avoir attach�� �� une plume de leur queue la d��p��che qui nous annoncera votre heureuse descente. Quant au troisi��me pigeon, celui ci qui a la t��te brune, c'est un vieux malin que je ne donnerais pas pour cinq cents francs. Il a d��j�� fait de grands voyages. Vous le porterez �� Tours. Ayez-en bien soin. Prenez garde qu'il ne se fatigue en chemin de fer.
Je monte dans la nacelle au moment o�� le canon gronde avec une violence extr��me. J'embrasse mes fr��res, mes amis. Je pense �� nos soldats qui combattent et qui meurent �� deux pas de moi. L'id��e de la patrie en danger remplit mon ame. On attend l��-bas ces ballots de d��p��ches qui me sont confi��s. Le moment est grave et solennel; nul sentiment d'��motion ne saurait plus m'atteindre. Lachez tout!
Me voil�� flottant au milieu de l'air!
* * * * *
Mon ballon s'��l��ve dans l'espace avec une force ascensionnelle tr��s-mod��r��e. Je ne quitte pas de vue l'usine de Vaugirard et le groupe d'amis qui me saluent de la main: je leur r��ponds de loin en agitant mon chapeau avec enthousiasme, mais bient?t l'horizon s'��largit. Paris immense, solennel, s'��tend �� mes pieds, les bastions des fortifications l'entourent comme un chapelet; l��, pr��s de Vaugirard, j'aper?ois la fum��e de la canonnade, dont le grondement sourd et puissant, tout �� la fois, monte jusqu'�� mes oreilles comme un concert lugubre. Les forts d'Issy et de Vanves m'apparaissent comme des forteresses en miniature; bient?t je passe au-dessus de la Seine, en vue de l'?le de Billancourt.
Il est 9 heures 50; je plane �� 1,000 m��tres de haut; mes yeux ne se d��tachent pas de la campagne, o�� j'aper?ois un spectacle navrant qui ne s'effacera jamais de mon esprit. Ce ne sont plus ces environs de Paris, riants et anim��s, ce n'est plus la Seine, dont les bateaux sillonnent l'onde, o�� les canotiers agitent leurs avirons. C'est un d��sert, triste, d��nud��, horrible. Pas un habitant sur les routes, pas une voiture, pas un convoi de chemin de fer. Tous les ponts d��truits offrent l'aspect de ruines abandonn��es, pas un canot sur la Seine qui d��roule toujours son onde au milieu des campagnes, mais avec tristesse et monotonie. Pas un soldat, pas une sentinelle, rien, rien, l'abandon du cimeti��re. On se croirait aux abords d'une ville antique, d��truite par le temps; il faut forcer son souvenir pour entrevoir par la pens��e les deux millions d'hommes emprisonn��s pr��s de l�� dans une vaste muraille! LE C��LESTE.
Il est dix heures; le soleil est ardent et donne des ailes �� mon ballon; le gaz contenu dans le _C��leste_ se dilate sous l'action de la chaleur; il sort avec rapidit�� par l'appendice ouvert au-dessus de ma t��te, et m'incommode momentan��ment par son odeur. J'entends un l��ger roucoulement au-dessus de moi. Ce sont mes pigeons qui g��missent. Ils ne paraissent nullement rassur��s et me regardent avec inqui��tude.
--Pauvres oiseaux, vous ��tes mes seuls compagnons; a��ronautes improvis��s, vous allez d��fier tous les marins de l'air, car vos ailes vous dirigeront bient?t vers Paris, que vous quittez, et nos ballons sauront-ils y revenir?
L'aiguille de mon barom��tre Breguet tourne assez vite autour de son cadran, elle m'indique que je monte toujours..., puis elle s'arr��te au point qui correspond �� une altitude de 4,800 m��tres au-dessus du niveau de la mer.
Il fait ici une chaleur vraiment insupportable: le soleil me lance ses rayons en pleine figure et me br?le; je me d��salt��re d'un peu d'eau. Je retire mon paletot, je m'assieds sur mes sacs de d��p��ches, et le coude appuy�� sur le bord de la nacelle, je contemple en silence l'admirable panorama qui s'��tale devant moi.
Le ciel est d'un bleu indigo; sa limpidit��, son ton chaud, color��, me feraient croire que je suis en Italie; de beaux nuages argent��s planent au-dessus des campagnes; quelques-uns d'entre eux sont si loin de moi, qu'ils paraissent mollement se reposer au-dessus des arbres. Pendant quelques instants, je m'abandonne �� une douce r��verie, �� une muette contemplation, charme merveilleux des voyages a��riens: je plane dans un pays enchant��, monde abandonn�� de tout ��tre vivant, le seul o�� la guerre n'ait pas encore port�� ses maux! Mais la vue de Saint-Cloud que j'aper?ois �� mes pieds, sur l'autre rive de la Seine, me ram��ne aux choses d'en bas. Je me reporte vers la r��alit��, vers l'invasion. Je jette mes regards du c?t�� de Paris, que je n'entrevois plus que sous une mousseline de brume.
Une profonde tristesse s'empare de moi; j'��prouve la sensation du marin qui quitte le port pour un long voyage. Je pars; mais quand reviendrai-je? Je te quitte, Paris; te retrouverai-je? Comment d��finir ces pens��es qui se heurtent confus��ment dans mon cerveau? C'est l��-bas, au milieu de ce monceau de constructions, de ce labyrinthe de rues et de boulevards, que j'ai vu le jour; c'est sous cette
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