pour parler comme M. Fouill��e, ont guid�� la philosophie du pass��. Les id��es d'_unit��_ et d'_��volution_ appartiennent �� la science. Elles expriment le fonds propre de celle-ci, elles figurent ou symbolisent la recherche exp��rimentale. L'id��e de l'_au-del��_ appartient �� la m��taphysique qui la re?ut en h��ritage de la th��ologie. Elle forme l'apport atavique de l'ignorance primitive, elle figure ou symbolise l'incertitude initiale, ins��parable de l'esprit de cr��dulit��.
[p.32] Mais ces m��mes id��es directrices manifestent en outre deux tendances fondamentales qui, dans l'ordre intellectuel, s'opposent comme l'affirmation et la n��gation, et, dans l'ordre ��motif, comme l'optimisme et le pessimisme du savoir. Certes, nous sommes loin de m��priser les avantages qui se peuvent retirer du pessimisme ou de la n��gation contenus en de justes bornes. Nous sommes loin aussi de contester l'utilit�� relative du mythe religieux. Mais cela ne saurait nous emp��cher de reconna?tre la v��rit�� de l'observation selon laquelle l'agnosticisme, p��n��trant dans le milieu fa?onn�� par les d��couvertes de la science, y d��termina toujours une forte fermentation m��taphysique.
Dans la philosophie du temps actuel, ces trois grandes id��es sont largement repr��sent��es.
Le criticisme, h��ritier direct de l'id��alisme, commence par raffermir sur ses bases l'agnosticisme ��branl�� par les progr��s de la science. Il cherche �� ��tablir un modus vivendi provisoire [p.33] entre l'a priori et l'a posteriori. Voici, en deux mots, comment il proc��de: il range un ��l��ment th��orique important, l'unit��, dans le domaine de l'_a priori_; il le distrait totalement de la science, �� qui il ne laisse qu'un seul ingr��dient, le diff��rentiel, le multiple, ou r��volution sous le nom d'exp��rience sensible. Il arrive ainsi �� cr��er ou, plut?t, �� renouveler le monisme transcendant.
Kant se pr��occupe beaucoup de l'unit�� philosophique. Il croit m��me avoir fait, �� cet ��gard, un pas consid��rable en avant. Il assimile ce qu'il appelle sa d��couverte �� celle de Copernic renversant les r?les attribu��s, dans leur r��volution r��ciproque, �� la terre et au soleil. La comparaison semble exacte en ce sens que, si les principaux adversaires de Kant concevaient la mati��re comme le foyer central o�� se r��unissent toutes les existences, lui, l'id��aliste nourri par la forte critique sensualiste dirig��e contre les exc��s du mat��rialisme, se tournait du c?t�� oppos��. Il subordonnait la nature �� l'esprit, [p.34] il proclamait hautement que l'universalit�� et la n��cessit��--encore deux synonymes vagues de l'unit�� si ardemment poursuivie--entrent dans la connaissance par le sujet, seul ��l��ment actif, non par l'objet, produit �� peu pr��s passif de notre mentalit��. Mais l'analogie invoqu��e par Kant ne se justifie plus si l'on songe que l'inversion dont il s'attribue le m��rite est aussi vieille que la philosophie elle-m��me. Kant reprend la th��se du monisme id��aliste affirmant la supr��matie du sujet sur l'objet. L'homme est la mesure des choses, disait Protagoras, les id��es sont la seule r��alit�� certaine, r��p��te apr��s lui Platon, les objets de l'exp��rience sont nos objets, conclut Kant, en se doutant bien un peu, je suppose, qu'il paraphrase ses pr��d��cesseurs. La solution de Kant ne r��sout ��videmment rien. Son monisme est aussi hypoth��tique et exclusif que les tentatives qui pr��par��rent la sienne. La question demeure pos��e dans les m��mes termes. Toutefois, en accusant l'importance du point de vue biologique, [p.35] jusque-l�� trop n��glig��, la critique kantienne ��largit le terrain de l'��ternelle dispute, elle ajoute �� l'enqu��te de nouveaux documents, elle compl��te, pour ainsi dire, l'inventaire m��taphysique.
La philosophie positive vient ensuite. H��riti��re du mat��rialisme, elle proc��de comme son anc��tre direct, elle a la passion de tout vulgariser. Mais, cette fois, la th��se qu'elle popularise inconsciemment se distingue �� peine de celle d��fendue par le criticisme. A son tour, elle se donne la tache d'��tablir un modus vivendi entre les termes de l'antique antinomie. Pourtant, elle fait la part plus grande �� l'��l��ment scientifique, �� l'��volution, �� l'exp��rience. Elle d��veloppe le principe exp��rimental jusqu'�� lui subordonner l'id��e unitaire. Elle prend ainsi, selon nous, justement le contre-pied du vrai rapport qui existe entre r��volution et l'unit��; et son monisme, irr��parablement atteint par ce vice radical, demeure terne, vague, contradictoire, ind��cis.
[p.36] Au positivisme enfin succ��de l'��volutionnisme qui d��voile avec franchise le sens r��el des croyances th��ologiques. Cette philosophie ram��ne l'id��e divine et le sentiment religieux au concept essentiellement ��motif de l'Incognoscible. Mais loin d'en inf��rer la d��ch��ance future de l'agnosticisme, elle porte aux nues cette tendance de l'esprit humain, elle c��l��bre ses m��rites, elle s'efforce d'en faire le pivot central d'une conception rationnelle de la nature. Elle croit, du reste, fermement �� la possibilit�� d'une conciliation, d'une entente durable entre l'id��e religieuse ou agnostique et le concept exp��rimental ou ��volutionniste. Partant, elle exalte, elle glorifie ce dernier principe qui s'��tait d��j�� affirm�� avec une certaine force dans la philosophie du si��cle, �� deux reprises diff��rentes, par la critique kantienne de l'exp��rience et surtout par les id��es sociologiques d'Auguste Comte. Dans ces conditions, la doctrine spenc��rienne ne pouvait se montrer hostile ��
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