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Aziyade, by Pierre Loti
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Title: Aziyade Extrait des notes et lettres d'un lieutenant de la marine anglaise entre au service de la Turquie le 10 mai 1876 tue dans les murs de Kars, le 27 octobre 1877.
Author: Pierre Loti
Release Date: February 11, 2004 [EBook #11035]
Language: French
Character set encoding: ISO Latin-1
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AZIYADE
par PIERRE LOTI
De l'Academie francaise
Extrait des notes et lettres d'un lieutenant de la marine anglaise entre au service de la Turquie le 10 mai 1876 tue dans les murs de Kars le 27 octobre 1877.
PREFACE DE PLUMKETT
AMI DE LOTI
Dans tout roman bien conduit, une description du heros est de rigueur. Mais ce livre n'est point un roman, ou, du moins, c'en est un qui n'a pas ete plus conduit que la vie de son heros. Et puis decrire au public indifferent ce Loti que nous aimions n'est pas chose aisee, et les plus habiles pourraient bien s'y perdre.
Pour son portrait physique, lecteur, allez a Musset: ouvrez "Namouna, conte oriental" et lisez:
Bien cambre, bien lave; ........ Des mains de patricien, l'aspect fier et nerveux Ce qu'il avait de beau surtout, c'etaient les yeux.
Comme Hassan, il etait tres joyeux, et pourtant tres maussade; indignement naif, et pourtant tres blase. En bien comme en mal, il allait loin toujours; mais nous l'aimions mieux que cet Hassan egoiste, et c'etait a Rolla plutot qu'il eut pu ressembler ...
Dans plus d'une ame on voit deux choses a la fois:
..................
Le ciel,--qui teint les eaux a peine remuees,
..................
Et la vase,--fond morne, affreux, sombre et dormant.
(VICTOR HUGO, les Ondines.)
PLUMKETT.
1
SALONIQUE
JOURNAL DE LOTI
I
16 mai 1876.
... Une belle journee de mai, un beau soleil, un ciel pur ... Quand les canots etrangers arriverent, les bourreaux, sur les quais, mettaient la derniere main a leur oeuvre: six pendus executaient en presence de la foule l'horrible contorsion finale ... Les fenetres, les toits etaient encombres de spectateurs; sur un balcon voisin, les autorites turques souriaient a ce spectacle familier.
Le gouvernement du sultan avait fait peu de frais pour l'appareil du supplice; les potences etaient si basses que les pieds nus des condamnes touchaient la terre. Leurs ongles crispes grincaient sur le sable.
II
L'execution terminee, les soldats se retirerent et les morts resterent jusqu'a la tombee du jour exposes aux yeux du peuple. Les six cadavres, debout sur leurs pieds, firent, jusqu'au soir, la hideuse grimace de la mort au beau soleil de Turquie, au milieu de promeneurs indifferents et de groupes silencieux de jeunes femmes.
III
Les gouvernements de France et d'Allemagne avaient exige ces executions d'ensemble, comme reparation de ce massacre des consuls qui fit du bruit en Europe au debut de la crise orientale.
Toutes les nations europeennes avaient envoye sur rade de Salonique d'imposants cuirasses. L'Angleterre s'y etait une des premieres fait representer, et c'est ainsi que j'y etais venu moi-meme, sur l'une des corvettes de Sa Majeste.
IV
Un beau jour de printemps, un des premiers ou il nous fut permis de circuler dans Salonique de Macedoine, peu apres les massacres, trois jours apres les pendaisons, vers quatre heures de l'apres-midi, il arriva que je m'arretai devant la porte fermee d'une vieille mosquee, pour regarder se battre deux cigognes.
La scene se passait dans une rue du vieux quartier musulman. Des maisons caduques bordaient de petits chemins tortueux, a moitie recouverts par les saillies des shaknisirs (sorte d'observatoires mysterieux, de grands balcons fermes et grilles, d'ou les passants sont reluques par des petits trous invisibles). Des avoines poussaient entre les paves de galets noirs, et des branches de fraiche verdure couraient sur les toits; le ciel, entrevu par echappees, etait pur et bleu; on respirait partout l'air tiede et la bonne odeur de mai.
La population de Salonique conservait encore envers nous une attitude contrainte et hostile; aussi l'autorite nous obligeait-elle a trainer par les rues un sabre et tout un appareil de guerre. De loin en loin, quelques personnages a turban passaient en longeant les murs, et aucune tete de femme ne se montrait derriere les grillages discrets des haremlikes; on eut dit une ville morte.
Je me croyais si parfaitement seul, que j'eprouvai une etrange impression en apercevant pres de moi, derriere d'epais barreaux de fer, le haut d'une tete humaine, deux grands yeux verts fixes sur les miens.
Les sourcils etaient bruns, legerement fronces, rapproches jusqu'a se rejoindre; l'expression de ce regard etait un melange d'energie et de naivete; on eut dit un regard d'enfant, tant il avait de fraicheur et de jeunesse.
La jeune femme qui
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