immense
débouché; combien, enfin, le trésor public, par la perception du droit de
cinq pour cent indépendamment du nombre des lettres nouvelles qui
accompagneraient l'établissement du nouveau service et que nous
supposons devoir être considérable!
Or, maintenant, que l'on veuille donc considérer le service des postes
comme un élément de prospérité sociale ou financière, on sera conduit
à conclure qu'il laisse quelque chose à désirer, tant que l'administration
investie du privilége ne transporte pas l'universalité des lettres que les
particuliers ont intérêt à écrire.
Et ce résultat peut être amené par deux causes, soit que l'administration
ne puisse les transporter assez fréquemment ou assez rapidement, soit
qu'elle ne les transporte pas à assez bon marché.
Nous avons vu que, dans le cours des vingt années qui viennent de
s'écouler, l'administration des postes avait multiplié le nombre de ses
courriers et accéléré la marche des lettres par les divers moyens qui
étaient en son pouvoir. Elle a fait le service journalier en 1828, le
service rural en 1829; plus récemment encore, elle a régularisé la
marche des correspondances sur divers points, et elle a multiplié le
nombre des bureaux de poste: toutes choses qui tendaient à ce résultat,
d'augmenter le nombre des lettres en circulation. Cependant, nous ne
pensons pas qu'on écrive à beaucoup près encore en France autant
qu'on pourrait écrire; l'accroissement du nombre des lettres devrait être
plus grand.
Plusieurs causes, en effet, depuis plus de quinze ans, semblent
concourir en France à l'augmentation des correspondances; l'instruction
primaire plus généralement propagée, l'accroissement de la population,
la division des fortunes, les entreprises industrielles de toutes sortes, le
commerce plus répandu, mais aussi plus partagé, moins productif
peut-être pour chacun, mais exigeant des efforts plus constants et une
activité plus grande de la part de tous; enfin, tout, dans l'état actuel du
pays, paraît devoir concourir à augmenter le nombre des lettres et les
produits de poste. Nous avons indiqué, il est vrai, et indiquerons bientôt
encore quelques améliorations importantes à faire dans le service, en ce
qui touche la réception des dépêches et la distribution des lettres; car il
ne suffit pas que les courriers marchent vite, si les agents des postes ne
sont pas en mesure de distribuer les lettres avec une égale rapidité; mais,
en somme, le principal obstacle à l'augmentation du nombre des lettres
nous paraît résulter beaucoup moins de l'exploitation du service en
général que de l'élévation du tarif, et peut-être aussi des formes et des
proportions d'après lesquelles ce tarif est appliqué.
Il faut certainement qu'un service public soit exact et rapide, et qu'il se
trouve en tout lieu sous la main de celui qui a intérêt à l'employer; mais,
pour être universellement adopté, il faut encore qu'il soit offert à bon
marché.
Le prix du port des lettres est trop élevé en France, et le fait peut être
démontré sous le rapport moral, comme sous le rapport financier.
En effet, on peut remarquer que le transport des personnes et des
marchandises en France se rencontre à tout prix; chaque besoin, chaque
fortune en trouve à sa portée. Le service des postes, qui est l'objet d'un
besoin plus fréquemment senti, le plus impérieux peut-être après celui
des choses de première nécessité, est au même prix pour tous; il est
donc juste et moral qu'il soit fixé au plus bas prix possible.
Supposons un ouvrier venant du département de l'Ariège s'employer à
Paris: il lui sera presque interdit, dans l'ordre de choses actuel, de
communiquer avec sa famille; car le port d'un franc dont sera frappée
sa lettre, à chaque fois qu'il écrira, représentera la journée de travail de
son père ou de son frère[14].
[Note 14: Si un franc pour un ouvrier représente, par exemple, une
demi-journée de travail en France, le paiement de la taxe d'une lettre
sera pour lui une dépense égale à celle de 137 fr., pour un particulier
qui jouirait d'un revenu de 10,000 fr., par an. Cependant, demandez une
somme de 137 fr., pour le transport d'une lettre, à un propriétaire ou à
un industriel, comme une taxe au marc le franc de son revenu de 274 fr.,
par jour, et vous entendrez sans doute de très-vives réclamations. Elles
seraient justes, mais celles de l'ouvrier le seront au même titre jusqu'à
ce que la taxe soit réduite au prix réel du service rendu.
Cependant les personnes qui ont occasion de juger des progrès moraux
des jeunes gens de cette classe, savent que, lorsque le fils devient
négligent à correspondre avec sa famille, lorsque la fille, éloignée de sa
mère, cesse de lui écrire régulièrement, quand ses lettres deviennent
courtes et rares, la démoralisation de l'absent est un fait sinon accompli,
au moins très-prochain, et la société (dit un auteur anglais) qui tient en
réserve les travaux forcés pour le commis dépositaire infidèle,
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