Voyages abracadabrants du gros Philéas

Olga de Pitray
Voyages abracadabrants du gros
Philéas

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Title: Voyages abracadabrants du gros Philéas
Author: Olga de Pitray
Release Date: May 12, 2005 [EBook #15823]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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ABRACADABRANTS DU ***

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[Illustration 01.png]
VOYAGES ABRACADABRANTS DU GROS PHILÉAS
PAR La Vtesse de PITRAY NÉE de SÉGUR
DESSINS DE Mme DE LA FARGUE GRAVURE DE PEREZ

PARIS GAUME ET Cie ÉDITEURS 3, RUE DE L'ABBAYE, 3

1890

A MADEMOISELLE MARGUERITE PASCAL
_Voici votre Dédicace, chère enfant, elle est bien due à l'héritière d'un
nom qui fait rayonner une splendide auréole sur votre front gracieux!
vous accueillerez avec plaisir, je l'espère, le récit naïf d'un brave garçon
que je me plais à placer sous votre protection afin de lui porter
bonheur!_
OLGA DE SÉGUR Vicomtesse de Simard de Pitray. Paris, le 19
décembre 1889.

_Lettre à Monsieur X..._
MONSIEUR,
Madame de Pitray, qui veut bien rédiger mes nombreuses aventures de
voyage, me dit que vous froncez le sourcil à la lecture de ces récits
extraordinaires. Vous les accusez d'invraisemblance? Mais, Monsieur,
j'en suis ravi! C'est par là qu'ils brillent! C'est par là qu'ils intéressent
mes nombreux amis. C'est par là, enfin, que je suis digne de mon
illustre parenté. Mon arrière-grand-oncle, M. le baron de Crac, a laissé
des mémoires à sa famille. Mon arrière-cousin, M. le baron de
Munckausen, non moins soucieux de sa propre gloire, a publié ses
illustres aventures. (Elles ont acquis un nouvel éclat en se faisant graver
par notre grand artiste, Gustave Doré.) Mais mon oncle de Crac, par
son silence prolongé, avait longtemps laissé la France dans une
infériorité littéraire dont je me suis montré mécontent.
J'ai fait violence à ma modestie bien connue et j'ai prié Mme de Pitray
de retracer tous mes hauts faits. Je n'ai pas la prétention d'instruire.
Munckausen ne l'avait pas non plus; mais, comme lui, je veux
intéresser, je veux dire du nouveau et surtout je veux amuser, sachant
bien que lorsque la critique à ri, elle est désarmée.
Laissez-moi donc, Monsieur, raconter à la bonne franquette mes
nombreux et lointains voyages et si, pour satisfaire les scrupules de
votre conscience, il me faut faire un acte de franchise, il ne me sera pas
impossible de vous avouer tout bas que je vous autorise à ne pas les
croire véritables. Intitulez-les si vous voulez: _Voyages...
abracadabrants du gros Philéas_ et, par cette gracieuse concession,

redevenons bons amis, ce à quoi vous savez que Mme de Pitray tient
essentiellement.
C'est dans cette espérance que je me déclare, Monsieur, avec le respect
le plus profond,
Votre tout dévoué serviteur,
PHILÉAS SAINDOUX. De mon château de Castel-Saindoux.

CHAPITRE PREMIER
LUTTE MUSICALE DE DEUX CHANTRES
Peu de temps après être revenu de son voyage aux bains de mer, M. de
Marsy reçut la visite de Philéas Saindoux[1] qui le pria de venir
honorer de sa présence une réunion musicale et lui raconta ce qui suit:
Deux chantres renommés, demeurant dans des villages différents,
s'étaient donné rendez-vous à Beaugé pour savoir lequel des deux avait
le plus de talent. Canonet, chantre de Saint-Symphorien, possédait une
magnifique et formidable voix de basse profonde. Il était presque sans
rival à dix lieues à la ronde. Un seul homme, dans les environs, osait lui
tenir tête dans les roulades qui plongeaient en extase les Normands,
grands et petits.
[Note 1: Voir _Les Débuts du gros Philéas_, du même auteur (chez
Hachette).]
Rossignol, chantre de Saint-Eutrope, charmait les oreilles par une voix
de ténor des plus aiguës. Il allait à une hauteur étonnante. Grâce à ces
artistes, les deux villages étaient en rivalité déclarée.
[Illustration 02.png]
Jusqu'alors, la grande distance qui séparait les chantres et leurs
fanatiques avait empêché toute lutte.
Le grand jour arriva bientôt.
Sur la place du village s'agitaient tumultueusement les partisans des
rivaux. Les admirateurs de Canonet entouraient leur chantre bien-aimé,
tandis que ceux de Rossignol faisaient au ténor un cortège non moins
pompeux.
[Illustration 03.png]
Les amis de Canonet paraissaient fort inquiets, car depuis le matin il
était impossible à leur concitoyen de donner une seule de ces notes
formidables qui les ravissaient. L'extinction de voix de Canonet
continuant, ils tinrent conseil.

[Illustration 04.png]
Philéas, un de ses fanatiques, s'approcha de lui avec une joie contenue;
il portait à
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