mer: nous quittons le bateau de poste, et nous montons un batiment à vapeur appartenant à l'administration du canal du Midi, pour nous rendre à Cette, traversée de quatre lieues. Plusieurs fois, dans ce court trajet, des voyageurs paient un léger tribut à la mer. Le lac est abondant en excellents poissons; le flux et le reflux ne s'y fait pas plus sentir que sur la Méditerranée, qui l'alimente; d'aimables compagnons de route rendent notre voyage agréable. Au milieu d'une conversation animée, un jeune médecin, en démontrant que la grippe, maladie à la mode, a fait peu de victimes, grace aux précautions hypocratiques, est tout d'un coup surpris par une rafale de vent qui lui enlève son chapeau à la hauteur des nuages, et qui l'ab?me ensuite dans les ondes, sans espoir de retour.
CHAPITRE IV.
De Cette, Montpellier, Nismes, Avignon, Aix, Marseille à Toulon.
Nous arrivons ensuite à Cette, joli port de mer très-commer?ant, couvert de navires, et dont les environs sont embellis par de charmantes villas ou baraquettes. Sa population est de 7000 ames. Sit?t qu'un habitant de Cette a fait sa fortune, il se fixe à Montpellier. à Cette, une bonne barrique de vin vaut cent francs, l'eau douce y manque; il fallait la faire venir de Montpellier mais, depuis quelques années, on convertit l'eau de mer en eau potable, par la distillation; puis on a creusé des puits à quelque distance. Notre table d'h?te fut mise en ga?té par un habitant de Castelnaudari, agé de cinquante ans: il connaissait particulièrement M. Martin, capitaine de notre bateau de poste: Depuis qu'il n'était plus en nourrice, il quittait pour la première fois son hameau et son jardin: quarante lieues de chemin devenaient pour lui un voyage de long cours; il menait une vie réglée et douce; et, comme le magistère Mathieu, il était la plus forte tête du lieu: une feuille de rose pliée sur son fauteuil l'aurait contrarié. Ainsi étaient les habitants de Sibaris; il faisait ponctuellement sur sa couchette le tour du cadran, mollement préparé au sommeil, et couronné glorieusement, à l'instar du roi d'Yvetot,
....... Par Jeanneton, D'un joli bonnet de coton, Dit-on.
Il nous excitait beaucoup à rire: il était tout ébouriffé, tout haletant, tout hors de lui-même, quand il venait à nous parler de ses fatigues depuis qu'il avait quitté sa demeure. Renon?ant pour toujours aux excursions et à la gloire de passer pour infatigable voyageur, il préférait mille fois, à l'exemple de Cornaro, vivre avec une once de pain et un jaune d'oeuf, pour devenir un modèle de longévité.
Au reste, dit-il, au milieu de nos éclats d'hilarité, et prenant sa montre, son seul régulateur, voici huit heures; je suis déjà en retard pour aller go?ter les douceurs du sommeil; il nous souhaita le bon soir, et se retira précipitamment, ne voulant pas sacrifier un instant de repos. Nous saluons Frontignan et nous rendons hommage à Bacchus, en buvant pour un franc une excellente bouteille de vin de muscat; ce nectar encore sur les lèvres, nous arrivons enfin à Montpellier: immédiatement nous parcourons la belle promenade du Pérou, dont la vue s'étend sur la mer, le Canigou et le mont Ventoux, ayant auprès un chateau d'eau qui fournit tout Montpellier, dans le voisinage duquel commence le pont ou superbe aqueduc formé de deux rangs d'arcades. La porte du Pérou est magnifique, le jardin botanique rivalise un peu avec celui de Paris. La cathédrale est ordinaire. Dans le choeur, il y a un assez bon tableau qui représente Simon le magicien tombant des airs, à la prière de Saint Pierre. L'école de médecine, le Musée de peinture, la Bibliothèque augmentée du magnifique legs de M. Fabre, et la promenade esplanade sont très-importants. En général, c'est une belle ville, qui possède d'immenses fortunes; le climat y est doux et l'air très-sain; là g?t plut?t le riche que le brillant, des choses de prix que du clinquant et des colifichets; c'est une ville de propriétaires.
Il y a peu de pauvres et pas de commerce.
Nous visitons ensuite N?mes, qui possède un ancien débris de la grandeur romaine, une arène de la plus imposante magnificence; elle pouvait contenir 17,000 spectateurs. Le temple de Diane ou la Maison Carrée, qui a servi de modèle pour la construction de la bourse de Paris. Dans le Jardin Public tracé en amphithéatre aux pieds de la Tour Magne, est un second temple de Diane, bati depuis 2,500 ans, en pierres très-grosses du pays, sans chaux ni ciment; les oracles y rendaient leurs augures en trompant la crédulité par des souterrains et des conduits cachés, encore très-visibles. Quelle honteuse profession que de faire le métier, la jonglerie et le trafic d'abuser à son profit de l'ignorance des peuples! Présentement, les mystères d'Isis, les prestiges fantasmagoriques, sont dévoilés. à c?té est une galerie où l'on égorgeait les victimes, puis
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