance, s'il faut en croire les barbares vainqueurs, puisqu'ils se glorifient d'avoir pillé
et brûlé deux des plus florissantes cités du monde, Pavie et Gênes8.
(606) On ne sait jusqu'à quel point les Génois avaient réparé leurs revers quand, sous les
Lombards, Rotharis vint piller la ville9 que ses prédécesseurs avaient laissée en paix. En
général on croit que Gênes dut quelque accroissement à l'invasion des Lombards en Italie.
Comme Venise, elle servit d'asile aux émigrés que la fureur des conquérants barbares
chassait des régions envahies. La barrière de l'Apennin était presque aussi sûre que celle
des lagunes. Rien n'invitait l'avidité des possesseurs des plaines les plus riantes et les plus
riches à franchir les rudes sommets de ces hautes montagnes, dont au revers le pied est
immédiatement battu par les vagues de la Méditerranée. Probablement Gênes resta
presque oubliée, peut-être dédaignée comme une bourgade de pêcheurs, par des
dominateurs étrangers à la mer. Mais, à couvert du côté de la terre, elle eut à se défendre
contre des ennemis maritimes. Les Sarrasins d'Afrique ravagèrent les côtes d'Italie. Leurs
apparitions dévastatrices furent fréquentes, et ce fléau se prolongea plus d'un siècle.
Gênes semble avoir été le point d'appui et le boulevard principal de la défense de tout le
littoral des frontières de la Provence à la mer de Toscane. Des tours antiques dont les
vestiges subsistent sur les caps, le long de la côte, passent, dans la tradition populaire,
pour le reste du système de défense que les Génois avaient organisé dès ce temps.
On ignore sur quelle autorité Foglietta, historien génois du seizième siècle, a pu avancer
que Gênes a eu des comtes pendant cent ans. On n'en connaît point; on trouve seulement
qu'une de nos chroniques du temps de Pépin attribue la conduite d'une entreprise
malheureuse sur la Corse à un Adhémar qu'elle qualifie de comte de Gênes. Il n'est
question ni de Gênes ni d'Adhémar dans le petit nombre d'écrivains qui parlent de cette
expédition10, dont l'authenticité est fort incertaine (806).
Quoi qu'il en soit, Gênes profita des temps de désordre et d'anarchie qui succédèrent
bientôt pour s'acquérir une indépendance de fait. Elle suivit en cela l'exemple de
beaucoup d'autres villes dont le gouvernement échappait aux faibles descendants de
Charles, ou qui, reconnaissant des suzerains, n'obéissaient pas à des maîtres. Tandis que
la souveraineté se disputait dans les plaines de la Lombardie, une petite commune dont la
puissance n'importunait encore personne, perdue entre les montagnes et la mer, pouvait
se régir à son gré sans que les empereurs ou les rois en fussent jaloux. Les droits de la
souveraineté semblaient assez bien conservés quand de tels sujets recevaient humblement
à titre d'octroi et de privilèges les libertés dont ils s'étaient saisis. Néanmoins ces progrès
vers l'indépendance furent lents et probablement rétrogradèrent à certaines époques (988).
Nous pouvons en juger par un diplôme de Bérenger II et d'Adalbert son fils, rois d'Italie,
qui existe dans les archives génoises et que les historiens nationaux, sans le transcrire, ont
cité comme un précieux monument de l'indépendance de leur patrie, et comme une
confirmation de ses possessions et de ses droits11. Ce diplôme accordé par les rois à
l'intercession d'Hébert leur fidèle (rien n'indique ce qu'il était pour les Génois)12, s'appuie
d'abord de cette maxime qu'il convient aux souverains d'écouter favorablement les voeux
de leurs sujets, pour les rendre d'autant plus prompts à l'obéissance. C'est pourquoi on
confirme tous les fidèles et habitants de la ville dans leurs propriétés mobilières et
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