ne fait plus de prosélytes avec le cimeterre. L'hypocrisie, le fanatisme disparaissent pour faire place à l'amour de Dieu et du prochain, qui a fait surgir cette belle pensée:
?Je crains Dieu, cher Abner, et n'ai point d'autre crainte.?
Nous nous arrêtons à Rochefort, jolie ville batie sur la rive droite de la Charente, un des cinq grands ports militaires de France. Les maisons sont élégantes et simples, les rues bien pavées, larges et coupées à angles droits. L'h?pital peut rivaliser avec celui, de Plymouth. Les chantiers de construction, les bassins de carénage; la corderie, le bagne dans l'arsenal sont fort curieux à voir. Les remparts forment une jolie promenade ainsi que le Cours d'Ablois.
Les femmes portent sur le cou des vases d'eau parlé moyen d'un levier, et leurs co?ffes, modestement canoniques descendent à triple étage comme le menton trinitaire des chanoines de Boileau. Dans les campagnes de la Charente, on voit beaucoup de moutons mérinos dont la laine est si précieuse; mais je ne pense pas qu'on en retire plus de profit que de ceux des bords de la Loire.
Nous voyons Saintes, remarquable par des antiquités qui intéressent l'archéologue, surtout par des arènes en ruines, à droite de Saint-Eutrope, inférieures à celles de N?mes. Saintes est une ville fort curieuse et fort commer?ante; vingt-cinq voitures publiques y passent chaque jour; tout y est en abondance: il y a du vin rouge à vingt francs la barrique.
L'arc de triomphe est sur le pont de la Charente avec des inscriptions à Germanicus Tibère, etc.
à quelque distance de Saintes, se trouvent les restes d'un ancien temple pa?en.
Nous voulons explorer l'embouchure de la Gironde; nous arrivons à Blaye, si célèbre par une illustre captive. Sur la terrasse de la forteresse, on avait dressé un pavillon chinois, où la Duchesse de Berri pouvait jouir de l'aspect de la mer; là, l'oeil s'étend au loin sur Lesparre, Pouliac, Plassac, Chateau de Barbe, Laroch, Médoc, Chateau Margo, etc.
Le marché offre de l'intérêt et de la variété. Il y a un bassin où les femmes, pour laver, se mettent dans des espèces de bo?tes; un beau pont au bout d'une jolie promenade nouvellement plantée, s'élève en forme d'embarcadaire pour les bateaux à vapeur.
Près Barbe, sur la rive droite, quantité de maisons sont taillées dans le roc; les sites en sont enchanteurs; ce sont des bois de chênes verts; cette c?te me para?t égaler en beauté la Tourraine. On découvre des excavations de pierres à batir, des bancs de sable, des groupes de jolies maisons couvertes en tuiles et fort commer?antes, et l'on y voit même des canons laissés du temps des invasions des Sarrasins.
La c?te de Médoc, située sur la rive gauche, se prolonge jusqu'à Bordeaux: des collines parsemées des plus charmantes habitations et qu'ombragent une foule de bosquets, offrent une perspective tout à fait pittoresque.
Partout on aper?oit des vaches bretonnes pas plus grosses que des chèvres, très-estimées et d'un bon produit.
Les malheureux ont pour ressource de se creuser des logements dans le tuf;
?Et dans le roc qui cède et se coupe aisément, Chacun peut de sa main creuser son logement.?
Après le rocher de pain de sucre, vient la tête de Buch. Voici l'endroit où la Garonne et la Dordogne mêlent leurs eaux et forment la Gironde, ou plut?t la Gironde est séparée en deux par le bec d'Ambez, pour former d'un c?té la Dordogne, et de l'autre la Garonne. Le site n'approche pas des beautés de la Dordogne, qui possède Sainte-Croix, d'où sort le vin de la plus haute réputation, Bergerac, Saint-émilion.
En approchant de Bordeaux, on voit le chateau de M. de Peyronnet, la maison de M. Cheniau, constructeur, sur le Mont Ferrand, et la maison de M. Ferrière, près de laquelle, comme par enchantement, est un bassin qui enlève les navires.
CHAPITRE II.
De Bordeaux au Canal du Languedoc.
Sit?t débarqués à Bordeaux, des commissionnaires nous présentent des cartes de traiteurs, et nous invitent à les suivre: nous sommes ainsi harcelés par ce nouveau genre de Cosaques jusqu'à notre h?tel, rue Saint-Remi, n.° 14, chez Mme Fonteneau, où nous nous trouvames très bien pendant notre séjour.
Nous n'avons pu nous lasser d'admirer les allées de Tourny, les plus jolies promenades de la ville: les Quinquonces élevés sur les débris du Chateau Trompette, qui aboutissent d'un c?té au Jardin public, et de l'autre aux bords de la Garonne; partout sont de belles maisons. Les rues Saint-Remi, Sainte-Catherine, le Chapeau-Rouge sont magnifiques. Le pont Saint-Esprit, qui conduit à la Bastide, est un des plus beaux et des plus solides de France.
Il est construit en ma?onnerie de briques et de pierres de taille.
Ce pont est composé de dix-sept arches, qui reposent sur seize piliers.
Il y a une multitude de galeries semblables à des salles de clo?tres, qui sont en communication entr'elles d'une extrémité du pont à l'autre. Il existe sous chaque trottoir, garni de
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