Contes pour les petits garçons | Page 2

Johan Christopher Schmid
se faisait des
blessures dangereuses. Un jour que, dans l'été il courait après des papillons, il se livra
avec emportement à ce plaisir, et se mit tout en nage et hors d'haleine. Mourant de soif, il
rencontra une belle source dont l'eau claire comme le cristal, et froide comme la glace,
coulait à l'ombre d'un bocage. Guillaume se précipita vers cette eau et en but à longs traits:
à peine eut-il commis cette imprudence qu'il se sentit malade et ne put qu'à grand'peine
retourner chez son père; on le mit au lit, il fut pris d'une fièvre dangereuse, et sa vie fut en
danger.
--Ah! mon père, disait-il un jour, qui eût pensé que cette belle source contînt un poison si
dangereux? que les apparences sont trompeuses.--Tu accuses à tort la source, répondit le
père; c'est elle qui fournit le ruisseau dont nous buvons l'eau chaque jour, jamais elle ne
nous a nui; mais toi, tu l'as rendue malfaisante en la prenant la plus fraîche possible, au
moment où ton corps était tout bouillant de chaleur; c'est ton imprudence qui a fait un
poison de cette eau salutaire: n'oublie pas que l'excès corrompt les meilleures choses.

LES POMMES.
Tous les vices se tiennent par la main, la gourmandise mène le vol. Philibert était un petit
gourmand: de la fenêtre de sa chambre, il voyait de belles pommes dans un jardin près de
là, Il succomba à la tentation que l'aspect de ce fruit lui faisait éprouver, et de grand matin
il chercha à pénétrer dans le jardin où se trouvait l'objet de sa convoitise. Il découvrit à la
haie qui en formait la clôture un petit trou qu'il parvint à agrandir, et y passa avec grande
peine en s'égratignant les mains et en salissant ses vêtements. Il arriva enfin auprès du
pommier et se hâta de remplir de plus beaux fruits les poches de son habit. Au moment
où il allait partir, il vit arriver le maître du jardin, qui se mit à sa poursuite. Comme
Philibert courait bien, il parvint à temps au trou de la haie, engagea promptement sa tête
et ses épaules; mais, comme l'espace était juste, les poches gonflées de pommes ne purent
passer, et le retinrent comme dans un piége.

Le maître du jardin arriva, et après avoir ri de grand coeur de l'aventure singulière, il
reprit ses pommes, fustigea le voleur et lui dit:--C'est la chose même que tu as volée qui
est cause que tu es puni pour ton vol.

L'ENVIEUX.
Un jardinier, qui était fort habile cultivateur, cultivait dans son terrain les plus beaux
légumes et les plus beaux fruits. Il se levait de grand matin, se couchait tard, et travaillait
tout le jour.
Il y avait dans le voisinage un autre jardinier, qui n'était pas moins habile, mais qui était
envieux de tout ce qui arrivait d'heureux à son prochain. Chaque fois qu'il voyait que les
arbres ou les autres plantes du premier donnaient de belles espérances, il en était tout
soucieux: c'était bien pire quand ces espérances se réalisaient: il était dèsolé. Une année il
avait remarqué que la treille de son voisin annonçait une superbe récolte, tandis que la
sienne ne promettait rien de bon, sans doute parce qu'elle était moins bien exposée. Ne
pouvant résister au désir de satisfaire son envie, il se leva la nuit et coupa toutes les plus
belles branches des ceps de vigne de son confrère; il s'en alla sans qu'on l'eût vu, et le
lendemain apprit avec joie que celui-ci était plongé dans la douleur.
Or, dans ce temps-là on ne connaissait pas l'art de tailler la vigne; l'on ne savait pas que
pour obtenir des raisins beaux et bons il faut retrancher à chaque pied la plus grande
partie des branches nouvelles. L'on fut donc bien étonné de voir que la treille, loin de
souffrir, produisit des raisins en très-grande abondance et délicieux.
L'envieux éprouva une telle douleur qu'il en tomba malade. Mais son voisin, qui réfléchit
sur cet événement, comprit qu'il avait eu lieu parce qu'en retranchant une partie des
branches, toute la sève de chaque pied de vigne avait profité au fruit.
De cette observation, il déduisit l'art de tailler la vigne, qui devint pour lui une source de
fortune. L'envieux en mourut de dépit.

LES CAILLOUX.
Floret servait comme garçon chez un marchand d'eau-de-vie; il s'était habitué à en boire
de plus en plus, si bien qu'à la fin il en consommait chaque jour une demi-bouteille, que
son maître lui donnait comme gages. Cette boisson funeste détruisait sa santé; il fut
obligé d'appeler le médecin, qui lui dit qu'il périrait bientôt s'il ne cessait de boire de
l'eau-de-vie.--L'habitude est trop bien prise, répondit Floret, il faut chaque jour que je
vide cette bouteille, je ne puis m'en
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