Voyages | Page 5

Théodore Aynard
une, ce qui co?tait une centaine de francs en moyenne, ce prix ��tait variable suivant les circonstances. C'��tait donc une d��pense d'environ 500 francs, sans compter les frais des h?tels qui l'augmentaient beaucoup, si l'on ne marchait pas jour et nuit.
Ce chiffre peut ��tre consid��r�� comme exact. Au moment de la premi��re invasion du chol��ra �� Paris en 1832, qui d��buta d'une mani��re foudroyante, emportant Casimir P��rier, alors pr��sident du conseil des ministres, mes parents furent tr��s inquiets, et se d��cid��rent �� venir me chercher. On ��tait si terrifi�� qu'ils arriv��rent seuls �� Paris dans une grande diligence �� vingt places; celles qu'ils rencontraient en sens inverse ��taient au contraire toutes pleines de fuyards.
M'ayant trouv�� bien portant et pas effray�� du tout, ils durent repartir tout de suite, par l'ordre des m��decins; mais toutes les voitures publiques, malles et diligences ��tant encombr��es, ils ne purent partir qu'en poste, en louant une cal��che �� Paris.
Ils me laiss��rent 500 francs pour prendre aussi la poste et revenir �� Lyon au galop, si le chol��ra arrivait �� l'Ecole polytechnique.
Quoique fortement menac��e au milieu du quartier Mouffetard, o�� les habitants ��taient d��cim��s, grace �� Dieu l'Ecole fut pr��serv��e, fort heureusement pour moi, pour mes 500 francs et pour beaucoup d'autres.
Le prix du voyage par la malle ��tait beaucoup moins cher, 92 francs par personne; mais il ��tait fort difficile d'avoir des places sans les retenir longtemps d'avance.
Pour ceux qui n'en avaient pas l'habitude, le r��glement avec les postillons ��tait ennuyeux et souvent compliqu��. Mon p��re, fort expert dans cette mani��re de voyager, m'y avait initi�� de bonne heure.
Nous allions souvent �� Sury, pr��s de Montbrison; pour faire la course en une journ��e, il n'y avait que la poste. Longtemps avant que j'eusse barbe au menton, on m'avait confi�� ce service, qui n'��tait pas toujours commode.
Un jour nous part?mes de Lyon dans une petite cal��che avec un seul cheval, le n?tre; �� la poste de Brignais, naturellement, on en mit deux; �� Rive-de-Gier on en mit encore deux, mais on en fit payer trois; �� Saint-Chamond on voulait en mettre trois et nous en faire payer quatre.
Exasp��r�� de cette progression croissante, je fis mettre les quatre chevaux et deux postillons. C'est ainsi que nous f?mes une entr��e triomphante �� Saint-Etienne, sur la place Chavannel, dans la cour de la manufacture d'armes, qu'habitait mon oncle.
Les officiers d'artillerie se mettaient aux fen��tres, croyant �� une inspection impr��vue du ministre de la guerre; ce n'��tait qu'un ��colier en vacances qui avait voulu faire claquer son fouet tout comme un autre.
Lorsque mon grand-p��re conduisait sa famille �� Sury, avec sa voiture et ses chevaux, il couchait toujours en route.
Les chemins ��taient si mauvais avant 1820, qu'il ��tait tout �� fait extraordinaire si, pendant le trajet, on ne versait qu'une fois.
Facheuses cons��quences des guerres de Napol��on Ier, qui avait supprim�� l'entretien des routes pour mieux assurer l'entretien de ses arm��es.
C'��tait une belle institution, la poste aux chevaux, surtout dans le moment de sa grande activit��. Rien n'��tait plus vivant, et ne donnait plus envie de voyager, que de voir une grande berline avec si��ge devant et derri��re, attel��e de quatre beaux chevaux conduits par des postillons alertes, en habits bleus, bord��s de rouge et galonn��s, avec leurs grosses bottes, assez dures pour les pr��server du contact des brancards et des timons.
De loin on entendait le claquement des fouets se m��lant au bruit joyeux des grelots, pour faire ��carter les autres voitures; car c'��tait un privil��ge de la poste royale. On devait lui laisser le haut du pav��, ou le milieu de la chauss��e.
C'��tait ordinairement de cette mani��re que faisaient leurs voyages de noces les jeunes mari��s de bonne maison.
Mais quelques-uns partant �� la nuit tombante, n'allaient que jusqu'au premier relai, revenaient en ville �� la nuit close, et rentraient discr��tement �� pied dans leur maison, o�� personne ne venait les voir pendant quinze jours.
Sur les lettres d'invitation au mariage, on imprimait r��guli��rement en post-scriptum: On part pour la campagne, cela voulait dire: nous n'avons pas besoin de vous, ce n'est donc pas la peine de vous d��ranger. Ce n'��tait point un mensonge; on partait bien, en effet, pour le pays de Tendre; car alors, si l'on ne lisait d��j�� plus l'Astr��e d'Honor�� d'Urf�� et les romans de Mlle de Scud��ri, on en conservait encore les traditions.
Comme beaucoup de choses de ce monde, h��las! le postillon a disparu; ce n'est plus sur son cheval, mais seulement sur la sc��ne, qu'on pourra voir encore le Postillon de Lonjumeau, quand l'Op��ra-Comique sera reconstruit, car lui aussi vient de dispara?tre dans un affreux d��sastre, sans emporter cependant nos anciens souvenirs.
Les ma?tres de poste ont fait comme le postillon; j'ai connu les deux derniers de Paris et de Lyon, MM. Dailly et Mottard; tous deux aimaient tant leurs chevaux qu'ils n'ont pas voulu s'en s��parer.
C'est
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