Face au drapeau | Page 3

Jules Verne
��t�� envoy��, ��clatait, non point en frappant le but vis��, mais �� la distance de quelques centaines de m��tres, son action sur les couches atmosph��riques ��tait si ��norme, que toute construction, fort d��tach�� ou navire de guerre, devait ��tre an��antie sur une zone de dix mille m��tres carr��s. Tel ��tait le principe du boulet lanc�� par le canon pneumatique Zalinski, d��j�� exp��riment�� �� cette ��poque, mais avec des r��sultats �� tout le moins centupl��s.
Si donc l'invention de Thomas Roch poss��dait cette puissance, c'��tait la sup��riorit�� offensive ou d��fensive assur��e �� son pays. Toutefois l'inventeur n'exag��rait-il pas, bien qu'il e?t fait ses preuves �� propos d'autres engins de sa fa?on et d'un rendement incontestable? Des exp��riences pouvaient seules le d��montrer. Or, pr��cis��ment, il pr��tendait ne consentir �� ces exp��riences qu'apr��s avoir touch�� les millions auxquels il ��valuait la valeur de son Fulgurateur.
Il est certain qu'une sorte de d��s��quilibrement s'��tait alors produit dans les facult��s intellectuelles de Thomas Roch. Il n'avait plus l'enti��re possession de sa c��r��bralit��. On le sentait engag�� sur une voie qui le conduirait graduellement �� la folie d��finitive. Traiter dans les conditions qu'il voulait imposer, nul gouvernement n'aurait pu y condescendre.
La commission fran?aise dut rompre tout pourparler, et les journaux, m��me ceux de l'opposition radicale, durent reconna?tre qu'il ��tait difficile de donner suite �� cette affaire. Les propositions de Thomas Roch furent rejet��es, sans qu'on e?t �� craindre, d'ailleurs, qu'un autre ��tat p?t consentir �� les accueillir.
Avec cet exc��s de subjectivit�� qui ne cessa de s'accro?tre dans l'ame si profond��ment boulevers��e de Thomas Roch, on ne s'��tonnera pas que la corde du patriotisme, peu �� peu d��tendue, e?t fini par ne plus vibrer. Il faut le r��p��ter pour l'honneur de la nature humaine, Thomas Roch ��tait, �� cette heure, frapp�� d'inconscience. Il ne se survivait intact que dans ce qui se rapportait directement �� son invention. L��-dessus, il n'avait rien perdu de sa puissance g��niale. Mais en tout ce qui concernait les d��tails les plus ordinaires de l'existence, son affaissement moral s'accentuait chaque jour et lui enlevait la compl��te responsabilit�� de ses actes.
Thomas Roch fut donc ��conduit. Peut-��tre alors e?t-il convenu d'emp��cher qu'il portat son invention autre part... On ne le fit pas, et ce fut un tort.
Ce qui devait arriver, arriva. Sous une irritabilit�� croissante, les sentiments de patriotisme, qui sont de l'essence m��me du citoyen, -- lequel avant de s'appartenir appartient �� son pays, -- ces sentiments s'��teignirent dans l'ame de l'inventeur d��?u. Il songea aux autres nations, il franchit la fronti��re, il oublia l'inoubliable pass��, il offrit le Fulgurateur �� l'Allemagne.
L��, d��s qu'il sut quelles ��taient les exorbitantes pr��tentions de Thomas Roch, le gouvernement refusa de recevoir sa communication. Au surplus, la Guerre venait de mettre �� l'��tude la fabrication d'un nouvel engin balistique et crut pouvoir d��daigner celui de l'inventeur fran?ais.
Alors, chez celui-ci, la col��re se doubla de haine, -- une haine d'instinct contre l'humanit��, -- surtout apr��s que ses d��marches eurent ��chou�� vis-��-vis du Conseil de l'Amiraut�� de la Grande- Bretagne. Comme les Anglais sont des gens pratiques, ils ne repouss��rent pas tout d'abord Thomas Roch, ils le tat��rent, ils le circonvinrent. Thomas Roch ne voulut rien entendre. Son secret valait des millions, il obtiendrait ces millions, ou l'on n'aurait pas son secret. L'Amiraut�� finit par rompre avec lui.
Ce fut dans ces conditions, alors que son trouble intellectuel empirait de jour en jour, qu'il fit une derni��re tentative vis-��- vis de l'Am��rique, -- dix-huit mois environ avant le d��but de cette histoire.
Les Am��ricains, encore plus pratiques que les Anglais, ne marchand��rent pas le Fulgurateur Roch, auquel ils accordaient une valeur exceptionnelle, ��tant donn�� la notori��t�� du chimiste fran?ais. Avec raison, ils le tenaient pour un homme de g��nie, et prirent des mesures justifi��es par son ��tat -- quitte �� l'indemniser plus tard dans une ��quitable proportion.
Comme Thomas Roch donnait des preuves trop visibles d'ali��nation mentale, l'administration, dans l'int��r��t m��me de son invention, jugea opportun de l'enfermer.
On le sait, ce n'est point au fond d'un hospice de fous que fut conduit Thomas Roch, mais �� l'��tablissement de Healthful-House, qui offrait toute garantie pour le traitement de sa maladie. Et, cependant, bien que les soins les plus attentifs ne lui eussent point manqu��, le but n'avait pas ��t�� atteint jusqu'�� ce jour.
Encore une fois, -- il y a lieu d'insister sur ce point, -- c'est que Thomas Roch, si inconscient qu'il f?t, se ressaisissait lorsqu'on le remettait sur le champ de ses d��couvertes. Il s'animait, il parlait avec la fermet�� d'un homme qui est s?r de lui, avec une autorit�� qui imposait. Dans le feu de son ��loquence, il d��crivait les qualit��s merveilleuses de son Fulgurateur, les effets vraiment extraordinaires qui en r��sulteraient. Quant �� la nature de l'explosif et du d��flagrateur, les ��l��ments qui le composaient, leur fabrication, le tour de main qu'elle n��cessitait,
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