David Copperfield - Tome I | Page 8

Charles Dickens
connais nulle part de gazon aussi vert que le gazon de ce cimeti��re; il n'y a rien de si touffu que ces arbres, rien de si calme que ces tombeaux. Chaque matin, quand je m'agenouille sur mon petit lit pr��s de la chambre de ma m��re, je vois les moutons qui paissent sur cette herbe verte; je vois le soleil brillant qui se refl��te sur le cadran solaire, et je m'��tonne qu'avec cet entourage fun��bre il puisse encore marquer l'heure.
Voil�� notre banc dans l'��glise, notre banc avec son grand dossier. Tout pr��s il y a une fen��tre par laquelle on peut voir notre maison; pendant l'office du matin, Peggotty la regarde �� chaque instant pour s'assurer qu'elle n'est ni br?l��e ni d��valis��e en son absence. Mais Peggotty ne veut pas que je fasse comme elle, et quand cela m'arrive, elle me fait signe que je dois regarder le pasteur. Cependant je ne peux pas toujours le regarder; je le connais bien quand il n'a pas cette grande chose blanche sur lui, et j'ai peur qu'il ne s'��tonne de ce que je le regarde fixement: il va peut-��tre s'interrompre pour me demander ce que cela signifie. Mais qu'est-ce que je vais donc faire? C'est bien vilain de bailler, et pourtant il faut bien faire quelque chose. Je regarde ma m��re, mais elle fait semblant de ne pas me voir. Je regarde un petit gar?on qui est l�� pr��s de moi, et il me fait des grimaces. Je regarde le rayon de soleil qui p��n��tre sous le portique, et je vois une brebis ��gar��e, ce n'est pas un p��cheur que je veux dire, c'est un mouton qui est sur le point d'entrer dans l'��glise. Je sens que si je le regardais plus longtemps, je finirais par lui crier de s'en aller, et alors ce serait une belle affaire! Je regarde les inscriptions grav��es sur les tombeaux le long du mur, et je tache de penser �� feu M. Bodgers, natif de cette paroisse, et �� ce qu'a d? ��tre la douleur de Mme Bodgers, quand M. Bodgers a succomb�� apr��s une longue maladie o�� la science des m��decins est rest��e absolument inefficace. Je me demande si on a consult�� pour ce monsieur le docteur Chillip; et si c'est lui qui a ��t�� inefficace, je voudrais savoir s'il trouve agr��able de relire chaque dimanche l'��pitaphe de M. Bodgers. Je regarde M. Chillip dans sa cravate du dimanche, puis je passe �� la chaire. Comme on y jouerait bien! Cela ferait une fameuse forteresse, l'ennemi se pr��cipiterait par l'escalier pour nous attaquer; et nous, nous l'��craserions avec le coussin de velours et tous ses glands. Peu �� peu mes yeux se ferment: j'entends encore le pasteur r��p��ter un psaume; il fait une chaleur ��touffante, puis je n'entends plus rien, jusqu'au moment o�� je glisse du banc avec un fracas ��pouvantable, et o�� Peggotty m'entra?ne hors de l'��glise plus mort que vif.
Maintenant je vois la fa?ade de notre maison: la fen��tre de nos chambres est ouverte, et il y p��n��tre un air embaum��; les vieux nids de corbeaux se balancent encore au sommet des ormes, dans le jardin. �� pr��sent me voil�� derri��re la maison, derri��re la cour o�� se tiennent la niche et le pigeonnier vide: c'est un endroit tout rempli de papillons, ferm�� par une grande barri��re, avec une porte qui a un cadenas; les arbres sont charg��s de fruits, de fruits plus m?rs et plus abondants que dans aucun autre jardin; ma m��re en cueille quelques-uns, et moi je me tiens derri��re elle et je grappille quelques groseilles en tapinois, d'un air aussi indiff��rent que je peux. Un grand vent s'��l��ve, l'��t�� s'est enfui. Nous jouons dans le salon, par un soir d'hiver. Quand ma m��re est fatigu��e, elle va s'asseoir dans un fauteuil, elle roule autour de ses doigts les longues boucles de ses cheveux, elle regarde sa taille ��lanc��e, et personne ne sait mieux que moi qu'elle est contente d'��tre si jolie.
Voil�� mes plus anciens souvenirs. Ajoutez-y l'opinion, si j'avais d��j�� une opinion, que nous avions, ma m��re et moi, un peu peur de Peggotty, et que nous suivions presque toujours ses conseils.
Un soir, Peggotty et moi nous ��tions seuls dans le salon, assis au coin du feu. J'avais lu �� Peggotty une histoire de crocodiles. Il fallait que j'eusse lu avec bien peu d'intelligence ou que la pauvre fille e?t ��t�� bien distraite, car je me rappelle qu'il ne lui resta de ma lecture qu'une sorte d'impression vague, que les crocodiles ��taient une esp��ce de l��gumes. J'��tais fatigu�� de lire, et je tombais de sommeil, mais on m'avait fait ce soir-l�� la grande faveur de me laisser attendre le retour de ma m��re qui d?nait chez une voisine, et je serais plut?t mort sur ma chaise que d'aller me
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