foyer. Le papier se couvre de dessins ou de peintures; le canevas, la mousseline ou la soie se remplissent de fleurs ou d'arabesques, et si quelque pas inusit�� se fait entendre dans la salle voisine, si une main incertaine cherche �� ouvrir la porte, on tressaille, on se regarde constern��, on redoute l'arriv��e d'un ��tranger, d'une conversation quelconque venant interrompra la lecture ch��rie. Mais, grace au ciel, les Montfeuilly ne sont point gens du monde; c'est presque toujours un bon voisin, un ami qui vient nous surprendre. ?Ah! c'est toi! A la bonne heure! Tu nous as fait bien peur, nous lisions....--Oui, oui, dit-il, j'en suis,? et il prend le livre.
Vous m'avez autoris�� �� vous rendre compte, dans la forme s��rieuse ou famili��re qui se pr��sentera, de l'impression produite sur nous par ces lectures. Elles ne sont pas tellement fr��quentes et tellement suivies que je ne puisse vous parler de temps en temps de tout ce que nous aurons lu ou relu; car je ne saurais, en aucune fa?on, m'astreindre exclusivement �� un compte rendu d'ouvrages nouveaux, et il pourra bien m'arriver de vous parler de choses anciennes et consacr��es. Pour vous faire agr��er mes r��flexions, il faut que je vous dise et que je vous fasse agr��er aussi l'enti��re libert�� de choix, le manque absolu de m��thode avec lesquels on proc��de ici. Il y a quelque chose de plus capricieux et de plus inconstant qu'un lecteur, c'est plusieurs lecteurs r��unis. Ce qui charme l'un ennuie ou fatigue souvent l'autre, et r��ciproquement. On abandonne quelquefois de bons livres pour en prendre de moins bons. C'est que beaucoup d'ouvrages, qui ont un certain charme dans l'isolement, en manquent tout �� fait, on ne sait trop pourquoi, dans l'audition collective. Le style y est pour beaucoup, mais il y a encore d'autres raisons que je saurai peut-��tre vous dire en leur lien. Ce pr��ambule est d��j�� trop long, et je me hate de remplir mon engagement.
Toutefois, un mot encore pour en rafra?chir les termes dans notre m��moire. Il est convenu que lorsqu'on aura caus�� pendant un certain temps en lieu de lire, je vous parlerai de ce qui aura fait le sujet de la causerie, pour peu qu'elle ait eu rapport �� des impressions, a des souvenirs d'art quelconques, et qu'il en soit sorti quelque chose d'assez pr��cis et d'assez bien r��sum�� pour ��tre recueilli ou comment��. Ce genre de causerie surgit rarement dans la compl��te intimit�� de la famille. Quand le nid est bien chaudement blotti sous le toit, on discute peu, on vit; c'est-��-dire qu'on lit ensemble et qu'on avance dans l'��motion ou dans l'int��r��t sans s'interrompre pour juger. Mais quand l'��t��, sans vous ��loigner de la table, agrandit le cercle affectueux des commensaux, les uns parlent, les autres ��coutent. Je suis souvent parmi les derniers, sauf �� discuter apr��s coup avec moi-m��me.
Ainsi je vous parlerai de tout ce qui nous aura frapp��s, mais non pas de tout ce qui aurait m��rit�� de nous frapper ou de nous occuper dans la vie en commun, car cette vie, lorsqu'elle se passe aux champs, est pleine de lacunes et d'impr��vus. Un rayon de soleil emporte toutes choses et toutes gens dans le domaine de la r��verie et des contemplations.
Contemplations! Voil�� un mot qui me presse! car c'est la plus fra?che, la plus r��cente de nos lectures, et c'est un beau sujet pour entrer en mati��re.
Il est rare que nous lisions des vers autour de la table. Les vers veulent ��tre lus tout haut beaucoup mieux que nous ne savons lire, et ceux-ci ont fait exception. Bien ou mal, nous ��tions impatients de nous les communiquer, sauf �� relire chacun pour soi apr��s l'audition.
Il e?t fallu proc��der avec ordre, mais les recueils de po��sies sont expos��s �� cette profanation d'��tre ouverts au hasard, comme s'ils avaient ��t�� faits pour servir de rafra?chissements entre deux contredanses. Les plus fervents ou les plus consciencieux commettent cette faute tout comme les autres, et pourtant, s'il est un recueil de vers qui m��rite le nom de livre et qui soit un ouvrage, c'est celui-ci.
C'est hier que la grand'm��re nous apporta ces deux volumes. Comme on se les arrachait, elle m'en mit un dans les mains, en me priant de le lire haut, l�� o�� elle l'ouvrirait avec son aiguille �� tapisserie. Nous tombames sur la pi��ce intitul��e Villequier, un vrai chef-d'oeuvre.
--Attendez, dit Th��odore, l'a?n�� des Montfeuilly; avant que vous commenciez, je vous avertis que je ne suis pas un s��ide et que je ne vais pas suivre l'auteur dans ses fantaisies avec un plaisir sans m��lange: il a de trop grandes jambes pour cela.
--C'est peut-��tre aussi que vous avez le pas trop court, lui r��pondit la belle Julie, la fille enthousiaste et g��n��reuse du vieux voisin.
--C'est possible, r��pliqua Th��odore. Je ne suis pourtant pas de ceux qui
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