George Sand et ses amis, by
Abert Le Roy
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Title: George Sand et ses amis
Author: Abert Le Roy
Release Date: October 13, 2004 [EBook #13737]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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SAND ET SES AMIS ***
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GEORGE SAND ET SES AMIS
par
ALBERT LE ROY
1903
SOCIÉTÉ D'ÉDITIONS LITTÉRAIRES ET ARTISTIQUES, Librairie
Paul Ollendorff, 50, CHAUSSÉE D'ANTIN, PARIS, Tous droits
réservés.
A M. OCTAVE GRÉARD, de l'Académie Française, Vice-Recteur
Honoraire de l'Académie de Paris
CHAPITRE PREMIER
LES ORIGINES
George Sand a voulu résumer sa personne littéraire et morale dans
l'épigraphe qu'elle inscrivit en tête de l'Histoire de ma Vie: «Charité
envers les autres, dignité envers soi-même, sincérité devant Dieu.»
Fut-elle toujours fidèle, et dans ses livres et dans ses actes, à cette noble
devise? C'est l'étude qu'il sera loisible d'entreprendre, en retraçant les
vicissitudes de sa destinée, en analysant son oeuvre, en instituant une
enquête sur les hommes de son temps et les événements auxquels elle
fut mêlée.
A l'image de Jean-Jacques Rousseau, son maître, elle nous a légué un
ouvrage autobiographique, composé non pas au déclin, mais au milieu
même d'une existence diverse et contradictoire. La première partie de
l'Histoire de ma Vie a été rédigée en 1847, alors que George Sand était
dans tout l'éclat de sa renommée. Elle explique nettement l'objet qu'elle
se propose et le plan qu'elle a conçu: «Je ne pense pas qu'il y ait de
l'orgueil et de l'impertinence à écrire l'histoire de sa propre vie, encore
moins à choisir, dans les souvenirs que cette vie a laissés en nous, ceux
qui nous paraissent valoir la peine d'être conservés. Pour ma part, je
crois accomplir un devoir, assez pénible même, car je ne connais rien
de plus malaisé que de se définir... Une insurmontable paresse (c'est la
maladie des esprits trop occupés et celle de la jeunesse par conséquent)
m'a fait différer jusqu'à ce jour d'accomplir cette tâche; et, coupable
peut-être envers moi-même, j'ai laissé publier sur mon compte un assez
grand nombre de biographies pleines d'erreurs, dans la louange comme
dans le blâme.» Ce sont, à dire vrai, ces erreurs de détail que George
Sand s'est surtout complu à redresser en racontant les années de sa
jeunesse, voire même les origines de sa maison, avec une singulière
prolixité. Sur les quatre gros volumes de l'Histoire de ma Vie, le
premier est consacré presque entièrement à nous décrire «l'Histoire
d'une famille de Fontenoy à Marengo.» Elle remonte à Fontenoy pour
rappeler que Maurice de Saxe fut son bisaïeul. Quelque démocrate
qu'elle soit devenue, elle tire vanité d'être par le sang arrière-petite-fille
de l'illustre maréchal, de même qu'elle est par l'esprit de la lignée de
Jean-Jacques; puis elle formule ainsi son état civil: «Je suis née l'année
du couronnement de Napoléon, l'an XII de la République française
(1804). Mon nom n'est pas Marie-Aurore de Saxe, marquise de
Dudevant, comme plusieurs de mes biographes l'ont découvert, mais
Amantine-Lucile-Aurore Dupin.»
Aussi bien, en se défendant de la manie aristocratique, n'est-elle pas
indifférente et veut-elle nous intéresser à tous les souvenirs
généalogiques de sa famille. Elle s'étend longuement sur le maréchal de
Saxe et sur cette noblesse de race qu'elle ramènera théoriquement à sa
juste valeur dans le Piccinino. Sa grand'mère, Aurore Dupin de
Francueil, avait vu Jean-Jacques une seule fois, mais en des conditions
qu'elle n'eut garde d'oublier. Voici comment elle relatait l'anecdote dans
les papiers dont George Sand hérita: «Il vivait déjà sauvage et retiré,
atteint de cette misanthropie qui fut trop cruellement raillée par ses
amis paresseux ou frivoles. Depuis mon mariage, je ne cessais de
tourmenter M. de Francueil pour qu'il me le fît voir; et ce n'était pas
bien aisé. Il y alla plusieurs fois sans pouvoir être reçu. Enfin, un jour,
il le trouva jetant du pain sur sa fenêtre à des moineaux. Sa tristesse
était si grande qu'il lui dit en les voyant s'envoler: «Les voilà repus.
Savez-vous ce qu'ils vont faire? Ils s'en vont au plus haut des toits pour
dire du mal de moi et que mon pain ne vaut rien.» En digne aïeule de
George Sand, madame Dupin de Francueil avait le culte de
Jean-Jacques. Lorsqu'il accepta de dîner chez elle, sans doute pour faire
honneur à son hôte elle
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