Histoire de Paris depuis le temps des Gaulois jusquà nos jours - I | Page 8

Théophile Lavallée
de la chrétienté; il enrichit l'Université de nouveaux
priviléges; il ordonna que sa cour ou son parlement se réunît désormais
en lieu fixe à Paris; il y fit entrer, à côté des barons, des conseillers,
tirés la plupart de la bourgeoisie, lui donna la direction supérieure de la
police de la ville, et dota ainsi cette capitale de l'institution la plus
importante, la plus féconde de l'État, qui fut pour elle une source de
richesses et de puissance. Il accorda la liberté à tous les serfs de Paris
qui étaient de son domaine, et cet exemple fut suivi par l'abbé de
Saint-Germain-des-Prés, le plus riche des seigneurs ecclésiastiques, qui,
en exemptant de la servitude les serfs de son bourg, se réserva
seulement les droits utiles, c'est-à-dire ceux de justice et de seigneurie,
les rentes et les redevances, les droits perçus au four banal, au
pressoir, aux vendanges.
La prévôté de Paris, pendant la régence de Blanche de Castille, était
devenue vénale et avait été acquise par des enchérisseurs cupides et
ignorants; aussi, «le menu peuple, dit un contemporain, désolé par les
tyrannies et les rapines, s'en alloit en d'autres seigneuries; la terre du roi
étoit si déserte que, lorsqu'il tenoit ses plaids, il n'y venoit personne; en
outre, la ville et ses environs étoient pleins de malfaiteurs.» Louis fit
des ordonnances contre les vagabonds, les truands, les joueurs, les
habitués des tavernes, «les folles femmes qui font mestier de leur
corps,» et auxquelles il assigna des séjours[14] et des costumes

particuliers; il assura les subsistances de la ville en soumettant les
boulangers à une surveillance rigoureuse et en donnant la grande
maîtrise de ce métier à son panetier; enfin, il confia la prévôté de Paris
à Étienne Boileau, bourgeois illustre par son savoir et sa probité, qui fut
le principal conseiller du saint roi dans toutes ses oeuvres législatives;
et, pour rehausser cet office, il alla lui-même quelquefois au Châtelet
siéger à côté de son prévôt. Alors la prévôté devint la magistrature
d'épée la plus utile et la plus redoutable, surtout lorsqu'on lui eut adjoint
plus tard huit conseillers, chargés d'assister le prévôt, des enquesteurs
qui devaient instruire les affaires et faire la police dans les quartiers;
enfin, deux compagnies de sergents, l'une à pied, l'autre à cheval
chargées de l'exécution des arrêts[15].
[Note 14: Les rues assignées aux prostituées étaient les rues aujourd'hui
détruites de Mâcon, Froidmantel, Tiron, Robert, Baillehoi, Glatigny, du
Grand-Heurleux, du Petit-Heurleux, etc.]
[Note 15: De Lamare, Traité de la police, t. Ier, p. 210 et suiv.]
Saint Louis avait en grande estime les bourgeois de Paris: il les appela
à son conseil, il leur fit signer ses ordonnances, il recueillit en
un corps de lois les us et coutumes de métiers et leur donna des
règlements qui ont été pratiqués jusqu'à l'époque de Colbert; il
régularisa leurs corporations et confréries, dont l'origine remontait au
temps des Romains, et transforma définitivement la marchandise ou
hanse parisienne en une municipalité dont le chef prit le titre de prévôt
des marchands[16].
[Note 16: Voyez l'Histoire des quartiers de Paris, liv. II, ch. I.]
A tous ces bienfaits il ajouta le droit pour les habitants de Paris de se
garder eux-mêmes. Jusque-là, la police de la ville avait été faite par
soixante sergents, dont vingt à cheval, que commandait un chevalier:
on appelait cette garde le guet du roi, et elle était occupée uniquement à
faire des rondes. On lui adjoignit le guet des mestiers, ou guet
bourgeois, origine de la garde nationale, qu'on appelait encore guet
assis, parce qu'il était sédentaire dans les postes ou corps de garde, où il
se tenait seulement pendant la nuit. Il y avait ordinairement cinq de ces

postes dans l'intérieur, outre ceux des portes: ces postes étaient au
Palais, au Châtelet, sur la place de Grève, au cimetière des Innocents,
près de l'église de Sainte-Madeleine (dans la Cité). Chacun d'eux était
de six hommes: ce qui fait supposer que la force de la milice
bourgeoise n'était, dans l'origine, que de deux mille hommes, les
exemptions étant très-nombreuses. Cette milice était divisée en dizaines,
quarantaines et cinquantaines d'hommes qui avaient pour chef des
officiers appelés dizainiers, quaranteniers et cinquanteniers; elle était
sous les ordres du prévôt des marchands; mais le chevalier du guet, qui
avait le commandement de tous les postes bourgeois, relevait du prévôt
de Paris.

§ VII.
Paris sous les successeurs de Louis IX jusqu'à Philippe VI.--Richesse et
population de la ville à cette époque.
Sous les successeurs de Louis IX, le progrès continue et se manifeste
principalement par des fondations de colléges: on en compte quatre
sous Philippe III, six sous Philippe IV, cinq sous les fils de Philippe IV,
quatorze sous Philippe VI. En outre, l'on voit fonder l'abbaye des
Cordelières-Saint-Marcel, devenue l'hôpital de Lourcine, l'hôpital
Saint-Jacques,
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