d'une troupe de
malins esprits, qui vouloyent l'emmener a toute force. Le valet desireux
de sauver son maistre, commence a l'embrasser. Les diables se prennent
a crier: "Valet lasche prise"; mais le valet perseverant en sa deliberation,
son maistre eschappa."
"En Saxe, une jeune fille fort riche promit mariage a un beau jeune
homme mais pauvre. Lui prevoyant que les richesses et la legerete du
sexe pourroyent aisement faire changer d'avis a ceste fille, lui
descouvrit franchement ce qu'il en pensoit. Elle au contraire commence
a lui faire mille imprecations, entre autres celle qui s'ensuit: Si j'en
epouse un autre que le diable m'emporte le jour des nopces. Qu'avient-il?
Au bout de quelque temps l'inconstante est fiancee a un autre, sans plus
se soucier de celui-ci, qui l'admonneste doucement plus d'une fois de sa
promesse, et de son horrible imprecation. Elle hochant la teste a telles
admonitions s'appreste pour les espousailles avec le second: mais le
jour des nopces, les parens, allies et amis faisans bonne chere,
l'espousee esveillee par sa conscience se monstroit plus triste que de
coustume. Sur ce voici arriver en la cour du logis ou se faisoit le festin,
deux hommes de cheval, qu'on ameine en haut, ou ils se mettent a table,
et apres disne, comme l'on commencoit a danser, on pria l'un d'iceux
(comme c'est la coustume du pays d'honorer les estrangers qui se
rencontrent en tels festins) de mener danser l'espousee. Il l'empoigne
par la main et la pourmeine par la salle: puis en presence des parens et
amis, il la saisit criant a haute voix, sort de la porte de la salle, l'enleve
en l'air, et disparoit avec son compagnon et leurs chevaux. Les pauvres
parens et amis l'ayans cherchee tout ce jour, comme il continuoyent le
lendemain, esperans la trouver tombee quelque part, afin d'enterrer le
corps, rencontrent les deux chevaliers, qui leur rendirent les habits
nuptiaux avec les bagues et joyaux de la fille, adjoutans que Dieu leur
avoit donne puissance sur ceste fille et non sur les acoustremens d'icelle,
puis s'esvanouirent."
Goulard repete aussi cette attaque du diable rapportee par Alexandre
d'Alexandrie[1]:
[Note 1: Au IIe livre de ses Jours geniaux.]
"Un mien ami, homme de grand esprit, et digne de foy estant un jour a
Naples chez un sien parent, entendit de nuit la voix d'un homme criant
a l'aide, qui fut cause qu'il aluma la chandelle, et y courut pour voir que
c'estoit. Estant sur le lieu, il vid un horrible fantosme, d'un port
effroyable et du tout furieux, lequel vouloit a toute force entrainer un
jeune homme. Le pauvre miserable crioit et se defendoit, mais voyant
aprocher celui-ci soudain il courut au devant, l'empoigne par la main et
saisit sa robe le plus estroitement qu'il lui fut possible et apres s'estre
long temps debattu commence a invoquer le nom et l'aide de Dieu et
eschappe, le fantosme disparoissant. Mon ami meine en son logis ce
jeune homme, pretendant s'en desfaire doucement, et le renvoyer chez
soy. Mais il ne sceut obtenir ce poinct, car le jeune homme estoit
tellement estonne qu'on ne pouvoit le rassurer, tressaillant sans cesse de
la peur qu'il avoit pour si hideuse rencontre. Ayant enfin reprins ses
esprits, il confessa d'avoir mene jusques alors une fort mechante vie,
este contempteur de Dieu, rebelle a pere et a mere, ausquels il avoit dit
et fait tant d'injures et outrages insupportables qu'ils l'avoyent maudit.
Sur ce il estoit sorti de la maison et avoit rencontre le bourreau
susmentionne."
Goulart[1] raconte encore d'autres histoires d'enlevements par le diable
d'apres divers auteurs:
[Note 1: _Thresor d'histoires admirables_, t. I, p. 538.]
"Un docteur de l'academie de Heidelberg ayant donne conge a certain
sien serviteur de faire un voyage en son pays, au retour comme ce
serviteur aprochoit de Heidelberg, il rencontre un reitre monte sur un
grand cheval, lequel par force l'enleve en croupe, en tel estat il essaye
d'empoigner son homme pour se tenir plus ferme; mais le reitre
s'esvanouit. Le serviteur emporte par le cheval bien haut en l'air, fut
jette bas pres d'un pont hors la ville, ou il demeura quelques heures sans
remuer pied ni main: enfin revenu a soi, et entendant qu'il estoit pres de
son lieu, reprint courage, se rendit au logis, ou il fut six mois entiers
attache au lict, devant que pouvoir se remettre en pied[1]."
[Note 1: Extrait du Mirabiles Historiae de spectris, Leipzig, 1597.]
"Pres de Torge en Saxe, certain gentilhomme se promenant dans la
campagne, rencontre un homme lequel le salue, et lui offre son service.
Il le fait son palefrenier. Le maistre ne valoit gueres. Le valet estoit la
meschancete mesme. Un jour le maistre ayant a faire quelque
promenade un peu loin, il recommande ses chevaux, specialement un
de grand prix a ce valet, lequel
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