De profundis! - Episode Maritime | Page 4

Carolus
Non, non; bien au contraire, puisque je te demandais son bonheur. Je t'ai dit de la rendre heureuse..., je me suis figur�� un instant que tu ��tais le seul homme capable de le faire.... Tu vois bien que je me suis tromp��, puisqu'en voil�� un autre, plus capable que toi, mon brave.... Marie-les donc, Talbot, j'efface ta promesse.--Pour s?r qu'il dirait cela. Et n'est-ce pas moi le seul coupable, mes enfants? Moi, qui aurais d? voir plus t?t que vous vous aimiez?... Me pardonnerez-vous?...
Pleurant et riant �� la fois, Raymond et Jeanne l'interrompirent sous leurs baisers:
--Allons, mes enfants, qu'on s'embrasse devant moi, et qu'on se pardonne les vilaines paroles que j'ai entendues tout �� l'heure....
Ce fut le baiser des fian?ailles.
--Dans quinze jours la noce,--conclut le pilote en se frottant all��grement les mains,--tout juste le temps de publier les bans!...

IV
Talbot alla reprendre son poste de ?guetteur? au bout de la jet��e. La nuit devait ��tre terrible.... Ce fut celle du 26 Mars 1882.
Raymond et quelques matelots se joignirent au pilote.
Il y avait l�� l'��lite des lamaneurs havrais: tous appartenaient �� l'��quipe des bateaux de sauvetage arm��s, d��s la veille, en pr��vision d'un embarquement pr��cipit��.
Cette r��union d'hommes r��solus, pr��ts �� se d��vouer �� la moindre alerte, offrait un spectacle des plus majestueux. Toutes ces figures rudes, grandies par le m��pris du danger, auraient pu braver la comparaison avec ces h��ros de Lac��d��mone ou de Rome, pour qui la pens��e du devoir ��tait ins��parable de l'id��e d'honneur et de patrie.... Leur ��pop��e e?t ��t�� digne de la lyre des antiques Hom��rides!... Victimes sublimes du devoir! dont la noble devise: ?Sauver ou P��rir?, fait soudain battre le coeur: je vous salue!
Le Croisey, Le Pr��vost, Dessoyers, Le Blanc, Cardine, Moncus, M��n��l��on, Fossey, Varescot, Ollivier, Jacquot.... Phalange incomparable! Que n'ai-je, au lieu d'une plume, le ciseau qui grave le souvenir des grands hommes au fronton des Panth��ons!
Tous ��taient l��. Pas un ne songea �� d��serter, f?t-ce une seconde, ce champ d'��pouvante....
Assis au milieu d'eux, Raymond ne pensait plus �� la temp��te. Il ne songeait plus aux dangers qui pouvaient, �� chaque instant, s'offrir en lutte au courage de ces hommes ��nergiques.
Son esprit ��tait rest�� enferm�� dans la chambrette, chaste nid de sa fianc��e, o��, sans doute, elle r��vait �� lui.... Avec quelle joie d��licieuse ne retournerait-il pas, d��s le matin, pr��s d'elle!... quelles douces phrases s'��changeraient entre eux!... Il pourrait maintenant, sans scrupule, garder dans les siennes les petites mains de sa bien-aim��e et,--qui l'en blamerait?--appuyer ses l��vres contre les l��vres roses de sa Jeanne! Et pendant que ses compagnons attendaient le jour pour mieux interroger l'horizon et braver plus s?rement cette mer sinistre, le jeune matelot aspirait apr��s l'aube pour voler pr��s de celle �� qui son coeur pourrait enfin s'ouvrir tout entier....
Pour tous, cette nuit-l�� fut un si��cle. Un large soupir de satisfaction s'��chappa de chaque poitrine quand apparurent les premi��res lueurs du matin, retard��es par l'��tat brumeux de l'atmosph��re.
Ces braves, qu'une nuit sans sommeil n'avait pu vaincre, sortirent en troupe du s��maphore et se pr��cipit��rent sur la jet��e.
La mer ��tait horrible �� voir. Des montagnes d'eau d��ferlaient �� chaque instant au-dessus de la rotonde, ��branlaient la ma?onnerie, et venaient rouler avec un fracas assourdissant jusqu'au pied du s��maphore, d'o�� nos intr��pides sauveteurs sortaient, fr��missants d'h��ro?sme.... Ces vagues gigantesques auraient terrass�� des hommes ordinaires; elles ��branl��rent �� peine ces vaillants, habitu��s �� lever le front devant la temp��te.
Raymond les avait suivis. Cette fi��vre h��ro?que, qu'il partageait maintenant, arrachait son esprit aux pens��es de bonheur qui l'avaient assailli dans la nuit.--Plus avanc�� m��me que les autres, sur cette jet��e o�� chaque pas augmentait les p��rils, il regardait au loin et cherchait �� percer l'��tendue encore sombre, serrant les poings comme s'il e?t voulu imposer le silence au monstre qui se tordait devant lui.
Tout �� coup sa main s'��tendit vers l'horizon. Le jour plus grand permit de voir, dans la direction qu'il indiquait, un navire qui luttait avec d��faillance contre les vagues. Au grand mat, un pavillon s'agitait convulsivement.
--Au canot! au canot!--cria aussit?t le patron Le Croisey. Tous se pr��cipit��rent �� l'envi du c?t�� de l'avant-port.
Raymond courait en avant. Au moment o��, emport�� par sa course, il d��passait la maison de Talbot, un cri lui fit tourner la t��te. Debout sur le seuil, Jeanne lui tendait des mains suppliantes.
Le jeune matelot s'arr��ta court. Les autres pass��rent sans rien voir.
Jeanne s'��tait pr��cipit��e vers lui. Il la re?ut dans ses bras.
Raymond, tu n'iras pas.... C'est la mort, et je ne veux pas, moi, que tu meures!
Le visage du matelot devint livide:
--Oh! Jeanne, laisse-moi,--supplia-t-il;--les camarades s'embarquent.... Ils vont m'oublier!...
Et, fou d'h��ro?sme, il voulut s'arracher aux bras nou��s �� son cou. Il entra?nait la jeune fille avec lui, et Jeanne sentait ses forces l'abandonner, bien que la terreur les e?t d��cupl��es, quand un hourra prolong�� ��branla l'air. C'��tait le canot
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