nez et les fines pointes des moustaches restaient intacts.
Alors exasp��r��, le docteur renversa la chaise d'un coup de poing et, appuyant un pied sur le reste du buste, dans une posture de triomphateur, il se tourna vers le public abasourdi en vocif��rant: ?P��rissent ainsi tous les tra?tres.?
Mais comme aucun enthousiasme ne se manifestait encore, comme les spectateurs semblaient stupides d'��tonnement, le commandant cria aux hommes de la milice: ?Vous pouvez maintenant regagner vos foyers.? Et il se dirigea lui-m��me �� grands pas vers sa maison, comme s'il e?t fui.
Sa bonne, d��s qu'il parut, lui dit que des malades l'attendaient depuis plus de trois heures dans son cabinet. Il y courut. C'��taient les deux paysans aux varices, revenus d��s l'aube, obstin��s et patients.
Et le vieux aussit?t reprit son explication: ??a a commenc�� par des fourmis qui me couraient cens��ment le long des jambes...?
* * * * *
LE LOUP
[Illustration de MERWART]
Voici ce que nous raconta le vieux marquis d'Arville �� la fin du d?ner de Saint-Hubert, chez le baron des Ravels.
On avait forc�� un cerf dans le jour. Le marquis ��tait le seul des convives qui n'e?t point pris part �� cette poursuite, car il ne chassait jamais.
Pendant toute la dur��e du grand repas, on n'avait gu��re parl�� que de massacres d'animaux. Les femmes elles-m��mes s'int��ressaient aux r��cits sanguinaires et souvent invraisemblables, et les orateurs mimaient les attaques et les combats d'hommes contre les b��tes, levaient les bras, contaient d'une voix tonnante.
M. d'Arville parlait bien, avec une certaine po��sie un peu ronflante, mais pleine d'effet. Il avait d? r��p��ter souvent cette histoire, car il la disait couramment, n'h��sitant pas sur les mots choisis avec habilet�� pour faire image.
--Messieurs, je n'ai jamais chass��, mon p��re non plus, mon grand-p��re non plus et, non plus, mon arri��re-grand-p��re. Ce dernier ��tait fils d'un homme qui chassa plus que vous tous. Il mourut en 1764. Je vous dirai comment.
Il se nommait Jean, ��tait mari��, p��re de cet enfant qui fut mon trisa?eul, et il habitait avec son fr��re cadet, Fran?ois d'Arville, notre chateau de Lorraine, en pleine for��t.
Fran?ois d'Arville ��tait rest�� gar?on par amour de la chasse.
Ils chassaient tous deux d'un bout �� l'autre de l'ann��e, sans repos, sans arr��t, sans lassitude. Ils n'aimaient que cela, ne comprenaient pas autre chose, ne parlaient que de cela, ne vivaient que pour cela.
Ils avaient au coeur cette passion terrible, inexorable. Elle les br?lait, les ayant envahis tout entiers, ne laissant de place pour rien autre.
Ils avaient d��fendu qu'on les d��rangeat jamais en chasse, pour aucune raison. Mon trisa?eul naquit pendant que son p��re suivait un renard, et Jean d'Arville n'interrompit point sa course, mais il jura: ?Nom d'un nom, ce gredin-l�� aurait bien pu attendre apr��s l'hallali!?
Son fr��re Fran?ois se montrait encore plus emport�� que lui. D��s son lever, il allait voir les chiens, puis les chevaux, puis il tirait des oiseaux autour du chateau jusqu'au moment de partir pour forcer quelque grosse b��te.
On les appelait dans le pays M. le Marquis et M. le Cadet, les nobles d'alors ne faisant point, comme la noblesse d'occasion de notre temps, qui veut ��tablir dans les titres une hi��rarchie descendante; car le fils d'un marquis n'est pas plus comte, ni le fils d'un vicomte baron, que le fils d'un g��n��ral n'est colonel de naissance. Mais la vanit�� mesquine du jour trouve profit �� cet arrangement.
Je reviens �� mes anc��tres.
Ils ��taient, para?t-il, d��mesur��ment grands, osseux, poilus, violents et vigoureux. Le jeune, plus haut encore que l'a?n��, avait une voix tellement forte que, suivant une l��gende dont il ��tait fier, toutes les feuilles de la for��t s'agitaient quand il criait.
Et lorsqu'ils se mettaient en selle tous deux pour partir en chasse, ce devait ��tre un spectacle superbe de voir ces deux g��ants enfourcher leurs grands chevaux.
Or, vers le milieu de l'hiver de cette ann��e 1764, les froids furent excessifs et les loups devinrent f��roces.
Ils attaquaient m��me les paysans attard��s, r?daient la nuit autour des maisons, hurlaient du coucher du soleil �� son lever et d��peuplaient les ��tables.
Et bient?t une rumeur circula. On parlait d'un loup colossal, au pelage gris, presque blanc, qui avait mang�� deux enfants, d��vor�� le bras d'une femme, ��trangl�� tous les chiens de garde du pays et qui p��n��trait sans peur dans les enclos pour venir flairer sous les portes. Tous les habitants affirmaient avoir senti son souffle qui faisait vaciller la flamme des lumi��res. Et bient?t une panique courut par toute la province. Personne n'osait plus sortir d��s que tombait le soir. Les t��n��bres semblaient hant��es par l'image de cette b��te.
Les fr��res d'Arville r��solurent de la trouver et de la tuer, et ils convi��rent �� de grandes chasses tous les gentilshommes du pays.
Ce fut en vain. On avait beau battre les for��ts, fouiller les buissons, on ne la rencontrait jamais. On tuait des loups, mais pas celui-l��. Et,
Continue reading on your phone by scaning this QR Code
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.