moindre provocation, elle s'abattait comme une tigresse sur l'innocent agneau qu'elle avait pour ma?tresse. Connaissant sa valeur cependant, Genevi��ve souffrait tout en silence; mais une apr��s-midi que Marie donnait libre carri��re �� sa mauvaise humeur en faisant des remarques insolentes et demandait pourquoi certaines personnes ont ��t�� mises dans le monde puisqu'elles ne pouvaient pas m��me aider une pauvre servante ��cras��e d'ouvrage, son ma?tre, qu'elle croyait tr��s-occup�� dans la cour, ��tait entr�� sans qu'elle s'en f?t aper?ue, et apr��s avoir ��cout�� un instant ses diatribes, il la prit par le bras, et lui ordonna de faire de suite son paquet et de partir.
Il s'en suivit naturellement une temp��te. Genevi��ve courut chercher un refuge dans sa chambre o�� elle ��couta, avec une alarme nerveuse, le bruit qui se faisait dans la cuisine, le fracas de la vaisselle, le cliquetis des couteaux, les mouvements spasmodiques des chaises, des bancs et des seaux qu'on renversait. Le vacarme finit par cesser, et le mari et la femme se sentirent tous deux soulag��s quant la porte se referma sur leur habile mais redoutable servante--Paul remerciant pieusement mais d'une mani��re quelque peu obscure, la Providence ?de la paix qui leur ��tait maintenant accord��e, quant m��me ils devraient retomber dans le chaos o�� ils ��taient auparavant?, voulant probablement faire allusion �� l'irr��gularit�� g��n��rale et �� la confusion d'o�� l'activit�� de Marie avait retir�� sa maison.
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III
La soci��t�� continuait toujours son va-et-vient chez M. de Courval, car les bois aux teintes claires et les ��pais nuages couleur d'ambre du mois d'octobre, outre l'abondance de l'excellent gibier que l'on trouvait dans les environs, rendaient la campagne aussi attrayante qu'elle l'avait ��t�� pendant la belle saison.
Il passait fr��quemment devant la porte de Durand des messieurs arm��s de fusils et suivis de lurs chiens, les uns �� cheval, les autres �� pied; mais Genevi��ve ne les voyait pas. M. de Courval avait souvent invit�� et d'une mani��re pressante les nouveaux mari��s �� venir visiter le Manoir, mais comme Paul ne s'en souciait ��videmment pas tandis que des ��trangers s'y trouveraient, Genevi��ve demeurait tranquillement chez elle.
Une apr��s-midi qu'elle ��tait debout devant la porte de sa maison et qu'elle admirait dans le lointain les magnifiques coteaux embras��s par les rayons dor��s qu'offre une superbe journ��e de cette belle saison qu'on appelle ��t�� de la St. Martin, M. de Courval passa �� pied accompagn�� de deux de ses amis. Ils paraissaient tous trois ext��nu��s de fatigue, car ils marchaient depuis une heure fort matinale, et lorsque Genevi��ve, que M. de Courval avait abord��e avec sa politesse ordinaire, leur offrit d'entrer un instant pour se reposer,--chose qu'elle ne pouvait manquer de faire sans violer les r��gles de la plus commune courtoisie, attendu que M. de Courval se plaignait de la fatigue,--ils accept��rent avec joie son invitation. Il lui pr��senta ses deux amis, le premier un M. Caron, homme d'un age m?r, le second un jeune et charmant officier de cavalerie, du nom de de Chevandier, qui venait d'arriver de France pour passer quelque temps en Canada.
Ce dernier parut �� la fois surpris et frapp�� de la beaut�� et des mani��res gracieuses de leur h?tesse, qui ��tait occup��e �� placer devant eux des verres et une cruche d'excellent cidre, qui, nous n'avons pas besoin de le dire, n'��tait pas de manufacture domestique.
Cependant, Genevi��ve ne s'aper?ut pas de l'attention particuli��re dont elle ��tait l'objet de la part du Capitaine de Chevandier, qui aurait ��t�� extr��mement afflig�� s'il eut su qu'elle n'avait seulement pas remarqu�� l'abondance de ses cheveux liss��s, sa belle moustache, ou la classique r��gularit�� de ses traits.
Sur ces entrefaites arriva Durand qui s'empressa de leur offrir l'hospitalit��, et il le fit avec une aisance et une politesse exquise. Les pr��jug��s aristocratiques de de Chevandier furent en quelque sorte choqu��s par l'arriv��e sur la sc��ne de cet h?te roturier; mais ses airs de grand seigneur produisirent aussi peu d'effet sur le mari que ses regards d'admiration en avaient fait sur la femme. Quant nos trois amis se furent repos��s et rafra?chis, ils prirent leur cong��, et en revenant notre Adonis militaire s'abandonna �� d'amers regrets sur ce que ?cette charmante petite cr��ature avait pour destin��e de passer toute sa vie au milieu des vaches, des volailles et autres choses semblables.?
Aussit?t qu'ils furent partis, Durand annon?a �� sa femme qu'il pensait aller �� Montr��al pour y acheter des ��piceries et autres articles de n��cessit��, ainsi que pour voir le marchant �� qui il avait coutume de vendre la plus grande partie des produits de sa ferme, et il lui demanda si elle aimerait �� l'accompagner.
--Quoique nous n'ayons cette ann��e ni beurre, ni volailles �� vendre, je puis, ma petite femme, te donner quelques piastres, que tu pourras d��penser en rubans, dans les beaux magasins,--ajouta-t-il en souriant, car il s'attendait �� ce que Genevi��ve accepterait son offre avec empressement:
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