part eût fait éclater une
tempête. Décidément tout le monde ne les aime pas, et ils n'oseront pas broncher. Ils se
vengeront dans leurs journaux, soit!
J'ai encore un jour ou deux à donner à _Villemer;_ et puis j'ai à voir M. Harmant, et puis
la pièce de Dumas, qui vient samedi, et quelques affaires de détail à terminer;
l'impression de mon manuscrit de Villemer à livrer, c'est-à-dire la correction d'un
manuscrit conforme à la mise en scène. J'espère avoir fini tout cela la semaine prochaine
et courir vers vous et mon Coco ton qui pousse bien, j'espère, pendant que je pioche, ce
cher petit amour! Je vous bige mille fois. Parlez-moi de vous et de lui.
[1] Abîmer.
DL
AU MÊME
Paris, 8 mars 1864
Villemer va toujours merveilleusement. La grande presse est encore plus élogieuse que la
petite, et cela sans restriction. Ces messieurs qui m'avaient déclarée incapable de faire du
théâtre, me proclament _très forte_. L'Odéon fait tous les soirs quatre mille francs de
location et de cinq à six cents francs au bureau. Il y a file de voitures toute la journée pour
retenir les places, puis autre file le soir et queue au bureau.
L'Odéon est illuminé tous les soirs. La Rounat en deviendra fou. Les acteurs sont toujours
rappelés entre tous les actes. C'est un succès splendide, et, comme il n'est plus soutenu
par personne que le public payant, il est si unanime et si chaud, que jamais les acteurs
n'en ont vu, disent-ils, de pareil. Ribes se soutient; le succès lui donne une vie artificielle
et le guérira peut-être. Il a des moments où on l'interrompt trois fois par des
applaudissements frénétiques comme le premier jour. Les voyageurs qui arrivent à Paris
et qui passent le soir devant l'Odéon, font arrêter leur sapin avec effroi et demandent si
c'est une révolution, si on a proclamé la République.
La pièce d'Alexandre a été mieux reçue ce soir[1]; mais elle soulève de l'opposition et
n'aura pas de succès. Elle est pourtant amusante et pleine de talent; mais elle scandalise.
Les épreuves de ma photographie n'ont pas encore très bien réussi chez Nadar; j'y
retourne demain. M. Harmant vient pour sûr mercredi. Il m'a envoyé une loge pour ce
jour-là; car il faut bien que je connaisse son théâtre. Je voudrais aussi voir _Villemer_,
que je n'ai encore fait qu'apercevoir à moitié. J'ai demandé hier trois places, pas une qui
ne soit louée jusqu'à samedi.
[1] _L'Ami des femmes_.
DLI
M. GUSTAVE FLAUBERT
Paris, 10 mars 1864.
Cher Flaubert,
Je ne sais pas si vous m'avez prêté ou donné le beau livre de M. Taine. Dans le doute, je
vous le renvoie; je n'ai eu le temps d'en lire ici qu'une partie, et, à Nohant, je n'aurai que
le temps de griffonner pour Buloz; mais, à mon retour, dans deux mois, je vous
redemanderai ces excellents volumes d'une si haute et si noble portée.
Je regrette de ne vous avoir pas dit adieu; toutefois, comme je reviens bientôt, j'espère
que vous ne m'aurez pas oubliée et que vous me ferez lire aussi quelque chose de vous.
Vous avez été si bon et si sympathique pour moi à la première représentation de
_Villemer_, que je n'admire plus seulement votre admirable talent, je vous aime de tout
mon coeur.
GEORGE SAND.
DLII
A M. CHARLES DUVERNET, A NEVERS
Nohant, 24 mars 1864.
Mon cher ami,
Nous changeons de place pour quelque temps. Mes enfants ne veulent pas habiter Nohant
sans moi; ils ont raison et ils me font plaisir. Nous allons tous nous caser auprès de Paris,
afin de pouvoir nous occuper de théâtre et d'autres travaux plus réalisables là où nous
serons. Nous organisons Nohant sur un bon pied de conservation, afin de pouvoir, tous
les ans, y passer une saison tous ensemble. Voilà. Ce n'est pas un départ ni un abandon du
pays, ni une séparation de famille, c'est une installation plus légère à porter et à
transporter; car nous avons aussi pour l'année prochaine des projets de voyage. Il me
semble que vous faites un peu de même en n'habitant pas le Coudray toute l'année.
Espérons que nos loisirs de campagne se rencontreront et que vous ne vous apercevrez
guère par conséquent de ce changement.
As-tu reçu signe dévie de Guéroult? Je t'ai écrit que je l'avais vu et qu'il m'avait promis ce
que tu désires. Je n'ai pas répondu à ta lettre de félicitations pour _Villemer:_ je comptais
te retrouver ici. Je te remercie donc aujourd'hui et j'embrasse toute ta chère famille.
Amitiés d'ici.
G. SAND.
DLIII
A MADAME AUGUSTINE DE BERTHOLDI, A DECIZE
Nohant, 31 mars 1864
Ma chère enfant,
Puisque Duvernet t'a dit que je quittais Nohant, il aurait pu te dire aussi, puisque je le lui
ai écrit, que
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