qui dura longtemps encore apr��s que le musicien e?t fini de jouer.
?En voici assez pour cette fois?, dit Liang, surpris de la profonde impression ��prouv��e par son disciple.
Pendant dix jours, le ma?tre ne fit entendre �� son ��l��ve que la m��me m��lodie et l'��l��ve s'exer?a �� la jouer apr��s lui.
?Votre jeu ne diff��re pas du mien,? lui dit alors Liang; ?il est temps que vous vous exerciez sur une autre mode.?
?Votre humble disciple,? r��pondit Confucius, ?ose vous demander de le laisser encore ��tudier cette pi��ce; il ne suffit pas de la jouer correctement comme quelqu'un qui suivrait les lignes d'un dessin sans savoir quel objet ce dessin repr��sente. Je voudrais trouver le sens de cette m��lodie, p��n��trer l'id��e du compositeur, et j'avoue que malgr�� mes efforts, je n'ai pas encore r��ussi.?
?Bien,? dit le Ma?tre, ?je vous donne cinq jours pour ��claircir cette question.?
Ce terme expir��, Confucius se pr��senta devant Liang.
?Je commence �� distinguer confus��ment l'ame de cette musique, comme on voit les objets mal ��clair��s encore dans les brumes de l'aube,? dit-il: ?le jour n'est pas venu tout �� fait, donnez-moi cinq jours encore, et si je n'ai pas atteint encore le but que je me propose, je me regarderai comme indigne de m'occuper de musique.? Le d��lai f?t accord��, et cinq jours apr��s, Confucius revint aupr��s de son ma?tre avec un visage rayonnant.
?J'ai trouv�� enfin, ce que j'ai si longtemps cherch��,? s'��cria-t-il. ?Je suis comme un homme qui a gravi p��niblement une haute montagne, et d��couvre enfin tout le pays environnant. �� force d'attention et de persistance, je suis parvenu �� d��couvrir dans cette pi��ce de musique antique, l'intention de celui qui l'a compos��e; tous les sentiments par lui ��prouv��s, je les ��prouve moi-m��me, en jouant l'oeuvre dans laquelle il les a enferm��s. Il me semble que je vois le compositeur, que je l'entends, que je lui parle. Il m'appara?t comme un homme d'une taille moyenne, dont le visage un peu long est d'une couleur qui tient le milieu entre le blanc et le brun. Ses yeux sont grands et pleins de douceur, sa contenance est noble, sa voix sonore, toute sa personne respire la vertu, et commande le respect. Cet homme, j'en suis certain, c'est l'illustre et sage empereur Wen-Wang.? En entendant cela Liang se prosterna devant Confucius.
?C'est en effet Wen-Wang qui est l'auteur de cette musique,? dit-il; ?votre p��n��tration me comble d'��tonnement, vous n'avez rien �� apprendre de moi, vous ��tes un sage et j'aspire �� l'honneur d'��tre votre disciple.?
Cette sc��ne singuli��re, n'est-elle pas des plus surprenantes? M��me aujourd'hui, songerait-on �� attribuer �� la musique une aussi compl��te pr��cision?
Quelle pouvait donc ��tre cette pi��ce de musique sur laquelle le philosophe, dont la sagesse et l'intelligence sont universellement admir��es, passa de si longues heures �� m��diter? On ne peut croire qu'elle n'ait eu aucun rapport avec les m��lodies monotones qui constituent aujourd'hui la musique chinoise.
Une autre fois, Confucius e?t connaissance d'un morceau de musique compos�� sous le r��gne de Chun, c'est-��-dire mille sept cents ans avant le temps o�� vivait le philosophe. C'��tait �� la cour du roi de Tsi, lorsque Confucius entra au palais pour ��tre pr��sent�� au souverain; ce prince assistait �� un concert dans lequel on ex��cutait ce morceau antique. Il avait pour titre: ?Musique qui disperse les t��n��bres de l'Esprit et affermit le coeur dans l'amour du devoir.? Cette fois encore, le philosophe f?t profond��ment ��mu; ?pendant trois mois,? dit-on, ?le souvenir de cette musique occupa seul son esprit, il en perdit le sommeil et l'app��tit.?
Malheureusement, les Chinois n'ayant aucune m��thode pour noter la musique, si ce n'est quelques caract��res tout �� fait insuffisants, les traditions devaient fatalement s'alt��rer et se perdre, et si l'on a pu reconstituer les r��gles anciennes, presque rien n'est rest�� des compositions primitives.
En r��sum��, bien que beaucoup d'obscurit�� enveloppe encore la musique des anciens Chinois, on peut certifier que plusieurs si��cles avant les ��gyptiens et les Grecs, ils poss��daient un syst��me musical parfaitement fixe, tr��s complet, et d'une haute port��e morale.
CHAPITRE V
LA PO��SIE
Un jour, le grand sage Confucius rencontra son fils sur le seuil du pavillon des Livres, et lui dit:
?Mon cher Khong-Li, ��tes-vous bien avanc�� dans l'��tude de la po��sie??
Avec un certain d��dain, l'adolescent r��pondit:
?Je ne m'y adonne pas, mon p��re.?
?Vous avez tort, mon fils. Si vous n'apprenez pas la po��sie, si vous ne vous exercez pas �� faire des vers, dussiez-vous ne devenir qu'un m��diocre po��te, vous ne conna?trez jamais compl��tement votre langue, vous ne saurez pas bien parler.?
Confucius, lui, ��tait po��te. En Chine, la po��sie semble aussi ancienne que la Chine elle-m��me, et comme cela arrive presque toujours, le premier de ses po��tes, ce fut le peuple. Il chantait les vertus de ses souverains, leurs exploits, leurs f��tes, il les blamait aussi quelquefois, et dirigeait contre eux de vives ��pigrammes. De leur c?t��, les empereurs r��pondaient
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