il a ��t�� prouv�� que pour l'observateur, assez ma?tre de soi pour se regarder penser, il y a une mine profonde et toujours f��conde �� explorer. Dans la pens��e, comme dans la musique, on d��couvre des tons, des demi-tons, des quarts de ton, des commas pour employer le terme technique. Ce sont ces infiniment petits de la conception c��r��brale qu'il est int��ressant de noter. C'est l�� le vrai fantastique, parce que c'est l'inexplor��; parce que, sur ce terrain, les surprises, les antith��ses, les absurdit��s sont multiples et renaissantes.
C'est cette ��tude de la pens��e malade que Jules Lermina a essay��e, dans une singuli��re abstraction de son propre moi, qui est une force. Le temps de la synth��se, m��re du romantisme, est pass��. Le temps de l'analyse est venu. Corpuscules, microbes, mon��res d'Haeckel, inconscient d'Hartmann, tout aujourd'hui est regard�� de pr��s. C'est l'age du microscope. On ��tudie les mat��riaux du grand monument humain pour en reconstruire l'architecture premi��re. Dans le fou, dans l'alcoolique, il y a disjonction des pens��es: d'o�� une certaine facilit�� pour les soumettre �� l'action du microscope.
Quelle diff��rence entre ces exp��riences sur le vivant, sur le pensant, et les imaginations purement physiques d'Hoffmann, ne comprenant d'autre antith��se que celle de la vie et de la mort, de la mati��re et de son reflet, du crime et du remords; d'Achim d'Arnim, se perdant �� travers les grisailles du r��ve effac��, presque invisible,--illisible, pourrait-on dire; voire m��me d'un Hawthorne, s'attachant aux contrastes de neige et de soleil, de poison et d'antidote, de m��tal et de papier. Edgar Po?, le premier, a ��tudi��, non plus les dehors, mais le dedans de l'homme. Son ?D��mon de la perversit��? est une trouvaille c��r��brale, ad��quate �� un rapport de m��decin l��giste. C'est le psychopathe avant la psychopathie.
Jules Lermina est de cette ��cole. Il tr��pane le crane et regarde agir le cerveau; et il y voit des spectacles mille fois plus ��tranges que les fant?mes ridicules, blancs dans le noir, mille fois plus effrayants que les goules pales ou les vampires verdatres du bon Nodier.
Les livres sans m��rite ont seuls besoin de pr��face. Je croirais manquer de respect au public, qui conna?t ceux qu'il aime, et de justice envers un vieux camarade en pr��sentant un litt��rateur qui s'est, depuis tant d'ann��es, si brillamment pr��sent�� lui-m��me. Mais peut-��tre Jules Lermina veut-il que je dise qu'en ce volume particulier il a mis plus de lui-m��me encore, des recherches plus profondes, une acuit�� plus affin��e. Je con?ois cela. On a toujours un livre qu'on pr��f��re, un favori dans une oeuvre multiple. Les Histoires incroyables sont peut-��tre ce ?pr��f��r��? pour leur remarquable auteur.
Le conteur a trouv��, pour l'illustrer, un artiste aux visions originales, puissamment saisissantes, pleines, elles aussi, de ce fantastique r��el qui fait le prix des r��cits de ce tr��s original et troublant volume. On prendrait plus d'une composition de M. Denisse pour une des ��tranges vignettes, pleines d'humour tragique, intercal��es par Cruikshank dans la traduction de Hugo, Han of Island.
Quoi qu'il en soit, on placera certainement ces pages au meilleur rang de la biblioth��que des conteurs, entre les visions romantiques d'Hoffmann et les conceptions po��tiquement scientifiques d'Edgar Allan Po?; et l'auteur, qu'on va fort applaudir, a d��couvert un joli coin d'Am��rique, plein de fleurs rares et ��tranges, inqui��tantes comme ces fleurs empoisonn��es du conte d'Hawthorne, le jour o�� il a souffl��, tout bas, �� William Cobb les histoires troublantes et remarquables que ce William Cobb contait si bien et que recueille aujourd'hui, pour nous, Jules Lermina.
JULES CLARETIE.
15 mars 1885.
HISTOIRES INCROYABLES
LES FOUS
I
Pourquoi six heures? Non pas six heures moins cinq minutes ni six heures cinq, mais bien six heures juste. Cela me pr��occupait plus que je ne voulais me l'avouer, et cependant je ne m'��tais pas tromp��. Tenez, hier encore, j'��tais all�� chez lui, pour mon proc��s.
Car il est temps que je vous dise de quoi je veux parler ou plut?t de qui.
Lui, c'est Me Golding, mon sollicitor, un homme de sens et de talent, plus rus�� que tous les attorneys des ��tats-Unis, et qui sait vous retourner un juge comme un gant de feutre, ou lui ouvrir l'esprit �� point, comme le plus graiss�� des bowie-knives.
Je suis un homme comme vous, ami lecteur, mais peut-��tre ai-je en moi telle disposition qui chez vous n'existe qu'�� l'��tat latent.
J'ai remarqu�� que chez tout individu appartenant �� la race humaine, r��side en un point sp��cial et sans qu'il s'en rende compte lui-m��me, une facult��, comme une sorte de sens, dou�� d'un superacuit�� remarquable. Chez les uns, j'ai vu que c'��tait le d��sir de l'or, ou plut?t le flair des affaires; chez les autres, c'��tait la divination intuitive de la fragilit�� d'une femme. Les uns se disaient, en entendant un bavard: l��, il y a une bonne affaire �� engager. Les autres, en regardant la plus guind��e de toutes les m��res de
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