Teverino

George Sand
Teverino

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Title: Teverino
Author: George Sand
Release Date: March 8, 2005 [EBook #15287]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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George Sand
[Illustration]
TEVERINO

NOTICE
Teverino est une pure fantaisie dont chaque lecteur peut tirer la conclusion qu'il lui plaira. Je l'ai commenc��e �� Paris, en 1845, et termin��e �� la campagne, sans aucun plan, sans aucun but que celui de peindre un caract��re original, une destin��e bizarre, qui peuvent para?tre invraisemblables aux gens de haute condition, mais qui sont bien connus de quiconque a v��cu avec des artistes de toutes les classes. Ces natures admirablement dou��es, qui ne savent ou ne veulent pas tirer parti de leurs riches facult��s dans la soci��t�� officielle, ne sont point rares, et cette ind��pendance, cette paresse, ce d��sint��ressement exag��r��s, sont m��me la tendance propre aux gens trop favoris��s de la nature. Les sp��cialit��s ouvrent et suivent avec acharnement la route exclusive qui leur convient. Il est des sup��riorit��s tout �� fait oppos��es, qui, se sentant ��galement capables de tous les d��veloppements, n'en poursuivent et n'en saisissent aucun. Ce que je me suis cru le droit de po��tiser un peu dans _Teverino_, c'est l'excessive d��licatesse des sentiments et la candeur de l'ame aux prises avec les exp��dients de la mis��re. Il ne faudrait pas prendre au pied de la lettre les paradoxes qui s��duisent l'imagination de ce personnage, et croire que l'auteur a ��t�� assez p��dant pour vouloir prouver que la perfection de l'ame est dans une libert�� qui va jusqu'au d��sordre. La fantaisie ne peut rien prouver, et l'artiste qui se livre �� une fantaisie pure ne doit pr��tendre �� rien de semblable. Est-il donc n��cessaire, avant de parler �� l'imagination du lecteur, par un ouvrage d'imagination, de lui dire que certain type exceptionnel n'est pas un mod��le qu'on lui propose? ce serait le supposer trop na?f, et il faudrait plut?t conseiller �� ce lecteur de ne jamais lire de romans, car toute lecture de ce genre est pernicieuse �� quiconque n'a rien d'arr��t�� dans le jugement ou dans la conscience.
On m'a reproch�� de peindre tant?t des caract��res dangereux, tant?t des caract��res impossibles �� imiter; dans les deux cas j'ai prouv�� apparemment que j'avais trop d'estime pour mes lecteurs. Qu'au lieu de s'en indigner ils la m��ritent. Voil�� ce que je puis leur r��pondre de mieux.
Je ne d��fendrai ici que la possibilit��, je ne dis pas la vraisemblance du caract��re de _Teverino_: cette possibilit��, beaucoup de gens pourraient se l'attester �� eux-m��mes en consultant leurs propres souvenirs. Beaucoup de gens ont connu une esp��ce de Teverino male ou femelle dans le cours de leur vie. Il est vrai qu'en revanche, pour un de ces ��tres privil��gi��s qui restent grands dans la vie de boh��mien, il en est cent autres qui y contractent des vices incurables; cette classe d'aventuriers est nombreuse dans la carri��re des arts. Elle se d��grade plus souvent qu'elle ne s'��l��ve; mais les individus peuvent toujours s'��lever, et m��me se relever quand ils ont du coeur et de l'intelligence. Cela, je le crois fermement pour tous les ��tres humains, pour tous les ��garements, pour tous les malheurs, et dans toutes les conditions de la vie. Il est bon de le leur dire, et c'est pour cela qu'il est bon d'y croire. Je ne m'en ferai donc jamais faute.
GEORGE SAND.
Nohant, mai 1852.

I.
VOGUE LA GAL��RE.
Exact au rendez-vous, L��once quitta, avant le jour, l'_H?tel des ��trangers_, et le soleil n'��tait pas encore lev�� lorsqu'il entra dans l'all��e tournante et ombrag��e de la villa: les roues l��g��res de sa jolie voiture allemande trac��rent �� peine leur empreinte sur le sable fin qui amortissait ��galement le bruit des pas de ses chevaux superbes. Mais il craignit d'avoir ��t�� trop matinal, en remarquant qu'aucune trace du m��me genre n'avait pr��c��d�� la sienne, et qu'un silence profond r��gnait encore dans la demeure de l'��l��gante lady.
Il mit pied �� terre devant le perron orn�� de fleurs, ordonna �� son jockey de conduire la voiture dans la cour, et, apr��s s'��tre assur�� que les portes de cristal �� chassis dor��s du rez-de-chauss��e ��taient encore closes, il s'avan?a sous la fen��tre de Sabina, et fredonna �� demi-voix l'air du _Barbier_:
Ecco ridente il cielo, Gi�� spunta la bella aurora... ... E puoi dormir cosi?
Peu d'instants apr��s la fen��tre s'ouvrit, et Sabina, envelopp��e d'un burnous de cachemire blanc, souleva un coin de la tendine et lui parla
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