marche, usera d'indulgence si elle le juge �� propos, et elle fera bien si elle prouve sa force par la douceur. Mais, aujourd'hui, si elle songe �� ses amis plus qu'�� son devoir, elle est perdue, et les hommes employ��s par elle �� son d��but auront commis un parricide.
Tu vois, mon ami, que je ne saurais transiger avec la logique. Fais comme moi. Si Michel et bien d'autres d��serteurs que je connais avaient besoin de ma vie, je la leur donnerais volontiers, mais ma conscience, point. Michel a _abandonn�� la d��mocratie, en haine de la d��magogie_. Or il n'y a plus de _d��magogie_. Le peuple a prouv�� qu'il ��tait plus beau, plus grand, plus pur que tous les riches et les savants de ce monde. Le calomnier la veille pour le flatter le lendemain m'inspire peu de confiance, et j'estimerais encore mieux Michel s'il protestait aujourd'hui contre la R��publique. Je dirais qu'il s'est tromp��, qu'il se trompe, mais qu'il est de bonne foi.
Peut-��tre croit-il d��sormais travailler pour une r��publique aristocratique o�� le droit des pauvres sera refoul�� et m��connu. S'il agit ainsi, il brisera l'alliance qui s'est ciment��e d'une mani��re sublime, sur les barricades, entre le riche et le pauvre. Il perdra la R��publique et la livrera aux intrigants; et le peuple, qui sent sa force, ne les supportera plus. Le peuple tombera dans des exc��s condamnables si on le trahit; la soci��t�� sera livr��e �� une ��pouvantable anarchie, et ces riches qui auront d��truit le pacte sacr�� deviendront pauvres �� leur tour dans des convulsions sociales o�� tout succombera.
Ils seront punis par o�� ils auront p��ch��; mais il sera trop tard pour se repentir. Michel ne conna?t pas et n'a jamais connu le peuple; que ne le voit-il aujourd'hui! Il jugerait sa force et respecterait sa vertu.
Courage, volont��, pers��v��rance �� toute ��preuve. Je suis �� toi pour la vie.
GEORGE.
Je serai demain soir 7 mars �� Nohant pour une huitaine de jours; apr��s quoi, je reviendrai probablement ici pour m'y consacrer enti��rement aux nouveaux devoirs que la situation nous cr��e.
CCLXVIII
A M. CHARLES PONCY, A TOULON
Nohant, 9 mars 1848.
Vive la R��publique! Quel r��ve, quel enthousiasme, et, en m��me temps, quelle tenue, quel ordre �� Paris! J'en arrive, j'y ai couru, j'ai vu s'ouvrir les derni��res barricades sous mes pieds. J'ai vu le peuple grand, sublime, na?f, g��n��reux, le peuple fran?ais, r��uni au coeur de la France, au coeur du monde; le plus admirable peuple de l'univers! J'ai pass�� bien des nuits sans dormir, bien des jours sans m'asseoir. On est fou, on est ivre, on est heureux de s'��tre endormi dans la fange et de se r��veiller dans les cieux. Que tout ce qui vous entoure ait courage et confiance!
La R��publique est conquise, elle est assur��e, nous y p��rirons tous plut?t que de la lacher. Le gouvernement est compos�� d'hommes excellents pour la plupart, tous un peu incomplets et insuffisants �� une tache qui demanderait le g��nie de Napol��on et le coeur de J��sus. Mais la r��union de tous ces hommes qui ont de l'ame ou du talent, ou de la volont��, suffit �� la situation. Ils veulent le bien, ils le cherchent, ils l'essayent. Ils sont domin��s sinc��rement par un principe sup��rieur �� la capacit�� individuelle de chacun, la volont�� de tous, le droit du peuple. Le peuple de Paris est si bon, si indulgent, si confiant dans sa cause et _si fort_, qu'il aide lui-m��me son gouvernement.
La dur��e d'une telle disposition serait l'id��al social. Il faut l'encourager. D'un bout de la France �� l'autre, il faut que chacun aide la R��publique et la sauve de ses ennemis. Le d��sir, le principe, le voeu fervent des membres du gouvernement provisoire est qu'on envoie �� l'Assembl��e nationale des hommes qui repr��sentent le peuple et dont plusieurs, le plus possible, sortent de son sein.
Ainsi, mon ami, vos amis doivent y songer et tourner les yeux sur vous pour la d��putation. Je suis bien fach��e de ne pas conna?tre les gens influents de notre opinion dans votre ville. Je les supplierais de vous choisir et je vous commanderais, au nom de mon amiti�� maternelle, d'accepter sans h��siter. Voyez: _faites agir;_ il ne suffit pas de laisser agir. Il n'est plus question de vanit�� ni d'ambition comme on l'entendait nagu��re. Il faut que chacun fasse la manoeuvre du navire et donne tout son temps, tout son coeur, toute son intelligence, toute sa vertu �� la R��publique. Les po��tes peuvent ��tre, comme Lamartine, de grands citoyens. Les ouvriers ont �� nous dire leurs besoins, leurs inspirations. ��crivez-moi vite qu'on y pense et que vous le voulez. Si j'avais l�� des amis, je le leur ferais bien comprendre.
Je repars pour Paris dans quelques jours probablement, pour faire soit un journal, soit autre chose. Je choisirai le meilleur instrument possible pour accompagner ma chanson. J'ai le coeur
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