plusieurs, tantôt amples et minutieux, comme ceux du registre des
Malliard, tantôt plus modestes et plus sommaires, comme ceux du livre
de Pierre Esperon. Il y a, dans les notes relatives aux arrangements de
famille, des détails extrêmement précieux sur certains bijoux, certains
objets rares. Les contrats de mariage, qu'on trouve à chaque pas,
fournissent le plus souvent des indications sur le trousseau de la femme,
l'étoffe qui fournit ses vêtements, ceux de fête tout au moins, leur
couleur, leur valeur, etc.
Auprès des inventaires, il faut noter les mentions relatives aux prêts.
On a toujours beaucoup emprunté; mais la forme des emprunts n'a pas
moins varié que celle des chapeaux. Autrefois, on prêtait le plus
souvent sur gage. Fait bizarre: le prêt sur gage mobilier nous répugne
aujourd'hui alors que l'obligation hypothécaire n'a rien qui choque notre
délicatesse. Nos pères connaissaient l'hypothèque, l'obligation, la
reconnaissance, et cependant ils usaient fort de l'engagement. Le
cabinet de certains riches bourgeois d'autrefois était un véritable
mont-de-piété en miniature. Un père de famille se trouvait-il à court
d'argent, il allait tout bonnement chez son voisin, lui remettait un ou
plusieurs des objets de prix qui ornaient sa maison, des bijoux qu'il
cachait au fond de ses coffres, et il recevait en échange les espèces
monnayées dont il avait besoin. Quand ses propres débiteurs le
remboursaient, que ses métayers lui remettaient le montant de la vente
d'un boeuf ou d'un lot de moutons, il s'acquittait, reprenait son gage et
tout le monde trouvait la chose la plus naturelle et la plus légitime du
monde, puisque tout le monde usait couramment de ce mode de crédit.
Félicitons-nous de la persistance de cet usage: grâce à lui, nombre de
livres de raison conservent l'indication, parfois même une description
sommaire de beaucoup d'objets intéressants. On connaissait ce que
renfermèrent les trésors des églises, les garde-meubles et les coffres des
argentiers des princes; mais qui aurait jamais, sans le secours de nos
manuscrits, plongé le regard dans les boîtes et les tiroirs les plus
intimes de nos ancêtres, et connu l'opulence de leurs trésors
domestiques? Le mot d'opulence n'est pourtant pas trop fort. Jugez-en
par quelques articles pris au hasard dans les cahiers des Péconnet (XVe
au XVIIe siècle). Nous y voyons figurer un «estuy de miroir esmaillé»;
des «crochets d'or et de perles»; une «cordelière d'or esmaillé»; un
«reliquaire d'or»; plusieurs «demi-ceints» d'argent; un «pendant d'or et
vitres»; des «aiguières et salières d'argent»; des «enseignes d'or
esmaillé»; «des chandeliers, des flambeaux et un coquemard d'argent,
etc.»
La vaisselle d'argent fait son apparition non seulement dans les relevés
de cette nature, mais aussi dans les notes concernant les partages de
famille, aux registres des Texendier de l'Aumosnerie, notamment
(1636-1703). On trouve des cuillers et des gobelets d'argent «façon de
Limoges» chez les Péconnet, qui appartenaient à une famille d'orfèvres;
mais ces derniers se servaient surtout, comme la plupart des riches
bourgeois de leur temps, de vaisselle d'étain fin. L'un d'eux, Jean
Péconnet (1644-1678), donne complaisamment le détail d'un service de
ce Genre qu'il a acheté à Paris, lors d'un de ses voyages. Toutes les
pièces sont à ses armes et portent en outre ses initiales. Qu'on juge si
cette vaisselle est soigneusement conservée et si on prend des
précautions pour la garantir contre la négligence ou la brutalité des
domestiques. Le maître de maison inventorie du reste tout ce qui est
laissé à la disposition de ces derniers. C'est ainsi que le sieur Beynes,
de Meymac (milieu du XVIIe siècle), note le nombre exact d'assiettes,
plats, écuelles remis par lui à sa servante pour les besoins journaliers du
ménage et dont elle lui devra compte au bout de l'année.
Que dirons-nous du chapitre des achats et des cadeaux? Sous ce rapport,
Le Journal d'Élie de Roffignac (1588-89) est sans contredit un des
manuscrits les plus intéressants qui nous soient passés par les mains. La
note des dépenses quotidiennes du gentilhomme nous apprend ce qu'il
mange, comment il s'habille, comment il s'éclaire. Nous le voyons faire
demander au boucher tantôt une «longe de velle», tantôt un «gigot de
porc» ou «la moitié d'un mouton». Parfois il envoie un de ses
domestiques à Brive ou à Tulle pour acheter une demi-douzaine
d'oranges, des amandes, du riz, du sucre, des épices, du gibier: bécasses,
lièvres et perdrix, pour les jours de gala; des oeufs, de la morue ou des
harengs pour les jours d'abstinence. De temps en temps le Journal
enregistre l'achat d'un paquet de chandelles, de 8, 10 ou 12 livres en
général; ailleurs on note des gants, des chaussures, des rubans, cinq
sous d'aiguilles, six milliers d'épingles, des matières pour faire de
l'encre, une écritoire, un étui de lunettes, des colliers de lévriers, des
drogues, des étriers, de la toile, de la passementerie. L'excellent
seigneur va rendre visite à l'évêque de
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