que des faits; et c'est une grande
leçon que l'Angleterre donnera encore, si elle punit les coupables, quels
que soient d'ailleurs leurs titres et leurs services, et si par des loix de
bienfaisance elle adoucit le sort des peuples opprimés.
[2] Louis XIII ne vouloit point d'esclaves: mais on lui persuada qu'on
ne pouvoir convertir les Africains qu'en les chargeant de chaînes.
Malheur aux hommes qui abusent ainsi de la foiblesse des rois!
[3] Dès 1503 on porta quelques Nègres dans les colonies. On voit dans
l'histoire navale de Hill, qu'Elisabeth voulut s'opposer à ce commerce;
elle donna des ordres pour qu'on ne transportât aucun Nègre d'Afrique
qu'il n'eût donné son libre consentement. Elle disoit que _toute violence
à cet égard seroit détestable et attirerait la vengeance du ciel sur ceux
qui s'en rendraient coupables_. La soif de l'or l'emporta bientôt sur le
cri de la justice. Les Génois, les Portugais, les François et les Anglois
se disputèrent tour à tour l'avantage barbare de fournir des esclaves.
[4] M. Cooper, dans ses lettres sur le commerce des Nègres, publiées en
Angleterre, évalue les esclaves des nations commerçantes de la manière
suivante.
Aux Anglois et aux Américains ........................... 1,500,000 Aux
François ............................................ 400,000 Aux
Espagnols ........................................... 2,500,000 Aux
Portugais ........................................... 1,000,000 Aux Hollandais et aux
Danois ............................ 100,000 ----------- 5,500,000 -----------
Ce calcul n'est pas exact pour les François: ils possèdent environ
550000 esclaves; et je crois qu'on peut porter à 6000000 les Nègres
esclaves des colonies.
Le nombre des esclaves, traités chaque année, s'élève à plus de 100000.
Voici un des dernier états de traite, depuis le Cap blanc jusqu'à New
Congo.
Par les Anglois ............................................ 53,100 Par les Etats
unis ......................................... 6,300 Par les
François ........................................... 23,500 Par les
Hollandois ......................................... 11,300 Par les
Portugais .......................................... 8,700 Par les
Danois ............................................. 1,200 --------- 104,100 ---------
Qui ont été achetés au prix moyen de 360 livres.
[5] J'aurois voulu présenter l'effrayant tableau de la dépopulation que ce
commerce cause à l'Afrique: mais les éléments manquent pour en
calculer exactement l'influence désastreuse. Pour s'en faire une idée, on
doit remarquer que les Nègres qu'on traite sont tous dans la force de
l'âge. Ils ont passé les dangers de l'enfance, et il sont loin encore des
accidents qui menacent le déclin de la vie. C'est à l'instant de leur plus
grande reproduction qu'on les enlève à leur patrie. Réduisons les
100000 qu'on exporte à 97500 à cause de leur mortalité naturelle
estimée dans la proportion de 1 à 40. Ces 97500 représenteront un
fonds de population de 3800000 individus détruits pour l'Afrique dans
l'espace de 30 ans. Si on adopte la proportion de 1 à 30, qui paroît la
plus vraie pour déterminer le nombre commun des morts, relativement
à la masse des hommes existants, enlever à la population une classe
d'hommes dans l'âge où la mortalité n'est que comme 1 à 40, c'est
détruire réellement une plus grande masse d'habitants; car 100000
individus, pris dans toutes les classes ne représentent que 3000000 de
population, tandis que pris dans l'adolescence et la vigueur de l'âge, ces
100000 représentent une population de 4000000, ou de 3800000 en
déduisant, comme j'ai fait, ceux que la mort naturelle détruiroit
indépendamment de la traite. Si à ces 3800000 on ajoute le nombre des
malheureux qui expirent dans les combats livrés pour enlever des
esclaves, ceux qui périssent de misère, de fatigue et de désespoir, on
verra que la masse de population anéantie par la traite dans l'espace de
30 ans, s'élève à plus de 4800000 individus, et qu'ainsi ce commerce
cruel coûte chaque année à l'Afrique plus de 160000 de ses habitants.
[6] Il semble que quelques historiens ont cherché à effacer le souvenir
de ces révoltes. Voilà comment on écrit l'histoire. Spartacus avoit un
grand caractère, et s'il avoir pu arrêter la licence de ses compagnons
d'armes, il aurait vengé l'univers.
[7] Ecoutez Montesquieu, «il n'est pas vrai qu'un homme libre puisse se
vendre. La vente suppose un prix: l'esclave se vendant, tous ses biens
entreroient dans la propriété du maître le maître ne donneroit rien, et
l'esclave ne recevroit rien, etc.» Esprit des loix, liv. XV, chap 2.
«Les mots esclavage et droit sont contradictoires: ils s'excluent
mutuellement». Rousseau, contrat social, liv. I, chap. 4.
[8] Les Lacédémoniens fustigeoient leurs esclaves à certaines époques
de l'année, uniquement pour faire sentir à ces infortunés le poids de leur
servitude. Plus d'une fois, dans nos colonies, des maîtres cruels se sont
fait un spectacle des coups de fouet dont ils déchiroient leurs Nègres.
[9] Dans les colonies Espagnoles, chaque esclave a un jour par semaine
où il travaille pour son compte. Ce moyen est dangereux, et c'est
souvent à la débauche que l'esclave consacre les moments qui lui sont
accordés. Dans les colonies Espagnoles, les affranchis sont presque

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