vaste. Ce parc, ainsi que d'autres domaines plus riches, a changé de mains pièce à pièce et a disparu. C'est bien dommage, poursuivit le jeune homme.
-- Possible, fut la réplique. Mais ma question concernait le propriétaire. Ce qu'a été la maison, je ne m'en soucie guère; et pour ce qu'elle est, je peux bien le voir par moi-même.?
L'héritier présomptif du Maypole pressa ses lèvres de son doigt; et lan?ant un coup d'oeil du c?té du jeune gentleman que nous avons déjà fait conna?tre, et qui avait changé d'attitude la première fois qu'on avait parlé de la maison, il répliqua d'un ton moins haut:
?Le propriétaire se nomme Haredale, M. Geoffroy Haredale, et... (il lan?a de nouveau un coup d'oeil dans la même direction) et un digne gentleman encore... Hem!?
Ne faisant pas plus attention à cette toux d'avertissement qu'au geste significatif dont elle avait été précédée, l'étranger continua son r?le de questionneur.
?Je me suis détourné de mon chemin en venant ici, et j'ai pris le sentier pour traverser les terres de cette Garenne. Quelle est la jeune dame que j'ai vue monter en voiture? serait-ce sa fille?
-- Mais comment le saurais-je, mon brave homme? répliqua Joe, qui essayait, tout en faisant quelques rangements autour de l'atre, de s'avancer près de son questionneur et de le tirer par la manche; je n'ai jamais vu la jeune dame dont vous parlez. A?e!... Encore du vent et de la pluie! Bon, en voilà une soirée!
-- Diable de temps, en effet! observa l'étranger.
-- Vous y êtes habitué, n'est-ce pas? dit Joe, saisissant tout ce qui semblait promettre une diversion au sujet de l'entretien.
-- Mais oui, pas mal comme ?a, repartit l'autre. Revenons donc à la jeune dame. Est-ce que M. Haredale a une fille?
-- Non, non, dit le jeune homme impatienté; il est célibataire... il est... laissez-nous donc un peu tranquilles, mon brave homme, si c'est possible. Ne voyez-vous pas bien qu'on ne go?te pas trop là-bas votre conversation??
Sans tenir compte de cette remontrance chuchotée, et faisant semblant de ne pas l'entendre, le bourreau poursuivit, de manière à pousser Joe à bout:
?La belle raison! Ce n'est pas la première fois que des célibataires ont eu des filles. Comme si elle ne pouvait pas être sa fille sans qu'il f?t marié!
-- Je ne sais pas ce que vous voulez dire,? répondit Joe, ajoutant d'un ton plus bas et en se rapprochant de lui: ?Ah ?à! vous le faites donc exprès, hein?
-- Ma foi! je n'ai pas du tout de mauvaise intention. Je ne vois pas de mal à ?a. Je fais quelques questions, ainsi que tout étranger peut le faire naturellement, sur les habitants d'une maison remarquable, dans un pays nouveau pour moi, et vous voilà tout troublé, tout effaré, comme si je conspirais contre le roi Georges!... Ne pouvez-vous pas, monsieur, me donner tout bonnement cette explication? car enfin, je vous le répète, je suis étranger; et tout ?a, c'est de l'hébreu pour moi.?
La dernière observation était adressée à la personne qui causait évidemment l'embarras de Joe Willet. Elle s'était levée, mettait son manteau de voyage et se préparait à sortir. Ayant répondu d'une manière brève qu'il ne pouvait pas lui donner de renseignements, le jeune homme fit un signe à Joe, lui tendit une pièce de monnaie pour payer sa dépense, et s'élan?a dehors, accompagné du jeune Willet lui-même, qui prit une chandelle pour le suivre et l'éclairer jusqu'à la porte.
Pendant que Joe s'absentait pour s'acquitter de cet office, le vieux Willet et ses trois compagnons continuèrent à fumer avec une extrême gravité, dans un profond silence, ayant chacun leurs yeux fixés sur un chaudron de cuivre qui était pendu à la crémaillère sur le feu. Au bout de quelque temps, John Willet secoua lentement la tête, et là-dessus ses amis secouèrent aussi lentement la tête, mais sans que personne détournat ses yeux du chaudron, et sans rien changer à l'expression solennelle de leur physionomie.
Enfin Joe rentra, fort causeur et fort conciliant, comme un homme qui s'attend à être grondé et qui voudrait esquiver le coup.
?Ce que c'est que l'amour! dit-il en avan?ant une chaise près du feu et jetant à la ronde un regard qui cherchait la sympathie. Il vient de partir pour Londres, tout du long, rien que ?a. Son bidet, qu'il a rendu boiteux à le faire galoper ici cette après- midi, venait à peine de se reposer sur une confortable litière dans notre écurie il n'y a qu'un instant; et lui-même le voilà qui renonce à un bon souper bien chaud et à notre meilleur lit... pourquoi? parce que Mlle Haredale est allée à un bal masqué à Londres, et qu'il met la joie de son coeur à la voir. Ce n'est pas moi qui ferais ?a, toute belle qu'elle est. Mais moi, je ne suis pas amoureux, ou ce serait
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