terre est en raison de l'évaporation de leurs surfaces.
[15] On objectera que c'est le bon marché du travail, bien plus que sa
quantité absolue, qui est important pour le propriétaire; c'est le plus
grand bénéfice qu'il doit chercher. Il faut donc prouver encore que le
travail de l'esclave est plus coûteux que celui du cultivateur salarié. Le
Nègre, dont j'ai évalué le travail à 1200 livres, vaut au moins 3000
livres. L'intérêt de cette somme compté à 8 pour cent dans les colonies,
les risques de remplacements 5 pour cent font ensemble 13 pour cent
ou 390 livres; si on y ajoute 110 livres seulement pour l'entretien et la
nourriture, on trouvera que chaque esclave, bon travailleur, coûte au
moins 500 livres, tandis que le prix d'un journalier en France n'est que
de 300 à 350 livres, pour son travail annuel.
[16] _Caeteris servis non in nostrum morem descriptis per familiam
ministeriis utuntur. Suam quisque sedem, suos penates regit. Frumenti
modum dominus, aut pecoris, aut vestis, ut colono, injungit, et servus
hactenus paret._ Tacite, de mor. Germ.; c'est le premier degré
d'affranchissement que je propose.
[17] Par arrêt du conseil, du 29 Décembre 1776, j'avois obtenu une
concession du terrein situé dans la Guyanne, entre les rivières d'Oyac et
d'Aprouague, ce qui occupe une étendue d'environ 250 lieues quarrées,
et voici ce que je demandois. «Que tous les esclaves de la Guyanne
eussent un pécule assuré et constant, et qu'il fût loisible aux habitants,
comme à la compagnie que je formois, de changer l'esclavage pur et
simple en servage de glèbe». Ce sont les termes d'un mémoire que je
remis alors au ministre de la marine.
[18] Rousseau, du gouvernement de Pologne.
[19] C'est ce que les Romains appelloient adscripririos seu addictos
glebae. Les addicti glebae étoient des serfs qui demeuroient attachés à
la glèbe. Les adscripti glebae étoient des fermiers qui cultivoient en
payant des redevances. Lorsque les Francs, dit Loiseau, conquirent les
Gaules, ils réduisirent les naturels du pays à la servitude de glèbe. Le
grand inconvénient de ces loix, ou plutôt leur injustice, étoit de ne pas
prescrire des moyens d'affranchissement. La cupidité et la tyrannie y
ajoutèrent successivement des dispositions vraiment barbares.
[20] Voici un chapitre de Montesquieu, qui fera mieux entendre encore
la nature du servage que je propose. «L'esclavage de glèbe s'établit
quelquefois après une conquête. Dans ce cas l'esclave qui cultive doit
être le colon partiaire du maître. Il n'y a qu'une société de perte et de
gain qui puisse réconcilier ceux qui sont destinés à travailler, avec ceux
qui sont destinés à jouir». Esp. des loix, liv. XIII, chap. 3.
[21] Je crois pouvoir prouver que le revenu particulier seroit augmenté
dans le nouveau système de culture que je propose: mais quand il seroit
un peu diminué, la réparation d'une grande injustice exigeroit bien ce
sacrifice.
Une habitation en sucre terré ayant 80 carreaux en cannes, 120 qui
peuvent être plantés, et 100 en savannes ou prairies et mornes,
évaluée................................................ 1,400,000 l.
Ayant un attelier de 250 Nègres estimés à 2000 liv. ensemble 500,000
liv. donne un produit de 300,000 liv. de sucre: ces 300,000 liv. à 50 le
cent donnent..................... 150,000 l.
Les dépenses....................... 40,000 ---------
Reduisent le produit à............. 110,000 l. ---------
Si les 250 Nègres s'affranchissent, ils paieront les 3/4 de leur
valeur..................................... 375,000 Nous avons évalué
l'habitation........................... 1,400,000 ----------
Le capital est réduit à.................................. 1,025,000 l. ----------
Dans ce nouvel état de culture, le produit sera au moins doublé et porté
à........... 300,000 l. La moitié du maître sera de......... 150,000 l. La
dépense réduite à................. 15,000 --------- Le revenu sera
de................... 135,000 l. ---------
Ou plus de 13 pour cent, tandis qu'il n'étoit que de 8 pour cent à peu
près. Les serfs de glèbe, au lieu du produit de leurs jardins et de 25000
liv. pour leur entretien, auront également le produit de leurs jardins,
dont ils pourront disposer, et un revenu de 500 l. par tête.
Depuis que j'ai écrit ces feuilles, j'ai lu, dans le courrier de l'Europe, vol.
23, n°. 25, un mémoire, présenté en 1779 et en 1785 par M. le chevalier
de Laborie, lieutenant-colonel d'infanterie, sur les moyens de donner la
liberté aux esclaves en Amérique. Les mêmes principes nous ont guidés;
mais les moyens d'affranchissement, que j'avois proposés en 1776 au
gouvernement, et que je publie aujourd'hui, sont différents. M. de
Laborie parle d'une sucrerie qu'il vouloit établir à la Tortue. Il étoit
convenu, dit-il, qu'un habitant se chargeroit des frais d'établissement, en
payant seulement aux cultivateurs la moitié du prix du sucre; et il avoit
calculé que chaque cultivateur aurait, au delà de ses dépenses, un
bénéfice de 5 à 600 livres.
[22] Il est impossible de suivre tous les égarements de l'intérêt
particulier. Personne n'a répondu avec plus de

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