faisais une confession publique, combien en trouverait-on qui ne se seraient jamais laiss�� entra?ner par les joies ou par les douleurs de la passion! Dieu merci, il y a encore des gens en ce monde qui pensent que le coeur est autre chose qu'un organe cono?de creux et musculaire.
Je suis de ceux-l��, et je veux que ce coeur qui me bat sous le sein gauche, ne me serve pas exclusivement �� pousser le sang rouge dans mes art��res et �� recevoir le sang noir que lui rapportent mes veines.
Mes d��sirs se r��aliseront-ils? Je n'en sais rien.
Mais il suffit que cela soit maintenant possible, pour que d��j�� je me sente vivre.
Ce qui arrivera, nous le verrons. Peut-��tre rien. Peut-��tre quelque chose au contraire. Et j'ai comme un pressentiment que cela ne peut pas tarder beaucoup. Donc, �� bient?t.
Un voyage au pays du sentiment, pour toi cela doit ��tre un voyage extraordinaire et fantastique,--en tous cas il me semble que cela doit ��tre aussi curieux que la d��couverte du Nil blanc.
Le Nil, on conna?tra un jour son cours; mais la femme, conna?tra-t-on jamais sa marche? Saura-t-on d'o�� elle vient, o�� elle va?
II
En me donnant Marseille pour lieu de garnison, le hasard m'a envoy�� en pays ami, et nulle part assur��ment je n'aurais pu trouver des relations plus faciles et plus agr��ables.
Mon p��re, en effet, a ��t�� pr��fet des Bouches-du-Rh?ne pendant les derni��res ann��es de la Restauration, et il a laiss�� �� Marseille, comme dans le d��partement, des souvenirs et des amiti��s qui sont toujours vivaces.
Pendant les premiers jours de mon arriv��e, chaque fois que j'avais �� me pr��senter ou �� donner mon nom, on m'arr��tait par cette interrogation:
--Est-ce que vous ��tes de la famille du comte de Saint-N��r��e qui a ��t�� notre pr��fet?
Et quand je r��pondais que j'��tais le fils de ce comte de Saint-N��r��e, les mains se tendaient pour serrer la mienne.
--Quel galant homme!
--Et bon, et charmant.
--Quel homme de coeur!
Un v��ritable concert de louanges dans lequel tout le monde faisait sa partie, les grands et les petits.
Il est assez probable que mon p��re ne me laissera pas autre chose que cette r��putation, car s'il a toujours ��t�� l'homme aimable et loyal que chacun prend plaisir �� se rappeler, il ne s'est jamais montr��, par contre, bien soigneux de ses propres affaires, mais j'aime mieux cette r��putation et ce nom honor�� pour h��ritage que la plus belle fortune. Il y a vraiment plaisir �� ��tre le fils d'un honn��te homme, et je crois que dans les jours d'��preuves, ce doit ��tre une grande force qui soutient et pr��serve.
En attendant que ces jours arrivent, si toutefois la mauvaise chance veut qu'ils arrivent pour moi, le nom de mon p��re m'a ouvert les maisons les plus agr��ables de Marseille et m'a fait retrouver enfin ces relations et ces plaisirs du monde dont j'ai ��t�� priv�� pendant six ans. Depuis que je suis ici, chaque jour est pour moi un jour de f��te, et je connais d��j�� presque toutes les villas du Prado, des Aygalades, de la Rose. Pendant la belle saison, les riches commer?ants n'habitent pas Marseille, ils viennent seulement en ville au milieu de la journ��e pour leurs affaires; et leurs matin��es et leurs soir��es ils les passent �� la campagne avec leur famille. Celui qui ne conna?trait de Marseille que Marseille, n'aurait qu'une id��e bien incompl��te des moeurs marseillaises. C'est dans les riches chateaux, les villas, les bastides de la banlieue qu'il faut voir le n��gociant et l'industriel; c'est dans le cabanon qu'il faut voir le boutiquier et l'ouvrier. J'ai visit�� peu de cabanons, mais j'ai ��t�� re?u dans les chateaux et les villas et v��ritablement j'ai ��t�� plus d'une fois ��bloui du luxe de leur organisation. Ce luxe, il faut le dire, n'est pas toujours de tr��s-bon go?t, mais le go?t et l'harmonie n'est pas ce qu'on recherche.
On veut parler aux yeux avant tout et parler fort. N'a de valeur que ce qui co?te cher. Volontiers on prend l'��tranger par le bras, et avec une apparente bonhomie, d'un air qui veut ��tre simple, on le conduit devant un mur quelconque:--Voil�� un mur qui n'a l'air de rien et cependant il m'a co?t�� 14,000 francs; je n'ai ��conomis�� sur rien. C'est comme pour ma villa, je n'ai employ�� que les meilleurs ouvriers, je les payais 10 francs par jour; rien qu'en ciment ils m'ont d��pens�� 42,000 francs. Aussi tout a ��t�� soign�� et autant que possible amen�� �� la perfection. Ce parquet est en bois que j'ai fait venir par mes navires de Guatemala, de la c?te d'Afrique et des Indes; leur r��union produit une chose unique en son genre; tandis que le salon de mon voisin Salary chez qui vous d?niez la semaine derni��re lui co?te 2 ou 3,000 francs parce qu'il est en simple parqueterie de Suisse, le mien m'en
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