David Copperfield - Tome I | Page 9

Charles Dickens
coucher. Plus j'avais envie de dormir, plus Peggotty me semblait devenir immense et prendre des proportions d��mesur��es. J'��carquillais les yeux tant que je pouvais: je tachais de les fixer constamment sur Peggotty qui causait assid?ment; j'examinais le petit bout de cire sur lequel elle passait son fil, et qui ��tait ray�� dans tous les sens; et la petite chaumi��re figur��e qui contenait son m��tre, et sa bo?te �� ouvrage dont le couvercle repr��sentait la cath��drale de Saint-Paul avec un d?me rose. Puis c'��tait le tour du d�� d'acier, enfin de Peggotty elle-m��me: je la trouvais charmante. J'avais tellement sommeil, que si j'avais cess�� un seul instant de tenir mes yeux ouverts, c'��tait fini.
?Peggotty, dis-je tout �� coup, avez-vous jamais ��t�� mari��e?
-- Seigneur! monsieur Davy, r��pondit Peggotty, d'o�� vous vient cette id��e de parler mariage?
Elle me r��pondit si vivement que cela me r��veilla parfaitement. Elle quitta son ouvrage et me regarda fixement, tout en tirant son aiguill��e de fil dans toute sa longueur.
?Voyons! Peggotty, avez-vous ��t�� mari��e? repris-je, vous ��tes une tr��s-belle femme, n'est-ce pas??
Je trouvais la beaut�� de Peggotty d'un tout autre style que celle de ma m��re, mais dans son genre, elle me semblait parfaite. Nous avions dans le grand salon un tabouret de velours rouge, sur lequel ma m��re avait peint un bouquet. Le fond de ce tabouret et le teint de Peggotty me paraissaient absolument semblables. Le velours ��tait doux �� toucher, et la figure de Peggotty ��tait rude, mais cela n'y faisait rien.
?Moi, belle, Davy! dit Peggotty. Ah! certes non, mon gar?on. Mais qui vous a donc mis le mariage en t��te?
-- Je n'en sais rien. On ne peut pas ��pouser plus d'une personne �� la fois, n'est-ce pas, Peggotty?
-- Certainement non, dit Peggotty du ton le plus positif.
-- Mais si la personne qu'on a ��pous��e vient �� mourir, on peut en ��pouser une autre, n'est-ce pas, Peggotty?
-- On le peut, me dit Peggotty, si on en a envie. C'est une affaire d'opinion.
-- Mais vous, Peggotty, lui dis-je, quelle est la v?tre??
En lui faisant cette question, je la regardais comme elle m'avait regard�� elle-m��me un instant auparavant en entendant ma question.
?Mon opinion �� moi, dit Peggotty en se remettant �� coudre apr��s un moment d'ind��cision, mon opinion c'est que je ne me suis jamais mari��e moi-m��me, monsieur Davy, et que je ne pense pas me marier jamais. Voil�� tout ce que j'en sais.
-- Vous n'��tes pas fach��e contre moi, n'est-ce pas, Peggotty?? dis-je apr��s m'��tre tu un instant.
J'avais peur qu'elle ne f?t fach��e, elle m'avait parl�� si brusquement; mais je me trompais: elle posa le bas qu'elle raccommodait, et prenant dans ses bras ma petite t��te fris��e, elle la serra de toutes ses forces. Je dis de toutes ses forces, parce que comme elle ��tait tr��s-grasse, une ou deux des agrafes de sa robe sautaient chaque fois qu'elle se livrait �� un exercice un peu violent. Or, je me rappelle qu'au moment o�� elle me serra dans ses bras, j'entendis deux agrafes craquer et s'��lancer �� l'autre bout de la chambre.
?Maintenant lisez-moi encore un peu des cocodrilles, dit Peggotty qui n'��tait pas encore bien forte sur ce nom-l��, j'ai tant d'envie d'en savoir plus long sur leur compte.?
Je ne comprenais pas parfaitement pourquoi Peggotty avait l'air si dr?le, ni pourquoi elle ��tait si press��e de reprendre la lecture des crocodiles. Nous nous rem?mes �� l'histoire de ces monstres avec un nouvel int��r��t: tant?t nous mettions couver leurs oeufs au grand soleil dans le sable; tant?t nous les faisions enrager en tournant constamment autour d'eux d'un mouvement rapide que leur forme singuli��re les emp��chait de pouvoir suivre avec la m��me rapidit��; tant?t nous imitions les indig��nes, et nous nous jetions �� l'eau pour enfoncer de longues pointes dans la gueule de ces horribles b��tes; enfin nous en ��tions venus �� savoir nos crocodiles par coeur, moi du moins, car Peggotty avait des moments de distraction o�� elle s'enfon?ait assid?ment dans les mains et dans les bras sa longue aiguille �� repriser.
Nous allions nous mettre aux alligators quand on sonna �� la porte du jardin. Nous cour?mes pour l'ouvrir; c'��tait ma m��re, plus jolie que jamais, �� ce qu'il me sembla: elle ��tait escort��e d'un monsieur qui avait des cheveux et des favoris noirs superbes: il ��tait d��j�� revenu de l'��glise avec nous le dimanche pr��c��dent.
Ma m��re s'arr��ta sur le seuil de la porte pour m'embrasser, ce qui fit dire au monsieur que j'��tais plus heureux qu'un prince, ou quelque chose de ce genre, car il est possible qu'ici mes r��flexions d'un autre age aident l��g��rement �� ma m��moire.
?Qu'est-ce que cela veut dire?? demandai-je �� ce monsieur par- dessus l'��paule de ma m��re.
Il me caressa la joue; mais je ne sais pourquoi, sa voix et sa personne ne me plaisaient nullement, et j'��tais tr��s-fach�� de voir que sa
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