Belle-Rose | Page 5

Amédée Achard
pas moins un voyageur remis �� ma garde. Ce toit vous prot��ge. Si vous ��tes de ceux qui ont tir�� l'��p��e contre leur roi et leur pays, c'est �� Dieu de vous juger. Je fais mon devoir; puissiez-vous dire: Je fais le mien.
Le faux marchand baissa les yeux sous le regard serein de l'artisan, et la rougeur passa sur son front comme un ��clair. Mais reprenant aussit?t sa s��r��nit��, il salua de la main le vieux fauconnier.
--Soit, mon brave, je ne chargerai pas votre m��moire d'un souvenir; mais, par le nom de mon p��re, je n'oublierai ni le v?tre, ni ce que vous faites.
Deux heures se pass��rent, et l'��tranger partagea le d?ner du fauconnier, �� l'aise, comme sous la tente d'un soldat, ou dans l'h?tel d'un grand seigneur. Puis, deux autres se pass��rent encore; �� la fin de la quatri��me, l'inqui��tude rapprocha la pointe de ses sourcils. Il marcha vers la fen��tre et l'ouvrit, pr��tant l'oreille; la nuit ��tait venue, et la route ��tait sans bruit. Bient?t il sortit de la maisonnette et s'avan?a vers la porte du jardin. Le p��re Guillaume le suivit. Ainsi que l'obscurit��, le silence ��tait profond.
--Votre fils est brave? dit l'��tranger brusquement au fauconnier.
--Honn��te et brave comme l'acier.
--Il d��fendrait donc un d��p?t confi�� �� sa fid��lit��?
--Ce n'est qu'un enfant, mais il se ferait tuer comme un homme.
--Alors j'ai peur pour votre fils, ma?tre Guillaume.
Le p��re ne r��pondit pas, mais, aux rayons de la lune, l'��tranger vit s'��tendre la paleur sur son front. Tous deux gard��rent le silence, les yeux attach��s sur la ligne blanche du chemin qui se noyait dans un horizon vague et sans bornes. Les myst��res de la nuit emplissaient l'espace de bruits confus, rapides, incertains. Guillaume Grinedal s'appuyait sur les batons d'une haie �� claire-voie; on entendait craquer le bois sous l'effort de ses mains. Le gentilhomme froissait les revers de son habit.
--Rien, rien encore! murmurait-il. Oh! je donnerais mille louis pour entendre le galop d'un cheval!
Comme il parlait, une d��tonation retentit dans l'��loignement, plus loin que le bois dont les ombres ��paisses coupaient l'horizon. La haie se brisa sous la main du fauconnier, qui sauta sur la route.
--Un coup de fusil! L'avez-vous entendu? s'��cria le gentilhomme.
--Je l'ai entendu, r��pondit Guillaume Grinedal, qui se jeta �� plat ventre sur le chemin.
Deux autres d��tonations retentirent encore, mais le son venait de si loin, qu'il fallait l'oreille d'un p��re ou d'un proscrit pour les distinguer des mille bruits qui flottaient sous le ciel profond. Guillaume Grinedal ��coutait l'oreille coll��e �� la terre.
--Eh bien? dit le gentilhomme.
--Rien... rien encore! Le coeur me bat et les oreilles me tintent, dit le pauvre p��re. Ah! oui, maintenant, un bruit sourd, saccad��, continu! Il approche... c'est le galop d'un cheval!
--Oh! le brave enfant! s'��cria l'��tranger avec explosion.
Guillaume Grinedal ne dit rien, mais d��couvrant son front blanchi par les ann��es, il leva les yeux vers le ciel et pria. Le gentilhomme regardait dans l'espace, la t��te pench��e en avant: on aurait dit que ses yeux ��tincelants voulaient percer la t��n��breuse transparence de la nuit.
--Je le vois, mordieu! je le vois! Le cheval a des ailes et l'enfant est dessus.
Le gentilhomme saisit le bras du fauconnier.
--Ne le reconnaissez-vous pas? dit-il.
Mais le fauconnier remerciait Dieu; deux grosses larmes tremblaient au bord de ses paupi��res et ses l��vres agit��es murmuraient une action de graces. L'��tranger retira sa main, et plein d'une religieuse ��motion, souleva son chapeau. En quelques bonds le cheval arriva sur eux. L'enfant sauta sur la route, et tomba dans les bras du fauconnier.
--Mon p��re! s'��cria-t-il.
Le p��re, silencieux, le pressait sur son coeur.
--Mais, dit Guillaume Grinedal tout �� coup, il y a du sang sur tes habits. Es-tu bless��?
--Ce n'est rien, r��pondit Jacques, une balle a d��chir�� ma blouse, l��, pr��s de l'��paule, et m'a ��gratign��, je crois!
--Tu es un vaillant gar?on, sur ma foi, dit le gentilhomme; si jamais tu t'enr?les sous les drapeaux de Sa Majest�� le roi Louis, vrai Dieu! tu feras ton chemin. ?��, voyons, as-tu la valise?
--La voil�� sur la croupe du cheval.
--Pauvre Phoebus! Tu l'as rudement men��, hein? dit gaiement l'��tranger en passant la main sur le cou du cheval.
Phoebus frotta ses naseaux ��cumants sur l'habit du gentilhomme, dressa l'oreille �� la voix du ma?tre, hennit et frappa du pied le sol.
--Tu as donc ��t�� poursuivi? reprit l'��tranger tout en d��bouclant la valise.
--A une petite lieue de Witternesse j'ai d? quitter le grand chemin pour ��viter un parti de maraudeurs espagnols, r��pondit Jacques. Deux lieues plus loin, en avant de Roquetoire, pr��s de Blendecques, je suis tomb�� au milieu d'une bande de hussards et d'imp��riaux qui battaient l'estrade. Ils m'ont pouss�� vivement durant un quart d'heure. Mais Phoebus a de bonnes jambes. A l'entr��e du bois ils ont perdu mes traces. Ah! j'oubliais! Bergame m'a charg�� d'une lettre pour vous. La voici.
Le gentilhomme brisa
Continue reading on your phone by scaning this QR Code

 / 203
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.