Choix de Poesies | Page 2

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valut à Malherbe le surnom de "_tyran des mots et des
syllabes_."
Malherbe a écrit des _Odes_, consacrées le plus souvent à célébrer des
faits contemporains, des _Paraphrases de Psaumes_, des _Sonnets_ et
des _Chansons_. Sa poésie manque d'originalité et d'inspiration, mais
sa langue est simple et impeccable; il écrivait lentement et avec le plus
grand soin.
CONSOLATION A M. DU PERRIER SUR LA MORT DE SA
FILLE.
Ta douleur, du Perrier, sera donc éternelle!
Et les tristes discours
Que te met en l'esprit l'amitié paternelle,
L'augmenteront toujours!
Le malheur de ta fille au tombeau descendue,

Par un commun trépas,
Est-ce quelque dédale où ta raison perdue
Ne se retrouve pas?
Je sais de quels appas son enfance était pleine;
Et n'ai pas entrepris,
Injurieux ami, de soulager ta peine
Avecque son mépris.
Mais elle était du monde, où les plus belles choses
Ont le pire destin:
Et rose elle a vécu ce que vivent les roses,
L'espace d'un matin.
La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles;
On a beau la prier,
La cruelle qu'elle est, se bouche les oreilles,
Et nous laisse crier.
Le pauvre en sa cabane, où le chaume le couvre,
Est sujet à ses lois;
Et la garde qui veille aux barrières du Louvre,
N'en défend point nos rois.
De murmurer contre elle, et perdre patience,
Il est mal à propos:
Vouloir ce que Dieu veut, est la seule science
Qui nous met en repos.
PIERRE CORNEILLE.
(1606-1684)
Pierre Corneille naquit à Rouen d'une famille de robe. Il y étudia le

droit et se fit recevoir avocat, mais il abandonna bientôt sa profession
pour le théâtre.
Il débuta par des comédies: _Melite_ (1629), _la Veuve, la Galerie du
Palais, la Suivante, la Place Royale_. A Paris, où il s'était fixé, il devint
un des cinq poètes "collaborateurs" du Cardinal Richelieu qui se piquait
d'écrire des tragédies en vers, mais son esprit indépendant ne lui permit
pas de conserver cette situation.
Dès lors, Corneille écrivit des tragédies pour son compte: _Médée_
(1635), _le Cid_ (1636), qui le rendit célèbre du jour au lendemain, et
lui attira la jalousie de ses rivaux; _Horace, Cinna_ (1640),
_Polyeucte_ (1643), _Pompée, le Menteur_ (comédie) _Rodogune_
(1644). Les oeuvres de la période suivante sont fort inégales, et les
défauts de Corneille (complication de l'intrigue, obscurité, déclamation)
s'y accusent. En même temps, il perdait la faveur du public et voyait
avec amertume le succès de son jeune rival, Racine. Ses autres oeuvres
sont: _Nicomède, Pertharite, Oedipe, Sertarius, Othon, Titus, Agésilas,
Attila, Suréna_ (1674), et une traduction en vers de _l'Imitation de
Jésus-Christ_.
Corneille fut le véritable fondateur de la tragédie classique en France
après les essais de Montchrétien, de Hardy et de Mairet. Son théâtre, où
l'héroïsme domine, est une école de volonté au service du devoir.
LE CID.
(Récit de Rodrigue--Acte IV, scène III)
(Don Rodrigue, qui vient de repousser une invasion de Mores et a ainsi
sauvé le royaume de Castille, est appelé devant le roi pour faire le récit
de son action.)
Nous partîmes cinq cents; mais par un prompt renfort
Nous nous
vîmes trois mille en arrivant au port,
Tant, à nous voir marcher avec
un tel visage,
Les plus épouvantés reprenaient de courage!
J'en
cache les deux tiers aussitôt qu'arrivés,
Dans le fond des vaisseaux

qui lors furent trouvés;
Le reste, dont le nombre augmentait à toute
heure,
Brûlant d'impatience autour de moi demeure,
Se couche
contre terre, et sans faire aucun bruit,
Passe une bonne part d'une si
belle nuit.
Par mon commandement, la garde en fait de même,
Et,
se tenant cachée, aide à mon stratagème;
Et je feins hardiment d'avoir
reçu de vous
L'ordre qu'on me voit suivre et que je donne à tous.
Cette obscure clarté qui tombe des étoiles
Enfin avec le flux nous fait
voir trente voiles;
L'onde s'enfle dessous, et d'un commun effort
Les
Mores et la mer montent jusques au port.
On les laisse passer; tout
leur paraît tranquille;
Point de soldats au port, point aux murs de la
ville.
Notre profond silence abusant leurs esprits,
Ils n'osent plus
douter de nous avoir surpris;
Ils abordent sans peur, ils ancrent, ils
descendent,
Et courent se livrer aux mains qui les attendent.
Nous
nous levons alors, et tous en même temps
Poussons jusques au ciel
mille cris éclatants.
Les nôtres, à ces cris, de nos vaisseaux répondent;

Ils paraissent armés, les Mores se confondent,
L'épouvante les
prend à demi-descendus;
Avant que de combattre, ils s'estiment
perdus.
Ils couraient au pillage, et rencontrent la guerre;
Nous les
pressons sur l'eau, nous les pressons sur terre, Et nous faisons courir
des ruisseaux de leur sang,
Avant qu'aucun résiste ou reprenne son
rang.
Mais bientôt, malgré nous, leurs princes les rallient,
Leur
courage renaît, et leurs terreurs s'oublient:
La honte de mourir sans
avoir combattu
Arrête leur désordre, et leur rend leur vertu.
Contre
nous de pied ferme ils tirent leurs alfanges,
De notre sang au leur font
d'horribles mélanges:
Et la terre, et le fleuve, et leur flotte, et le port,

Sont des champs de carnage où triomphe la mort.
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