Histoire de Paris depuis le temps des Gaulois jusquà nos jours - II | Page 4

Théophile Lavallée
la
Cité et en forma la place Dauphine, ainsi que l'éperon du Pont-Neuf, où
s'élève la statue de Henri IV.
5º L'île du Louvre n'était qu'un banc de sable, qui a disparu dans la
construction du port Saint-Nicolas.
6º Les îles aux Treilles et de Seine étaient situées depuis le pont des
Tuileries jusqu'au pont des Invalides: elles contenaient ensemble 20
arpents, étaient couvertes de saussaies et d'oseraies, et furent vendues
en 1645 pour être réunies à la rive gauche.
7º L'île du Gros-Caillou ou des Cygnes, grand banc de sable situé en
face de Chaillot et qu'on a détruit en 1820.

CHAPITRE III.
ÎLE SAINT-LOUIS.
Les îles Notre-Dame et aux Vaches, qui ont formé l'île Saint-Louis,
n'étaient séparées que par un petit canal qui occupait à peu près (p.009)
l'emplacement de la rue Poultier. Elles étaient assez élevées, couvertes
de prairies, bordées de peupliers et appartenaient à l'église Notre-Dame
de temps immémorial, car l'on trouve que Charles-Martel enleva à cette
église la propriété de ces îles et que Charles-le-Chauve la lui restitua en
867. Une fête y fut donnée en 1313 par Philippe-le-Bel[1]; on y prêcha
une croisade, et le roi, avec ses deux fils, y prit la croix. En 1614,
Christophe Marie, architecte, de concert avec deux financiers nommés

Regratier et Poultier, obtint la concession de ces deux îles à la
condition de les réunir, de les border de quais, d'y construire des rues et
des maisons, enfin de les faire communiquer par un pont avec la ville.
Le pont Marie et les rues Regratière et Poultier rappellent les noms des
trois hommes qui commencèrent cette grande entreprise; mais il fallut
plus de trente ans pour couvrir ce nouveau quartier de rues bien
alignées, de quais superbes, de beaux hôtels, où allèrent principalement
se loger les gens d'affaires, qu'on appelait alors traitants ou partisans.
Lorsque Colbert fit rendre gorge, en 1665, à ces sangsues de l'État, il y
eut, sur 90 millions, 8 millions de taxes mises sur les financiers de l'île
Saint-Louis. Cette île prit dès lors un aspect calme, grave, sérieux,
qu'elle n'a pas entièrement perdu: aujourd'hui encore, c'est un quartier
qui, par les moeurs paisibles de ses habitants, l'absence de grands
établissements de commerce, les nombreux hôtels qu'il a conservés, a
une physionomie particulière et ressemble à une ville de province[2]. Il
n'a joué presque aucun rôle dans nos troubles civils.
[Note 1: Voyez Hist. gén. de Paris, p. 23.]
[Note 2: «L'île Saint-Louis présente le singulier phénomène d'être le
seul quartier de Paris qui ne loge pas de filles publiques; toutes celles
qui, à différentes reprises, ont voulu s'y établir n'ont pu y rester. Cette
particularité peut s'expliquer par les moeurs et les habitudes de ce
quartier. Tout le monde s'y connaît: c'est une petite ville au milieu d'une
grande; les moeurs graves et austères de l'ancienne magistrature qui
l'habitait autrefois s'y sont conservées. Chaque maison a les traditions
de ses anciens maîtres; et l'ordre, le travail, ainsi que les vertus privées,
font le caractère des négociants qui y habitent aujourd'hui; il n'est pas
jusqu'aux ouvrières de toute espèce qui peuplent les combles qui ne se
fassent remarquer par leur décence et leur vertu[A].» A:
Parent-Duchâtelet, De la Prostitution, etc., t. I. p. 538.]
L'île Saint-Louis est unie à la rive droite par les ponts Marie (p.010) et
Louis-Philippe et par la passerelle de Damiette, à la rive gauche par le
pont de la Tournelle et la passerelle de Constantine, à la Cité par les
ponts Louis-Philippe et de la Cité. Sa superficie est de 110,000 mètres
carrés. Elle forme un quartier du neuvième arrondissement, dit de l'île

Saint-Louis, et qui, pendant la révolution, s'appelait section de la
Fraternité.
Elle est coupée à angle droit et régulièrement par deux grandes rues: la
rue des Deux-Ponts, qui aboutit aux ponts Marie et de la Tournelle et
qui est une des grandes voies de communication de la rive droite à la
rive gauche de la Seine; la rue Saint-Louis, où se trouve une église du
même nom, qui date de 1618 et qui a été reconstruite en 1726. C'est un
petit édifice, sans portail et sans ornements, qui renferme le tombeau de
Quinault.
Parmi les maisons de l'île Saint-Louis, on remarque les hôtels Lambert
et Bretonvilliers.
L'hôtel Lambert, situé rue Saint-Louis, nº 2, c'est-à-dire à la pointe
orientale de l'île, dans une situation pittoresque, d'où l'on embrasse les
deux rives de la Seine, a été bâti par l'architecte Levau pour Lambert de
Thorigny, maître des comptes, qu'on appelait Lambert le Riche et qui
était en effet l'un des financiers les plus opulents de son temps. C'était
un chef-d'oeuvre d'élégance, de bien-être et de bon goût. Lebrun y avait
peint la grande galerie, dite galerie (p.011) d'Hercule; Lesueur, le salon
de l'Amour, le cabinet des Muses, l'appartement des
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